• Raphaël Zacharie de IZARRA - Textes 601 à 700

    601 - Une miette de Réalité

    Un secret brûlant m'habite. Nommer cette flamme dont nul ne soupçonne l'existence est impossible. C'est un secret dont il m'est interdit de parler, par la force des choses : on ne prononce pas avec les mots de la terre ce qui ne se conçoit pas sur la terre. Au-delà des tremblements, plus fracassant que les tambours du coeur, hors mesure humaine, cette chose plus grande que toute chose n'est rien qu'un silence. Un simple, immense, inexplicable silence. Un murmure, une chandelle, un point. <o:p></o:p>

    Plus loin que l'inaudible, d'une infinie proximité, surpassant tout, le tonnerre intérieur ne peut être que muet. L'âme a aussi ses larmes : ni bornes, ni normes, ni formes. C'est une tempête folle, inouïe, extravagante. Un silence à faire éclater les pierres, à faire fondre le soleil, à faire hurler la glace. Une étincelle me hante, une particule me brûle, un souffle me désagrège.<o:p></o:p>

    Si je nomme ce mystère, je ne le nomme plus. Si je mets un nom dessus, il ne signifie plus rien. Si je le désigne, il n'est plus à portée de vue. Pourtant il est là, ici et si loin, tout près et inaccessible, partout et insaisissable. Les mots, les concepts, l'imagination ne peuvent le définir, l'appréhender, l'approcher : il englobe et dépasse les termes, la pensée, les cadres.<o:p></o:p>

    Ombre palpable et éther sidéral, brume claire et éclat abyssal, ténu comme un fétu de paille, aussi dense que le roc, présent et invisible, humble et glorieux, il se révèle à travers étoiles et grain de charbon, fontaines et goutte d'eau, parcelle et montagnes de sable, plaintes du vent et chant du brin d'herbe. <o:p></o:p>

    Un secret sans nom m'habite. N'importe quel mot, c'est lui. Où que la pensée aille, il n'y est pas. Échappant à toute logique, il est admis partout. Plus réel que la substance, c'est la prière du monde, la fumée des pierres, l'écho des choses.<o:p></o:p>

    Un éclair me pulvérise, une brise m'engloutit, un follet me dévore, un reflet me foudroie, m'anéantit, me transfigure. Ce mystère, ce secret, cette chose infinie que vous soupçonnez être Dieu, que je ne puis jamais nommer, que j'appelle par tous les mots, j'en reçois aujourd'hui l'infinitésimale saveur. Juste un fragment, rien qu'une poussière, une seule cendre. <o:p></o:p>

    Un atome qui m'unit à l'Univers.<o:p></o:p>

    602 - Vive le piratage des oeuvres !

    Inique, le projet de loi visant à interdire le téléchargement des oeuvres musicales sur le NET ! Dévoyés, prostitués, sans hauteur sont les artistes qui n'acceptent de diffuser leurs productions à destination des hommes de la terre, leurs semblables, qu'à la condition d'être payés avec de l'argent ! L'art, la musique, la poésie sont une nourriture universelle par excellence. Aucune considération d'ordre pécuniaire ne devrait limiter leur diffusion. Le simple fait de consacrer son temps libre ou sa vie entière à l'art et de le diffuser sans aucune restriction, de faire profiter à qui veut les savourer les fruits de son travail, devrait suffire au bonheur de l'artiste.<o:p></o:p>

    Ce qui tue la créativité, ça n'est pas le manque d'entrée d'argent. Au contraire, c'est avec le ventre vide que le poète chante le mieux. Le confort que permettent des revenus assurés et réguliers peut même être un frein à la création. Honte aux artistes qui exigent de l'argent en échange de l'étincelle divine ! On ne devrait pas commercialiser le souffle de l'esprit. Les artistes qui soutiennent ce projet de loi se mettent sur le même plan que les marchands de lessive. <o:p></o:p>

    Ces ingrats qui des muses ont reçu un cadeau merveilleux sans que rien ne leur soit demandé en contrepartie, ces simples mortels sur lesquels à la naissance se sont penchés les dieux avec une générosité, un désintéressement sublimes afin de les combler de dons sans rien leur réclamer en échange, ces petits hommes imbus de leur céleste élection osent exiger de leurs frères humains, pourtant égaux, hommes au même titre qu'eux, qu'il les payent pour la grâce tombée du Ciel ! Ils estiment que la manifestation de l'infini vaut tant d'argent, ils considèrent que leur don octroyé gratuitement par les anges présidant à l'Art se pèse sur la balance des lois du marché... <o:p></o:p>

    Notre société matérialiste, alimentaire, mercantile qui a commercialisé, mis en rayons, "code-barré" la pensée, le Beau, les plus hauts sentiments ne peut concevoir qu'un artiste compose, écrive, imagine pour l'amour de l'art, pour la gloire des étoiles, pour la beauté du geste... Nul besoin d'argent pour créer. Les artistes qui prétendent le contraire ne sont que des vendus, des menteurs, des traîtres, des bandits qui ont fricoté avec le "diable marketing". On peut, on doit chanter sans être payé en retour. L'inspiration ne devrait pas être conditionnée par des exigences d'ordre économique.<o:p></o:p>

    Les fruits de l'esprit appartiennent à tous, pauvres et fortunés. Les richesses de l'âme ne devraient pas être soumises aux lois du marché. L'universel, ce qui est issu des profondeurs de l'homme devrait voler de tête en tête, de coeur en coeur, et non passer de porte-monnaie en tiroir-caisse.<o:p></o:p>

    Seuls les supports devraient être soumis aux méandres du commerce, pas les oeuvres.<o:p></o:p>

    Le reste, ce sont de sordides affaires de comptables ayant perdu leur âme dans de vils calculs. Si les artistes veulent se payer une plume en or, une lyre sertie de diamants, une guitare étincelante de pierres précieuses, s'ils veulent manger à leur faim, qu'ils se soumettent aux mêmes rigueurs que les autres mortels : qu'ils aillent travailler à l'usine. Le talent ne confère aucun privilège à ces humains infatués de leur héritage divin. A ceux qui ici-bas veulent monnayer le legs olympien, je réponds que leur venue au monde n'a été soumise à aucun marché. Et que si les entités célestes ne demandent rien pour tous ces trésors offerts à leurs créatures humaines, les artistes devraient remercier le sort au lieu de se plaindre, et à plus forte raison ne pas faire commerce de ces présents. Il n'en sont que les dépositaires.<o:p></o:p>

    Je vous engage donc à piller mes oeuvres ici-même, à télécharger de la musique sur des sites gratuits et illégaux, à répandre la pensée des philosophes sans faire acheter leurs livres à votre auditoire, à chanter dans la rue les chansons que vous aurez entendues dans les écouteurs d'essai à la FNAC sans débourser un centime, et ce afin de faire partager gratuitement à un maximum de gens autour de vous les oeuvres de l'esprit que des pirates de l'âme, des vrais pirates ceux-là, veulent vous faire payer.<o:p></o:p>

    603 - De l'enclume à la plume

    Autrefois j'arpentais l'Avenue des Champs-Elysées entre février et avril, ma carriole pleine d'enclumes, en quête d'hypothétiques clients. Je hélais avec hauteur et courtoisie les passants, l'air excessivement guindé. Dépité de ne jamais rien vendre, j'attrapais parfois un touriste japonais ou allemand par le bras en lui montrant ma cargaison avec un regard complice plein de concupiscence. Rien n'y faisait. Mes enclumes n'intéressaient personne. Je changeais de quartier. Sous la Tour Eiffel je faisais du zèle auprès des groupes de visiteurs surpris. En vain. Alors il m'arrivait de pousser jusqu'à la cathédrale Notre-Dame où les touristes étaient plus disposés, pensais-je, à m'acheter un ou deux souvenirs. On me prenait en photo, beaucoup de gens étonnés ou amusés m'interrogeaient sur mon commerce. Et même il arrivait que l'on me chassât du parvis. Mais jamais on ne m'achetait d'enclumes.<o:p></o:p>

    Quatre saisons durant j'ai exercé ce métier ingrat, toujours entre février et avril, les seuls mois où je pouvais espérer gagner mon pain en vendant aux étrangers ces babioles. En quatre saisons de persévérance, je n'ai pas vendu une seule enclume. Las de ce métier de fou, je me suis fait rentier à vie. Depuis je vis légèrement ne me consacrant plus qu'à l'écriture, sans plus de soucis, mon stock d'enclumes au grenier.<o:p></o:p>

    604 - Les feux de mars

    Depuis trois jours mars répandait ses averses sur la ville. Glacées, mortelles. La grêle qui s'abattait contre les carreaux de la vieille fille produisait des bruits de tambour, entrecoupés de silences. L'obscurité à quatorze heure faisait l'effet d'un tombeau dans la pièce. L'horloge dans l'ombre ronronnait, exaspérante. Chose inattendue, cette atmosphère déprimante n'enchantait plus la pauvre âme aigrie. Ces pluies de mars lui rappelèrent de vieilles ambiances dominicales au goût haïssable de pot-au-feu. <o:p></o:p>

    Elle lâcha ses travaux de couture, ouvrit la fenêtre et, le visage fouetté par la bourrasque, défit son affreux chignon... Ses cheveux se délièrent. Ses traits ingrats s'effacèrent un instant sous l'onde qui oignit sa face. <o:p></o:p>

    Alors elle hurla longuement au ciel ses désirs immodestes et profonds de femme inassouvie.

    Lorsqu'elle referma la fenêtre, haletante, fébrile, elle était presque belle avec ses mèches humides, son front ruisselant de haine. Dans sa tête, un bouleversement venait de se produire. Sa vie allait changer, à quarante-trois ans. Elle toisait le portrait de la Sainte-Vierge suspendu au mur trop chaste de sa demeure trop propre, la rage au coeur. Elle fixait avec dégoût le crucifix en bois rapporté d'un pèlerinage crétinisant à Lourdes. Elle cracha même sur son missel aux coins usés par des années de fausse piété.
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    Pour la première fois de sa vie elle se mit à haïr de tout son coeur les bondieuseries qui lui avaient tenu compagnie depuis sa naissance. Le lendemain on la vit dans les rues de la ville subitement ensoleillée, arborant une toilette indécente, en quête d'ivresses lubriques. Bien qu'elle fût laide, elle se fit désirable avec des artifices coûteux, toute de dentelles et de furie libidineuse parée.<o:p></o:p>

    Cependant elle ne séduisit personne, pas même le Diable. Elle se retrouva seule le soir derrière ses petits carreaux, dépitée, plus laide que jamais. Les pluies mêlées de grêle étaient revenues. Elles redoublèrent. A nouveau les bruits de tambour contre les vitres, l'obscurité, la solitude... Le portrait de la Sainte-Vierge la regardait, toujours fixé au mur. Alors une pâle lueur réapparut dans les ténèbres de sa vie. La tendresse mielleuse qui se dégageait de ce regard en deux dimensions, de cette image parfaitement sulpicienne avait fini par reconquérir la dévoyée, décidément sensible aux éclats de pastel d'une religion faite pour les malheureuses de son espèce. <o:p></o:p>

    Touchée, définitivement convaincue, elle se résigna à reprendre le cours ordinaire de sa vie sans relief. Elle se remit à ses travaux de couture au rythme lancinant des tic-tac de la vieille pendule, son missel à portée de main. Les averses de mars martelaient de plus belle les carreaux. <o:p></o:p>

    Entre deux bourrasques la grêle qui fondait sur la vitre formait en s'écoulant de longues, lentes, silencieuses larmes de désespoir.<o:p></o:p>

    605 - Course vélocipède à Conlie

    Conlie, anodine bourgade du fin fond de la Sarthe est heureuse d'accueillir la douzième édition du tour du canton à vélo. Le magasin Super U, sponsor officiel de cette très attendue épreuve cycliste s'est paré pour l'occasion d'atours chatoyants. Les caissières arborent fièrement les couleurs de l'entreprise soutenant l'événement. Le directeur du supermarché a engagé les meilleurs animateurs du département. Le magasin restera exceptionnellement ouvert toute la journée. Réductions folles sur toute la gamme des produits de sport en rayon !<o:p></o:p>

    La fête promet d'être locale, l'ambiance résolument "kermesse".<o:p></o:p>

    C'est le départ ! Les jeunes imbéciles sur leur vélo suent, soufflent, pédalent. Dans le vide le plus total. Enfants de prolétaires, mangeurs de merguez-frites de pères en fils, les coureurs avec un grand U bleu dans le dos foncent vers leur destin minable et pathétique de futurs employés des usines de rillettes du coin. Avec leurs aspirations tranquilles et bovines de clients de magasin Super U, ils ont l'air d'une file d'abrutis juchés sur d'inutiles machines à monter les côtes.<o:p></o:p>

    Passons sur les événements minuscules de cette journée mémorable qu'ont illuminée vingt feux de barbecues...<o:p></o:p>

    La fête a été un succès. Ni les saucisses ni l'accordéon n'ont manqué, n'est-ce pas l'essentiel ?<o:p></o:p>

    Dans leur sénilité future, gagnants et perdants se souviendront avec tremblements de leurs juvéniles exploits cyclistes... <o:p></o:p>

    Souhaitons bien d'autres journées de ce genre à ces passionnés de courses cyclistes.

    Conlinois étriqués, bande d'endimanchés, esprits épais aux moustaches drues, rieurs gras à la réflexion sommaire, hommes aux moeurs plébéiennes, aux goûts douteux, aux femmes vulgaires, aux enfants musculeux, je vous aime comme j'aime les clowns de cirque.
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    Avec une immense, hautaine, authentique pitié d'esthète.<o:p></o:p>

    606 - La vanité du COPYRIGHT

    La folie du COPYRIGHT qui se développe sur le NET est révélatrice de l'état d'esprit mercantile régnant dans le monde des amateurs de lettres. <o:p></o:p>

    Une pléthore de mauvais textes sont jalousement mis sous COPYRIGHT par leurs auteurs soucieux d'exclusivité. Ces auteurs-là se ridiculisent à jouer les écrivains protecteurs de leurs oeuvrettes maladroites... Qui songerait à piller ces montagnes de déjections encombrant le NET ? Mes textes à moi, qui sont bons dans leur majorité, excellents pour quelques-uns d'entre eux, mauvais dans la même proportion, sont totalement libres.<o:p></o:p>

    Le fait de COPYRIGHTER ses textes avec l'excuse que cela ne coûte que quelques euros ne signifie pas pour autant que ce sont de bons textes... Avant de mettre sous COPYRIGHT un texte, encore faut-il qu'il soit digne de cette "distinction"... Ces auteurs ont l'illusion d'être des plumes dignes de ce nom sous prétexte que leurs productions sont sous COPYRIGHT, comme les grands. Ils se donnent l'impression flatteuse que leurs textes sont nécessairement bons, puisque COPYRIGHTéS... Ou pire, ils s'imaginent même que leurs textes deviennent bons comme par magie, par la simple intercession du COPYRIGHT.<o:p></o:p>

    Ce filon exploité par des notaires avisés est d'autant plus prometteur qu'il est basé sur une source intarissable : la vanité humaine.<o:p></o:p>

    607 - L'étincelle humaine

    Elle monte vers les étoiles, descend jusque dans la fosse, suit la feuille au vent, se mêle à la boue des tranchées, aux feuilles des betteraves ou à la bave des limaces, nage en zones inconnues, palpite dans la glace, explose dans des jets pleins d'artifices et d'âpretés.<o:p></o:p>

    Elle est désespérée et monotone, douce et joyeuse, grave et brûlante, légère comme l'eau, aussi vitale que le souffle... C'est une flamme qui réconforte bien des misères, exacerbe les plus sages douleurs, sublime la moindre petite chose, pose n'importe quelle question.<o:p></o:p>

    Fraternelle, rageuse, bruyante ou délicate, elle s'adresse à l'infini, demande des comptes à l'invisible, interroge les hauteurs, s'étonne des profondeurs, donne le vertige au quotidien, rêve de gloire, se permet l'humilité. Futile ou essentielle, solennelle ou malicieuse, elle rit de la mort, croit à la rédemption des êtres, à l'immortalité des âmes, à la vérité des cacahouètes salées. Ou grillées.<o:p></o:p>

    Cette flamme sacrée, universelle, c'est une voix qui de toute éternité s'élève de la Terre.

    Et cette voix triste et éclatante, morne et pittoresque, pitoyable, admirable, fervente, inextinguible, et finalement toujours pathétique, c'est un cri.
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    C'est, de sa naissance à sa mort et pour les siècles des siècles, partout, sans fin, mystérieux, le chant nu de l'Homme.<o:p></o:p>

    608 - L'Art ridicule

    Quand un dévot évoque ses personnages bibliques favoris, il les conçoit nécessairement vêtus de toges impeccables, évoluant en permanence dans une gestuelle hautement symbolique et arborant en toutes circonstances des airs d'une dignité parfaitement caricaturale.<o:p></o:p>

    Imaginez qu'un de nos grands hommes d'Église actuels singe ces statues humaines aux attitudes stéréotypées... Même le plus étriqué des bigots le trouverait ridicule.<o:p></o:p>

    Dans le même ordre d'idées je trouve complètement ridicules les peintures mythologiques, bibliques (et parfois historiques) des musées.<o:p></o:p>

    Ces Diane bien en chair qui vont pieds-nus en pleine forêt avec dans leur dos des carquois d'opérette, ces satyres ricanants qui séduisent des nymphes évanescentes aux yeux systématiquement révulsés, ces pompeux embarquements pour Cythère, ces improbables parties de chasses olympiennes, ces interminables banquets célestes et autres festins éthéréens entre ailés constipés et mortels ravis (qui semblent eux aussi, avec leurs grands airs prétentieux, ne jamais condescendre à aller aux toilettes), ne font-ils pas passer leurs augustes auteurs pour de grands niais à l'imaginaire sclérosé, infantilisé, "imbecillisés" par les mythologues antiques ?<o:p></o:p>

    Ridicules sont les thèmes de ces peintres, de ces compositeurs, de ces écrivains décrivant avec un tel déploiement artistique ces mièvreries académiques... Par delà l'aspect strictement esthétique de ces oeuvres, je me demande comment des grands esprits ont-ils pu peindre avec tant de sérieux des scènes aussi benoîtes...

    Imaginez un seul instant Socrate dans sa baignoire en train de porter à ses lèvres, dans un geste solennel et précis, une large coupe finement ouvragée remplie de poison...
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    Il passerait pour un guignol complètement ringard, comiquement hirsute... Bref, un grand philosophe au poil blanchi absolument pas crédible. L'effet recherché serait raté. Ou plutôt réussi : ce pauvre fou trempant toge et barbe blanches dans une baignoire tout en buvant un breuvage infect inspirerait un immense éclat de rire planétaire, s'il s'exhibait ainsi devant nos actuels reporters... C'est ce même éclat de rire que m'inspirent les thèmes bibliques, mythologiques ou historiques si souvent représentés dans les oeuvres immortelles et rigides de nos musées.<o:p></o:p>

    609 - L'haleine solaire

    Je déteste le soleil épais, pesant, éblouissant des beaux jours. <o:p></o:p>

    Les pluies en mai m'enchantent, étrangement. Un ciel couvert de nuages peut réveiller en moi les ardeurs les plus molles mais les plus authentiques. La vie, la vie poétique, cotonneuse, indolente, je la sens sous l'onde de mai, qu'elle prenne la forme de crachin tiède ou de grand voile humide. Mes humeurs s'affolent avec une exquise lenteur lorsque entrent en scène les particules d'eau qui virevoltent dans les airs, s'immiscent sur les toits, humectent les feuilles. Sur la ville la pluie vernale apporte une fraîcheur aqueuse pleine de l'odeur des champs. L'atmosphère est ralentie, trouble, chargée de réminiscences.<o:p></o:p>

    J'aime ne voir au-dessus de ma tête qu'un immense manteau d'une blancheur uniforme.

    En juin le ciel entièrement couvert me donne une sensation d'éternité, de profondeur, mais aussi d'infinie légèreté. Les aubes de juin sans soleil me ravissent. A la lumière crue et directe de l'été je préfère la clarté douce et diffuse que filtre une barrière de brumes blanches.
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    En juillet je n'espère que l'éclat nivéen d'une lumière d'avril. Certains jours du mois estival la nue ne laisse passer aucun rayon, alors les champs de blé deviennent pâles comme si la Terre était devenue la Lune. <o:p></o:p>

    Août, je le préfère sous un vent doux et serein plutôt qu'embrasé par des tempêtes de lumière. Là, le monde m'apparaît sous son vrai jour : sans les artifices et superficialités communément inspirés par l'astre. <o:p></o:p>

    L'alchimie nuageuse provoque en moi un mystère de bien-être qui m'emporte loin en direction des espaces nébuleux, haut vers l'écume céleste.<o:p></o:p>

    Entre genèse des étoiles et éveil du bourgeon.<o:p></o:p>

    610 - L'iniquité du COPYRIGHT

    L'argent a engendré bien des phénomènes iniques, pervers, infâmes parmi lesquels le COPYRIGHT, véritable religion d'État de notre société matérialiste obsédée par le droit jusque dans les moindres détails de la vie quotidienne, et qui a fini par sacraliser au plus haut point les rapports économiques entre les hommes.

    Afin de "protéger" les auteurs contre l'exploitation de leurs textes, Beaumarchais qui fut à l'origine de cette aberration morale aux allures faussement philanthropiques a initié une révolution intellectuelle qui s'est érigée de plus en plus comme une tyrannie, soutenue par des textes de loi intransigeants. Le mensonge est devenu norme, à tel point que nul ne conteste aujourd'hui la folie intrinsèque du COPYRIGHT.
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    Précisément, le rôle de l'écrivain n'est-il pas d'émettre ses textes afin qu'ils soient "exploités", autrement dit lus, joués, pensés, appréciés ou détestés sans aucune restriction par ses frères humains et indépendamment des contingences matérielles réglant sa vie personnelle ? De quel droit l'auteur imposerait-il au monde ses oeuvres telles qu'ils les a conçues ? Chacun a la liberté inaliénable d'interpréter, d'auto-censurer partiellement ou entièrement, de réécrire mentalement, de reformuler, de corriger, de lire en diagonale et même de lire une ligne sur deux si cela lui chante les écrits d'un auteur. La loi sur les droits d'auteur n'est ni plus ni moins qu'un chantage exercé sur le lectorat par l'auteur, chantage dans lequel il fait intervenir des considérations financières indignes des hauteurs où en général il prétend élever son lectorat à travers sa plume... <o:p></o:p>

    Le rapport entre la protection des écrits d'un auteur et les nécessités domestiques ou même vitales comme le droit de manger à sa faim ne devrait jamais être fait. Cela peut certes sembler cruel et injuste mais la maladie qui frappe n'importe qui sur terre, n'est-elle pas injuste, cruelle ? Pour soigner un seul individu, a-t-on le droit de refuser les soins à des milliers d'autres ? De même un seul individu a-t-il le droit de céder son oeuvre à des milliers de gens socialement privilégiés sous la stricte condition qu'ils le payent pour les idées, les réflexions ou les charmes littéraires contenus dans cette oeuvre, et de la refuser catégoriquement à ceux qui n'ont pas les moyens de l'acheter ? Les droits d'auteur sont une atteinte profonde aux droits du lecteur.<o:p></o:p>

    Que l'auteur exige de pouvoir vivre de sa plume est son choix et sa stricte liberté, mais en aucun cas il ne devrait pour cela interdire aux plus pauvres de ne pas accéder à ses oeuvres. <o:p></o:p>

    "Propriété intellectuelle" : termes parfaitement antinomiques, inconciliables par définition, exprimant des principes complètement opposés... Tout ce qui appartient au domaine intellectuel bien au contraire est entièrement, définitivement, infiniment libre. Libre comme le sont la pensée, l'émotion, l'imaginaire, la poésie, l'amour et le vent. Par quelle incroyable corruption mentale l'esprit humain a-t-il pu se résoudre à mettre la pensée, l'imagination, l'Art, les battements du coeur en cage ?<o:p></o:p>

    L'homme s'est mis dans la tête des barreaux mentaux. La cause ? L'argent. Tout n'est qu'affaire d'argent, rien que d'argent. Où est l'équité dans le fait qu'un auteur soit rétribué selon la quantité d'ouvrages vendus et non pas, plus justement, selon la qualité de ses écrits ? Le critère même de rétribution de l'écrivain porte atteinte à l'esprit de justice. Pour une somme de travail équivalente, tel auteur sera payé cent fois plus qu'un autre. Son mérite ? Il aura su flatter les vils instincts d'un certain lectorat en lui proposant des histoires de fesses, tandis que tel autre auteur inspiré mais plus naïf aura chanté chastement les étoiles. Nulle part ailleurs que dans le domaine des droits d'auteur règne l'arbitraire.<o:p></o:p>

    Prendre en otage l'humanité entière juste pour protéger un auteur sous prétexte de défendre ses "droits" égoïstes est un authentique viol moral contre l'Homme. Ainsi seuls les lecteurs socialement privilégiés auraient le droit moral et légal de jouir des trésors culturels ? L'argent ne devrait jamais intervenir dans ces affaires-là. Au lieu de cela il est le principal facteur autour duquel toutes ces choses sordides et mesquines s'élaborent ! Il est même très souvent la seule justification, l'unique motivation, la première raison... La preuve : des auteurs n'écrivent que pour faire fonctionner le moulin à bénéfices, sans aucune exigence artistique. En admettant que la loi sur les droits d'auteur eût un fondement moral réel, qu'elle fût recevable que le plan intellectuel, alors elle perdrait dans ce contexte-ci tout son sens. Ces droits sont utilisés en ce cas comme un filon à exploiter, non comme une "protection" réelle de l'auteur.<o:p></o:p>

    Autoriser l'accès à l'oeuvre en échange d'argent (correspondant aux droits d'auteur) est une injustice fondamentale qui lèse d'abord et surtout l'humanité avant l'auteur lui-même. L'auteur, lien entre le ciel et la terre, entre les muses et les hommes, entre le sacré et le profane, et parfois plus simplement entre les communautés, devrait s'effacer avec une naturelle humilité qui le grandirait, au lieu de vendre son âme au prix du marché de l'édition. L'écrivain n'a aucun droit sur ses écrits à partir du moment où il accepte de les diffuser. Il ne pourra jamais interdire au lecteur d'interpréter ses écrits comme il l'entend. Le lecteur peut à sa guise déformer dans sa tête, son coeur et son âme les écrits d'un auteur sans que ce dernier ne puisse le lui interdire. Alors de quel droit l'auteur exigerait-il de n'être pas plagié, déformé, copié matériellement puisqu'il est possible de le faire mentalement ? <o:p></o:p>

    Attendons-nous à voir un jour une loi interdisant au lecteur de répéter oralement des phrases lues dans un livre... Aujourd'hui perspective aussi aberrante que de faire payer un droit de respirer l'air qui nous entoure, demain cette absurdité sera peut-être universellement admise au même titre que de nos jours est admise sans contestation la loi sur la "propriété intellectuelle". <o:p></o:p>

    Rappelons-nous toujours que l'esprit est d'essence divine, que la pensée comme l'air n'est la propriété de personne, pas plus que la Lune n'appartient aux astronautes ou que le pape n'a le monopole du soleil qui brille pour tous. <o:p></o:p>

    611 - Torpeur dominicale

    Le père Gaga mon voisin est content : aujourd'hui dimanche 14 mai c'est fête sur les quais du Mans. Exposition de peintures d'amateurs. Les bords de la Sarthe ont été joliment parés pour l'occasion : rubans colorés et fleurs éclatantes illuminent le quartier. Gais, fleuris, ensoleillés, et pour tout dire mortels, les quais n'ont jamais été aussi bien endeuillés de blanc. Des rapins sortis du fin fond de leur province étriquée exposent sans complexe leur caca pictural. Des groupes de crétins au pas alangui s'extasient à voix basse.<o:p></o:p>

    Me mêlant à la détestable assemblée, je décide de suivre le père Gaga dans son expédition de sénile.<o:p></o:p>

    Les poussettes sous le soleil éclatant que précèdent des géniteurs à la flamme amoureuse éteinte finissent par me dégoûter définitivement de l'honnête hyménée, mais ravissent quelques bonnes soeurs tout de noir vêtues.<o:p></o:p>

    Mon héros de voisin au cerveau ramollot, enchanté devant cet étalage interminable de mauvais goût (le quai est long), continue son chemin en réajustant de temps à autre sa casquette.<o:p></o:p>

    En passant à côté d'une croûte infâme, j'ai cru qu'il allait s'étrangler d'admiration. En fait il s'est étonné de la forme de la chaise sur laquelle était assis le "peinturluteur".

    Plus loin une vendeuse de gâteaux-maison lui a cédé un quartier de farine cuite à prix d'ami. Il était très content le père Gaga. Il faut dire qu'ils se connaissent depuis quarante ans tous les deux, étant du même quartier. Une complicité de quarante ans de propos météorologiques les unit. Castor et Pollux peuvent aller se rhabiller !
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    - Ha il fait-y beau aujourd'hui, n'est-ce pas ?<o:p></o:p>

    - Ha ça le Père Gaga pour faire beau, il fait beau, hein !<o:p></o:p>

    Affligé par ces sommets de nullité rassemblés sur ce seul quai, je n'ai pas eu la force de poursuivre jusqu'à son terme ma filature.<o:p></o:p>

    Je suis rentré, j'ai pris mon clavier et me suis confié méchamment à lui.<o:p></o:p>

    Ainsi est née cette pitoyable et édifiante histoire dominicale.<o:p></o:p>

    Que cette lamentable histoire serve de leçon à tous les pères Gaga de la terre.<o:p></o:p>

    612 - Albert Figuetorack

    Avec sa voix extrêmement stridente et ses propos complètement ineptes qu'il débite continuellement et sans raison valable, Albert Figuetorack (nom étrange inspirant d'emblée l'hilarité), déplaît à tous, homme et bêtes. <o:p></o:p>

    Il fait fuir tout le monde sans jamais se rendre compte que sa simple présence est une torture pour n'importe quelle créature sensée ou sensible, tant il importune avec ses incessants, insupportables discours à propos de tout et de rien. Ni les chats ni les chiens ne résistent aux notes suraiguës de son incroyable voix de fausset. Les humains encore moins, ses paroles étant parfaitement vides de sens, dénuées du moindre intérêt. Il ne profère que des insanités, rien que des sottises, des absurdités de toute sorte ou les pires banalités, ce qui est peut-être encore plus intolérable.<o:p></o:p>

    Abruti fini depuis toujours mais tout de même conscient d'avoir une cervelle infirme incapable d'exprimer la moindre chose intelligente, Albert Figuetorack se complaît dans sa situation. Patauger dans la médiocrité la plus totale semble être son idéal de vie. Il ne songe aucunement à tenter de se rattraper de quelque manière que ce soit. Au contraire, il n'aspire qu'à se "perfectionner" dans la nullité.

    Chose curieuse, il a éminemment conscience d'être un sot inouï mais ne s'aperçoit absolument pas que sa voix de flûte déréglée et ses infatigables paroles de sénile furieux agressent toute personne, tout animal à portée de voix. Même lorsqu'il est seul, à tous les moments de la journée il n'arrête pas le moulin à sornettes :
    <o:p></o:p>

    - Ha ! Y va faire du beau temps aujourd'hui, il va t'y faire le beau temps, le soleil qu'y va-t-y pas se laisser ennuager par les bancs ne nuages enblandimanchés de blantitudes anti-rectaliennes car du caca c'est pas blanc hein ? C'est les nuages qui sont-y blancs comme pas du caca de beurre blanc. Y va-t-y faire du beau temps aujourd'hui derrière les nuages blancs que le soleil y veut-y percer par un trou dans le ciel ?<o:p></o:p>

    Et ainsi de suite. A propos du temps qu'il fait mais aussi d'un caillou par terre, d'une touffe d'herbe, d'un courant d'air... A chaque instant, à toute occasion c'est-à-dire mille fois par jour et cela tous les jours de sa vie, Albert Figuetorack manifeste à qui veut l'entendre -et personne ne veut l'entendre pas même le plus fou des hommes- les épuisantes arabesques verbales de son esprit tordu.<o:p></o:p>

    A cinquante ans il n'a jamais connu de femme. Ce qui le rend fou de satisfaction, ivre d'une inexplicable joie... Chômeur à temps complet, parasite des institutions sociales et client-profiteur sans scrupule des oeuvres de bienfaisance de sa ville, il hante à longueur de temps les magasins alimentaires, quand il ne demeure pas devant sa télévision allumée en permanence. <o:p></o:p>

    Le pire dans cette histoire, c'est que je crois qu'Albert Figuetorack est réellement, authentiquement, incompréhensiblement heureux ainsi.<o:p></o:p>

    613 - La passion : le grand malentendu

    La "passion", quête contemporaine vaine, imbécile et aliénante est un filon récent inventé par les marchands de lessive. Ce terme est l'un des plus galvaudés de la langue française. D'autant plus vide de sens qu'il est prononcé dix fois par jour par les sots pour un oui ou pour un non. Passion de la moto, passion des timbres-postes, passion de l'amour... Tous les aspects de la vie quotidienne sont susceptibles d'être mis dans le cadre flatteur de la "passion", uniformisés par cette nouvelle norme de plus en plus stricte, impérieuse. Entrée en vigueur depuis quelques décennies, la passion est le refuge ultime de l'esprit vulgaire.<o:p></o:p>

    Victimes du discours dictatorial, les êtres les plus ordinaires, les plus médiocres, mais surtout certains beaux esprits incapables d'échapper à l'insidieuse oppression s'empressent de clamer à tous vents être nécessairement, totalement, impérativement "passionnés". Comme si ne pas l'être constituait la plus honteuse des tares...<o:p></o:p>

    Pas un pour railler cette mode risible de la "passion" et oser affirmer vouloir demeurer serein, loin des tourments frelatés de la "passion" telle qu'elle est définie, ressentie, espérée par l'ensemble des esprits contaminés. <o:p></o:p>

    La "vraie" passion d'ailleurs n'existe pas. Ou rarement.<o:p></o:p>

    Les professionnels de la publicité ont créé ce phénomène contemporain de la passion. Pour vendre des casseroles, des automobiles ou de la salade verte, ils ont fait pénétrer dans les esprits l'idée saugrenue mais efficace de la passion. La passion est associée à la femme d'une manière assez répandue, et à l'amour beaucoup plus généralement : les meilleurs arguments pour écouler la camelote des grands industriels inoculant leurs mensonges matérialistes à travers les différents organes de presse.<o:p></o:p>

    Tout comme le patriotisme a été sinon initié, du moins récupéré par les marchands de canon pour enrichir une poignée d'abjects empereurs de l'industrie lourde, la "passion" telle qu'elle est admise de nos jours est une forme dégénérée de sentiments élevés (et d'ailleurs assez obscurs à l'origine, étant donné la rareté et le caractère délétère, funeste de la passion véritable), qui fait des millions de victimes consentantes dans la société d'abrutis où nous vivons.<o:p></o:p>

    614 - L'éclat des blés

    Je marchais en direction des blés, le regard instinctivement attiré par l'azur. Juin chauffait la campagne, l'espace était rayonnant. Une colline devant moi rejoignait le ciel. Je la fixai tout en ralentissant légèrement le pas. Soudain un vent emporta mon esprit en direction de hauteurs inconnues. <o:p></o:p>

    Je fis un voyage extraordinaire, debout, pétrifié, les pieds bien posés sur le sol.<o:p></o:p>

    La tête ailleurs, je partis je ne sais où. Tout y brillait d'un éclat mystérieux. Un autre soleil pareil au soleil éclairait ce monde. Et je vis la colline, la même colline qui me faisait face. Mais avec une perception différente. La colline était vivante, je sentais en elle une essence vitale, une respiration intérieure. Elle échangeait des pensées supérieures avec l'azur qui lui aussi semblait imprégné de vie. Très vite je m'aperçus que toutes choses communiquaient avec l'ensemble du monde en se faisant passer entre elles un souffle universel plein de sagesse.<o:p></o:p>

    Les blés à côté de la colline formaient un choeur de millions de voix suaves, chaque tige ayant son chant propre, accordé avec tous les autres. La terre sous ces blés psalmodiait je ne sais quel étrange cantique. Le ciel avait pris un autre sens. Le bleu le définissait et je ne le nommais plus ciel mais le nommais Bleu. Les oiseaux dans les airs prenaient un prix infini. Créatures éternelles, rien ne pouvait les corrompre et leur vol se prolongeait dans des immensités sans fin.<o:p></o:p>

    Tout cela était à la fois tangible et impalpable, présent et invisible, proche et insaisissable.

    Je redescendis aussi vite en moi que j'en étais sorti. Je me retrouvai les pieds toujours bien ancrés sur le sol, me réadaptant à la lumière du soleil habituel, qui me parut terne.
    <o:p></o:p>

    Dubitatif, perplexe et à la fois parfaitement convaincu de la réalité suprême de cette curieuse, inexprimable expérience que je venais de vivre, j'avançai vers le champ de blés comme si je devais poursuivre ma flânerie.<o:p></o:p>

    Poussé par une puissante intuition, je tendis la main vers une gerbe de blés pour la saisir.<o:p></o:p>

    Un éclair illumina ma main et la rendit transparente un bref, très bref instant. Si bref que l'oeil de la mouche l'a déjà oublié et que le soleil en doute encore.<o:p></o:p>

    615 - Funèbres funérailles

    Le cercueil a été choisi noir, très noir. <o:p></o:p>

    Et même fort laid.<o:p></o:p>

    La cérémonie est plombée. Avec une perverse volonté de rendre l'ambiance la plus lourde possible, un grand portrait morbide du défunt pris juste après son trépas a été posé près du cercueil ouvert qui trône dans le salon empesé. Sur la photo comme dans le cercueil, les traits du décédé sont figés dans une grimace affreuse trahissant les indicibles tourments d'un moribond refusant de lâcher prise. On dirait qu'il a inspiré de l'air dans ses poumons en refusant de l'exhaler au moment "d'expirer", comme si à tout prix il s'était accroché à cette vie.<o:p></o:p>

    Une vieille tante aux traits macabres a été conviée. <o:p></o:p>

    Dans l'assemblée qui veille la dépouille planent des respirations phtisiques, des chuchotements graves, des bruits feutrés de vieilles chaises déplacées avec lenteur et dignité. Telles des présences déprimantes, encombrantes et fatales, de gros meubles austères en chêne font écho au cercueil. Silhouettes inquiétantes, de vieux chapeaux et de grands manteaux sombres passent, embaumant l'air d'odeurs âcres.<o:p></o:p>

    Stupeur générale : le cadavre pousse un râle lugubre à glacer les sangs ! Qui se termine par un ridicule gargouillement froid... C'est l'horrible vieille tante qui vient de poser sur le buste du macchabée un lourd, imposant crucifix, expulsant incidemment l'air vicié resté dans ses poumons.<o:p></o:p>

    Pas surprise du tout, l'espèce de fossoyeuse semble avoir l'habitude de ce genre de phénomène naturel. A croire que c'est dans ce but précis qu'elle a posé cet inutile fardeau sur le torse du mort, juste pour le faire "chanter"... Il faut reconnaître que le râle purement mécanique "involontairement" provoqué sur ce corps froid confère un réel prestige à la vieille tante sordide... N'est-ce pas pour ça qu'elle est venue ?<o:p></o:p>

    Les rituels d'usage que l'on a rendu les plus compliqués possibles, intentionnellement lents, parfaitement obsolètes, aussi pompeux qu'inutiles se sont prolongés jusqu'à la cérémonie religieuse, elle-même fort raide.<o:p></o:p>

    Direction le cimetière.<o:p></o:p>

    Pour mieux assombrir le tableau, les éléments s'associent aux événements : une pluie tenace à faire geler les os fait frissonner le cortège. Pour la plus grande satisfaction de la tante à la face de Camarde qui, contrairement aux autres, a prévu un parapluie.<o:p></o:p>

    La mise en terre s'éternise une heure durant sous la pluie. Discours oiseux à n'en plus finir, silences prolongés à répétitions, défilé des témoignages de fausse amitié, regrets hypocrites, hommages de circonstance chantés, versifiés, psalmodiés, caquetés, régurgités...<o:p></o:p>

    Enfin la dernière pelletée de terre est jetée sur le pauvre otage de ces manèges humains qui n'avait rien demandé.<o:p></o:p>

    Retour du cortège vers la demeure du défunt sous la pluie glacée pour y évoquer dans une atmosphère pesante à souhait les événements insignifiants de sa vie qui vient de s'achever avec d'ennuyeux, vains, mortels fastes...<o:p></o:p>

    C'est reparti pour des heures de lamentations stériles et d'interminables, complexes, obscurs rituels posthumes. <o:p></o:p>

    La vieille tante est aux anges.<o:p></o:p>

    616 - Lettre à l'amante envolée

    Christine,

    Aujourd’hui 10 juin 2006, je songe à vous avec fièvre et tendresse, insistance et mélancolie. Souvenir obsédant, vous êtes l’astre chartrain aux charmes blafards qui m’est resté cher, année après année.
    <o:p></o:p>

    Figure douce et violente, amère et suave de mon passé, vous incarnez Christine le trouble de mon âme en proie à ses blancs démons et oniriques éblouissements. Je vous aime toujours Christine. La flamme est la même. Le fruit odieux de vos entrailles chéries n’y a rien changé. Cela dit, je respecterai votre hyménée avec votre compagnon. Mes mots ne violeront pas cette intimité amoureuse et charnelle sur laquelle je n’ai aucun droit. Je sais trop la force du verbe pour en abuser. Moi-même victime de l’infamie d’un indélicat, touché en plein cœur par quelques mots illégitimes, je prends garde à ne pas offenser votre aimé qui pourrait à juste titre se sentir atteint par mes écrits.<o:p></o:p>

    Je placerai donc mon discours sur de chastes, olympiennes hauteurs, là où ordinairement l’homme vulgaire ne dirige jamais le regard. C’est depuis mon nuage idéal que je m’adresse à l’oiseau de grand vol que vous êtes. Ma voix aux échos azuréens rejoint votre aile pleine d’éclat : c’est dans le silence grandiose qui règne au-dessus des nues que je souhaite échanger avec vous des mots immortels, loin des pesanteurs et trivialités terrestres. Que nos voix résonnent, cristallines, dans cet espace éthéréen dédié aux œuvres des âmes supérieures ! <o:p></o:p>

    Laissez-moi vous dire mon Amour pour vous Christine. Amour lyrique, désincarné, quasi angélique. Amour pour un être accessible à mes sommets, un être qui comprend mes feux, aime mes étoiles, un être dont je sais la profondeur de vue, la délicatesse de cœur…<o:p></o:p>

    Par-delà ma simple personne écrivant en ce jour de juin à la chartraine exilée en terre du sud, c’est la Lyre qui parle à la Muse. <o:p></o:p>

    Christine, Christine, vous êtes le lien entre le luth et le Ciel, l’arc lumineux qui me relie à l’essentiel. Vous êtes mon salut poétique. Votre visage sans artifice est un marbre ambigu de grand prix.<o:p></o:p>

    Croisement étrange et fascinant du roc tangible et du divin immatériel, vos traits austères et doux, entre sculpture voluptueuse et stèle mortuaire, sont une merveille de beauté inédite que peint ma plume avec des couleurs graves et crues pour en mieux révéler l’éclat funèbre. <o:p></o:p>

    Cela suffirait déjà à votre humble gloire et à ma satisfaction d’esthète. Seulement, votre âme Christine est une cause qui me tourmente exquisément.<o:p></o:p>

    En vous je ne vois pas qu’une statue de choix, je vois également une lueur sacrée qui m’éclaire et me pénètre, avivant ma propre flamme originelle pour me rendre plus lumineux que je ne le suis.<o:p></o:p>

    En vous je vois un souffle à travers lequel je me reconnais. Vous et moi sommes une commune chandelle et, sur le plan poétique voire spirituel, nous brûlons d’Amour l’un pour l’autre.<o:p></o:p>

    617 - Le yaourt dans tous ses états

    Je hais les promoteurs de yaourts.<o:p></o:p>

    Ils s'ingénient à aromatiser leurs petits pots de "morve de vache" avec les idéaux les plus élevés, détournant toute raison supérieure au profil de ce qui sort du pis des bovidés. Il ne peuvent s'empêcher de convoquer les génies de la Voie Lactée ou je ne sais quels dieux des causes sacrées pour vendre leur lait caillé (qu'il soit nature ou parfumé aux fruits divers).<o:p></o:p>

    Certains en appellent à l'Amour Cosmique, d'autres à quelque mystérieuse fontaine de jouvence, les pires vous jurent par tous les diables du Marketing que si vous ingurgitez leur blanche émulsion, du jour au lendemain vous deviendrez beaux, intelligents, performants, centenaires, et même fortunés... La surenchère en ce domaine semble sans limite. A en croire ces messies du ferment lactique, le moindre pot de yaourt à la fraise est une véritable coupe de sang christique ! Un enjeu essentiel pour votre avenir, votre santé, votre salut sur Terre et dans le Ciel...

    A lui seul le yaourt est un condensé explosif de toutes les attentes matérialistes du monde occidental mais aussi, comble de l'ironie, le porte-parole des prétendues valeurs spirituelles renaissantes... Avalez un pot de yaourt, "à l'intérieur" vous deviendrez aussi purs que le linge des anges baignant dans leur monde de fromage blanc !
    <o:p></o:p>

    "A l'intérieur" : termes pour le moins ambigus qui disent bien ce qu'ils ne veulent pas dire...<o:p></o:p>

    Ils font "du bien à l'intérieur", leurs foutus yaourts... C'est bien là qu'est le problème, dans la façon de dire les choses. Ils font "du bien à l'intérieur", manière subtile de vous embobiner sur un terrain aussi glissant que juteux. Sous un même prétexte on réveille vos fonctions digestives les plus primaires en même temps que les fonctions sacrées de votre esprit, pour le prix modique d'un pot de yaourt à renouveler quotidiennement... Le rôle du yaourt est de vous alléger les intestins, de vous purger "de l'intérieur", de vous donner des ailes, un nouveau teint, un éclat neuf, bref de vous pourvoir d'une âme. La fibre spirituelle est sollicitée grâce aux propriétés spécifiques du fruit contenu dans les petits pots, précisément. Ajoutées aux yaourts, les fibres des fruits sondant vos viscères vous sauveront de la constipation, soyez-en certains ! De l'intestin grêle salutairement secoué, on passe directement au bien-être quasi spirituel du consommateur épanoui. Les deux outrances ainsi subtilement amenées se fondent l'une dans l'autre, comme le blanc sur le blanc, et au fond de son pot l'amateur de lait de ruminant caillé n'y voit que du bleu.<o:p></o:p>

    Maudit soit le petit pot de lait de vache fermenté, hostie du pauvre type, onction du minable, breuvage pieux du mystique intestinal !<o:p></o:p>

    618 - Misanthrope

    Les autres m'indisposent.<o:p></o:p>

    Je ne souffre pas la proximité de mon prochain. J'abhorre ce qui ne me ressemble pas, celui qui ne porte pas le même chapeau que moi, ceux qui ne mangent pas le foin servit dans mon écurie, l'humanité qui ne boit pas à la fontaine sise dans mon petit verger, et en définitive n'aime que moi-même.<o:p></o:p>

    Répondre "Bonjour" à un autre "Bonjour" étant pour moi un authentique supplice matinal, on me traite de mal élevé sous prétexte que je rends la politesse sous forme de hautain silence précédé d'un ou deux puissants crachats en direction de mes agresseurs. Incompris de tous, j'ai fini par adopter le port de gants roses et de dentelles blanches autour du cou accompagnés d'une discrète arrogance au bord des lèvres. J'ai remarqué que cela faisait médire encore plus, avivait des passions funestes à mon endroit...<o:p></o:p>

    Aux foules agitées qui me cherchent des noises avec leurs incompréhensibles allées et venues, aux passants pressés qui me frôlent dans la rue comme si je n'existais pas et dont les visages méconnus ne m'inspirent que méfiance, haine, dégoût, je préfère la douce, calme compagnie des tombes. Elles au moins me foutent la paix. Je fuis tout ce qui s'apparente à un bipède en mouvement. Je me venge des vivants en allant régulièrement narguer les morts dans les cimetières. <o:p></o:p>

    Lors de mes visites aux hôtes bien éduqués des nécropoles, qui pas une fois n'ont eu l'outrecuidance de m'importuner, je puis cracher sans entrave sur tous les Dupont que je croise. Décalcifiés depuis des lustres, débarrassés de tout orgueil mal placé, couverts de dalles, de stèles et de terre grasse, eux ne trouvent rien à redire à mes jets de salive.<o:p></o:p>

    J'en ai conclu que dans ce monde les hommes les plus fréquentables sont ceux qui se trouvent à six pieds sous mes semelles.<o:p></o:p>

    619 - Notre belle jeunesse

    Jeunesse, tu m'inspires de profonds remous intestinaux.<o:p></o:p>

    Imbécile, morveuse, crétine jeunesse de vingt ans, piètre, abrutie, écervelée jeunesse des préservatifs, des téléphones portables, des blogs illisibles, pauvre, vaine, misérable jeunesse issue des discothèques du samedi soir, sotte, creuse, insignifiante jeunesse des radios musicales débilo-énergisantes, l'idée même de ton ombre qui me frôle dans la rue provoque en moi des réflexes de haine non dissimulée.

    Hors de ma vue, petit produit humain rigoureusement formaté à la pensée de synthèse ! Dégage de mon horizon, veau hormoné accumulant vingt années de pures inepties sous ta casquette fluo de nabot dégénéré dûment piercé !
    <o:p></o:p>

    Blanc-bec de vingt piges, poulet industriel bagué de l'arcade sourcilière au prépuce, ne t'avise pas de me manquer de respect : j'ai le double de ton âge et dix fois le poids de ta cervelle atrophiée.<o:p></o:p>

    620 - L'archevêque est généreux avec sa bonne

    A la mort de sa vieille servante l'archevêque avait engagé une jeune bonne aux appas imposants. Elle astiquait les parquets à quatre pattes, offrant au vieil eunuque libidineux le spectacle immodeste de sa gorge palpitante. Devant ce tableau charmant le chaste animal se sentit une nouvelle vigueur. <o:p></o:p>

    Il sortit sa crosse, qui était assez raide, et la montra sans façon à sa servante qui s'étonna de ne la voir point courbée : <o:p></o:p>

    - Monseigneur, quel sacré gros bâton-à-couilles vous possédez ! Mais comme c'est étrange, il ne ressemble en rien à votre crosse de parade que vous exhibez à l'église lors de vos processions, moi qui pensais que les archevêques avaient en eux tout de courbé, de recroquevillé...<o:p></o:p>

     - Détrompez-vous ma bonne Suzon, ce bâton-là est droit comme la justice divine. Tenez, je vais vous montrer dans la pratique comme il est bien tendu. Approchez mon enfant. Je vais vous bénir au plus profond de vos entrailles, vous m'en direz des nouvelles.<o:p></o:p>

    - Ho ! Monsieur le curé, comme vous y allez ! En vérité il est bien vertical votre saucisson-à-burnes, c'est exact. Je le sens bien qui me le prouve au plus profond de mes tripes Monsieur le curé.<o:p></o:p>

    - Je ne suis pas curé, je suis archevêque.<o:p></o:p>

     - C'est exact Monseigneur, pardonnez-moi. C'est qu'il faut vous dire que si vous portez la mitre comme un authentique archevêque écouillé que vous êtes, il n'en demeure pas moins vrai que vous enfilez comme un sacré nom de Dieu de bougre de curé couillu.<o:p></o:p>

     - Ha ! ma bonne Suzon, j'enfile comme je peux ! A propos, avez-vous bien astiqué la salle de réception du presbytère ce matin ? C'est que j'ai un rendez-vous avec un émissaire du Vatican tantôt.<o:p></o:p>

    - Monseigneur, la salle de réception est propre comme un sou neuf. Dois-je y ajouter des fleurs ?<o:p></o:p>

    - Excellente idée ! Sentez-vous bien ma crosse au fond de votre tronc mon enfant ?<o:p></o:p>

    - Fort bien Monsieur le curé. Pardon ! Monseigneur... Vous pouvez me remplir la corbeille à présent.<o:p></o:p>

    - Allons-y pour les bonnes oeuvres donc. Je vais bien vous combler de dons par la fente. Au fait je paye en foutreuse monnaie.<o:p></o:p>

    - Pas de problème Monsieur le curé. En liquide ?<o:p></o:p>

    - Monseigneur vous dis-je ! Pas en liquide. En purée.<o:p></o:p>

    - Pardon, c'est plus fort que moi Monseigneur. Vous enfilez vraiment comme un curé vous savez... <o:p></o:p>

    Quelques heures après avoir fait oeuvre de charité envers sa bonne, l'Archevêque reçut avec une grande piété l'émissaire du Vatican. Aux dernières nouvelles l'infortunée Suzon a dû prendre du repos quelque temps afin de soigner une méchante vérole. <o:p></o:p>

    621 - Sainte bière

    Dans les bars j'aime de temps en temps aller faire pénitence, abstinence, et aussi renouveler mes voeux de chasteté. <o:p></o:p>

    La bière blonde est mon onction favorite.<o:p></o:p>

    Le breuvage doré me fait pousser des ailes blanches. Quand je bois et que je suis noir, j'ai des anges qui me pissent dans la tête. Dès que je me noie le gosier dans l'urée d'étoiles, je deviens capitaine du zinc. Alors je mets la barre à l'envers et voue le bar à l'enfer. Enfin je veux dire je fous le bar à l'envers et mets la barre aux fers, ou plutôt je mets le feu au verre et vouvoie tout le bar... Enfin je ne sais plus, mais ce qui est sûr c'est que je trinque aux bienheureux terriens qui ont atterris avec moi sur la planète BIERE.<o:p></o:p>

    Dans ce monde parfait plein d'écume exhalant le houblon, on balbutie en choeur, on prend le serveur à parti pour des histoires de mirages, on chante faux mais avec sincérité, on radote le plus sérieusement du monde sur la politique, les femmes, les hirondelles et les bulldozers. <o:p></o:p>

    Sainte bière, reine des flots sous pression, coulez pour nous qui n'avons que les dimanches pour vous rendre grâces, ayez pitié des assoiffés qui bavent d'envie en nous lorgnant aux terrasses des bars sans oser jamais en franchir le seuil. Mais soyez impitoyable envers les pauvres gens hydrophiles qui passent, indifférents à nos nuages sacrés ! Refusez-leur vos bienfaits. Votre or liquide les rendrait mauvais. Qu'ils meurent sans jamais recevoir une once de votre feu exquis dans la gorge ! Leur bière à eux, celle de leur dernière heure, elle sera faite de quatre planches. Notre salut à nous est au fond des chopes, nous le savons. Eux l'ignorent. Qui viendra faire tinter les verres devant leur tombe triste où l'eau ruissellera sans bulle, sans mousse, sans nulle amertume ?<o:p></o:p>

    Nous les pisseurs heureux, nous voyons jaillir des astres dans le regard des chiens, nous conversons en olympiennes compagnies, nous prenons les quincailliers pour des enfants de rois et les caissières du coin pour des bohémiennes. Avec un verre de plus, certains d'entre nous accèdent même au panthéon des bégayeurs et "hoqueteurs". Ils ont parfois des traits de génie.

    Ils chantent toujours aussi faux mais de leurs verres à pied de temps à autre sortent des vers en douze pieds, des rossignols de mots, des bulles de savant, des arcs-en-ciel éthyliques et de rondes étincelles qui dans leurs songes pleins de vertiges iront enrichir des constellations imaginaires.
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    622 - Tristes médiocres

    Gens de peu, esprits de rien, âmes pauvres, têtes vides, coeurs indigents, médiocres de toutes conditions, abrutis de toutes origines, tristes gens qui ne pensez pas plus haut que vos fronts mous, je vous destine ces mots durs. <o:p></o:p>

    Vous les méritez.<o:p></o:p>

    Je vous envoie à la face ces éclats de vérité, vous les ternes mortels qui n'avez jamais connu autre chose de mieux dans l'existence que vos petits dimanches aux bistrots, de plus sublime que vos fraternités syndicales, de plus brillant que vos horizons terrestres entre juillet et août. La mort vous inspire des réflexions d'épiciers, des sentiments de carreleurs, des terreurs de petits épargnants : vous ne vous souciez que de la validité de votre assurance-vie, des termes de votre contrat-obsèques, de la qualité matérielle de votre stèle bon-marché...<o:p></o:p>

    L'apothéose de votre vie se résume aux mensualités d'une longue, placide, stérile retraite.

    Vos plus chères aspirations de ruminants bipèdes se bornent à l'achat de quatre petits murs de parpaings entourés d'une petite haie taillée au millimètre avec un petit garage au sous-sol pour y ranger votre petite voiture. Un petit carré de bonheur pré-fabriqué que vantent vos prospectus (que vous lisez scrupuleusement !) afin d'y passer votre petite vie de petits vieux frileux. Votre littérature, c'est le magasin alimentaire de la zone industrielle à deux pas de vos quatre petits murs de parpaings-bonheur... Vos espérances de cotisants à la Sécurité Sociale, c'est de gagner au LOTO.
    <o:p></o:p>

    Vos autres idéaux, plus accessibles, c'est la niche du chien, la canne à pêche, l'héritage...

    La mort ne vous tourmente nullement : vous avez toutes les assurances qu'il faut pour ne plus vous en soucier... Vous voilà rassurés puisque vous avez pris vos précautions en cas de "malheur". La vie ne vous émerveille pas plus que ça : vous avez bien mieux que les forêts et les étoiles étant donné que vous êtes abonnés à la télévision par satellite... Votre paradis défile à heures fixes sur votre écran, aussi plat que votre existence.
    <o:p></o:p>

    Anonymes endormis, habitants sclérosés des villes sans nom, vous qui êtes satisfaits de vos destins indolores, vous les insignifiants, vous les citoyens sans histoire ni imagination, vous les automobilistes convaincus, vous les paresseux du coeur et de l'esprit, que ces mots salutaires ne vous épargnent surtout pas.<o:p></o:p>

    Qu'ils vous percutent en plein "bonheur" temporel où vous pataugez depuis votre naissance afin que la prochaine rayure sur votre voiture ou l'anniversaire de votre caniche deviennent des causes secondaires et que l'essentiel ne passe plus par le fil de votre antenne de télévision ou par les compartiments de votre réfrigérateur mais par les fibres éthériques de votre être définitivement éveillé. <o:p></o:p>

    En attendant ce jour je continue, inlassable, de vous répéter ces mots. <o:p></o:p>

    Vous qui avez lu ce texte avec irritation, vous qui n'avez pas supporté de me lire, vous qui vous êtes sentis agressés à travers ma plume : vous êtes précisément les tristes médiocres qu'avec férocité je viens de railler. <o:p></o:p>

    623 - L'éclat de la Vertu

    Je vous salue Vertu, pleine de hauteurs et d'âpretés. Je vous rends grâces chère, très chère Vertu douce comme une prière, aussi tranchante qu'un silex. Votre baiser est une plume, un duvet, un velours à la dureté d'un crucifix. <o:p></o:p>

    Hideuse vous êtes avec votre bosse sur le dos de la sainte, avec votre grimace ingrate sur le visage de la jeune fille, avec vos cheveux pouilleux sur le pauvre ! Mais belle vous devenez lorsque cette difformité, cette laideur, cette crasse s'évanouissent en votre nom...<o:p></o:p>

    Le vice devant vous a des allures de bête civilisée. Il est hautain, a des moeurs mondaines et ses mensonges sont exquisément sophistiqués. Le vice est intelligent, séduisant, plein d'artifices. Ses affronts sont subtils, élégants, spirituels... Il fait le pauvre, joue à l'humilité, se prend pour un philosophe... Le fourbe porte souvent mitres, fait la morale aux riches, défend la veuve et l'orphelin, donne l'exemple. Il se fait appeler "Monsieur le curé", "Professeur", ou bien "Sa Sainteté", "Son Altesse", "Monsieur le juge", "Madame le Député", "Maître", "Seigneur", "bienfaiteur" ou tout simplement "Monsieur"...<o:p></o:p>

    Le vice sait se cacher sous toutes les étoffes, de la plus grossière à la plus flatteuse. Il s'est vautré dans des fauteuils séculaires.<o:p></o:p>

    Vertu, toujours vous êtes restée debout. Sans fard, digne et intransigeante. L'innocence est votre force. Et la souffrance, la silencieuse, la patiente, la rédemptrice souffrance, votre gloire.<o:p></o:p>

    Vertu j'aime votre folie très juste : vous ne craignez pas de conspuer le pauvre, de bénir le riche ou de pardonner à l'assassin quand il le faut. Insensible aux apparences, étrangère aux modes, loin des moeurs du siècle, fidèle à votre seule loi, vous êtes l'alliée de la Vérité. Ce qui est au fond des coeurs vous importe, non ce qui est sur les têtes ou dans les mains. Aucun chapeau, nulle caresse ne vous touche. L'âme seule et ses secrets, voilà ce que vous voyez.<o:p></o:p>

    Mes contemporains vous crachent souvent à la face de peur d'être ridicule de ne pas le faire car en vérité ils ont honte de vous : vous êtes vierge, chaste, honnête, bonne, humble, sage, simple.<o:p></o:p>

    Ils vous crachent au visage. Moi je vous baise les pieds.<o:p></o:p>

    624 - Chute d'un Titan

    Ordinairement je ne m'intéresse nullement au jeu de balle au pied (football pour les puristes).<o:p></o:p>

    Le match du Mondial (du 9 juillet 2006) fut passionnant cependant. Des milliards d'humains regardaient dans la même direction : nos onze étoiles nationales projetées en orbite mythique devenaient quasi cosmiques. Parties pour la légende. <o:p></o:p>

    Ou la désintégration en plein vol.<o:p></o:p>

    Finalement la chute des héros français, rendue encore plus pathétique par les mines abattues et les pleurs rentrés, c'était encore plus beau que la gloire ! Jusqu'au dernier moment le suspens a fait frémir des milliards de gens. Magnifique spectacle planétaire ! La fin fut cruelle, tragique, poignante : nos demi-dieux sont tombés. <o:p></o:p>

    Voilà précisément ce qui a donné tout son éclat au match.<o:p></o:p>

    Sans cette chute vertigineuse, sans le coup de tête félon de Zidane, sans ces larmes finales mêlées à la sueur, quel intérêt aurait eu cette partie de jeux du cirque moderne avec Chirac trônant comme un empereur romain au-dessus de l'arène ? Il fallait que les onze astres s'éteignent avec fracas pour que le chaos soit beau.<o:p></o:p>

    Zidane sorti du terrain au dernier moment, quelle surprise ! L'apothéose, inattendue, théâtrale, terrible, fut à la hauteur de l'évènement. Les coeurs ont cogné, pleins de sanglots, les têtes ont tourné, pleines de rêves brisés... En un seul coup de ballon les onze sont passés du statut de héros à celui de perdants planétaires.

    C'est ça qui était magnifique.
    <o:p></o:p>

    625 - Etés meurtriers

    Le feu était dans le ciel.<o:p></o:p>

    Jamais le soleil n’avait été si oppressant, écrasant hommes et bêtes, campagnes et cités. L’astre avait des ardeurs inhabituelles. Ses rayons agressaient, brûlaient, blessaient.

    Tout mourait à petit feu sous son éclat.
    <o:p></o:p>

    Effrayante saison de fin du monde ! Hélios se faisait vieux... Il approchait les dix milliards d’années. L’Homme, toujours là, n'ignorait rien des mystères de la matière, ni de sa destinée. Les temps bibliques mille fois révolus, il était devenu sage, savant, puissant. Mais non invulnérable aux effets fatals de l’étoile qui s’embrasait.

    Les temps des temps étaient finissants. La fin des fins arrivait. Le ciel semblait sombrer dans un abîme sans nom. Pour parler de cette chose prodigieuse, des mots jamais émis furent prononcés, qui firent frémir l'Homme... Bien que devenu fabuleux et pénétré de sciences, l'Homme s'émouvait encore : la peur, l'irrationnel l'étreignaient comme un enfant. La fin des fins... L'effondrement du ciel et de la terre !
    <o:p></o:p>

    La Création vivait le premier été signant la lente agonie du brasier perpétuel, les prémices perceptibles de son extinction future qui devait avoir lieu vingt millions d’années plus tard.<o:p></o:p>

    Vingt millions d’autres étés à venir, de plus en plus chauds, de plus en plus longs, puis permanents, formeraient l’inéluctable processus qui réduirait la planète à un amas de cendres incandescentes.<o:p></o:p>

    La grande et complexe mécanique cosmique des éléments qui s’ébranlent sous un feu ultime pour renaître à la prochaine aube sidérale était engagée, implacable.<o:p></o:p>

    626 - Les mystères de Marie-Vertu

    Marie-Vertu, de son vrai nom Angeline Latour, était une vieille putain décatie et vérolée qui vivait dans sa modeste maison en plein coeur du village. Particulièrement corrompue par ses vices, elle arborait souvent avec fierté une casserole en aluminium sur la tête.<o:p></o:p>

    Très intelligente, très méchante et très laide, elle était également légèrement fêlée du ciboulot.<o:p></o:p>

    Marie-Vertu s'endimanchait pour un oui, mais jamais pour un non. Ses rares clients se comptaient sur les doigts d'une seule main : Monsieur le maire, Monsieur le curé et Monsieur le juge. Parfois le député, l'archevêque et le Directeur du Cabinet Ministériel passaient en coup de vent chez l'affreuse prostituée. On ignore pourquoi.<o:p></o:p>

    La vieillarde indécente aimait beaucoup passer des journées entières à trier des cailloux selon leurs formes et leurs couleurs car, comme nous venons de le préciser, bien qu'avantagée par un esprit fort vif, celui-ci cependant souffrait de quelque travers héréditaire.<o:p></o:p>

    Etait-elle chrétienne, ex-boxeuse, adepte modérée de la pêche à la ligne ? A part ses fréquentations flatteuses, on ne savait de cette vieille putain ridée que ce que racontaient les colporteurs de ragots. Ce qu'elle faisait sous son toit, nul ne pouvait en dire quoi que ce soit. On ne la voyait que dans sa cour pleine de vieux cageots disloqués en train de trier des tonnes de cailloux ou recevant les notables évoqués plus haut.<o:p></o:p>

    La nuit au travers de ses petits carreaux il n'y avait rien à voir étant donné que tout était éteint. La cheminée laissait échapper une fumée toute banale. Son courrier se limitait à des offres publicitaires tout ce qu'il y a de plus ordinaire. Alors ? Alors Marie-Vertu cachait bien son jeu, tout simplement.<o:p></o:p>

    Par un frais soir de juin le Directeur du Cabinet Ministériel s'attarda chez elle au lieu de passer en coup de vent comme à son habitude. On le vit prendre congé de son hôte juste avant 23 heures, un foulard ocre au cou, un panier de vieux journaux à la main, un chapeau de papier sur la tête.<o:p></o:p>

    Le lendemain, il fut décidé d'augmenter considérablement les impôts locaux dans tout le canton.<o:p></o:p>

    627 - L'habit du mort

    L'homme est mort. <o:p></o:p>

    Pas rasé, bien coiffé, les chaussures du dimanche aux pieds, la moue hautaine, sa dépouille exhalant le formol, étendu dans son lit d'apparat, il attend.<o:p></o:p>

    On rajuste son col, on le salue, lui adresse des paroles solennelles. Depuis douze heures, il appartient au peuple mystérieux et intemporel des défunts. Depuis douze heures il est respectable, plein de dignité, définitivement constipé. <o:p></o:p>

    On fait semblant de ne pas voir la bosse sous ses mains croisées. L'appendice phallique figé dans son expression la plus éloquente, le mort émeut. De prudes veilleuses finissent par se dévouer pour dissimuler l'objet trop vaillant : un voile pieux est déposé sur la forme importune. <o:p></o:p>

    La turgescence profane n'ayant pas disparu pour autant, une vieille fille décatie se propose de couvrir le corps du trépassé d'un épais et luxueux linceul. Mais décidément indécent avec sa trompe rebelle, le cadavre est finalement conduit jusqu'à sa couche de marbre en grande tenue : paré de son suaire de dernière minute. On scelle le cercueil avec cette ample feuille de vigne cousue d'or et de soie.

    Au retour des funérailles, la vieille fille âgée émet des réflexions déplacées à propos des joues de l'inhumé, loin d'être glabres. Une pleureuse soucieuse d'économie est contrariée par la perte d'un tissu fait de fibres précieuses, emporté dans la tombe avec son hôte. Une âme dévote fait une remarque admirative au sujet des moeurs chrétiennes de celui que l'on vient de mettre en terre.

    Mais nul n'ose faire la moindre allusion à la bosse post mortem ayant gonflé immodestement sa braguette.
    <o:p></o:p>

    628 - La Dame Blanche

    Je l'ai vue cette fameuse passagère nocturne... <o:p></o:p>

    Comme beaucoup de gens, j'ai rencontré la Dame Blanche. C'était par une nuit d'été, alors que je me promenais seul dans la forêt de Mézières-sous-Lavardin dans la Sarthe. Elle me faisait face, le regard figé, immensément triste au milieu du chemin.<o:p></o:p>

    A y regarder de plus près le spectre était d'ailleurs blafard, gris, sombre plutôt que blanc... Je lui adressai la parole, effrayé par ma propre voix résonnant au coeur de la forêt, en pleine nuit, seul face à cette apparition lugubre...<o:p></o:p>

    - "Vous êtes la Dame Blanche, n'est-ce pas ?"<o:p></o:p>

    Silence.

    Je répétai ma question.
    <o:p></o:p>

    - "Vous êtes la Dame Blanche, oui ou non ?"<o:p></o:p>

    Toujours pas de réponse. Et cet étrange, oppressant silence qui remplissait la nuit... Je n'insistai pas. Il émanait de l'intruse un malaise infini qui rendait l'ambiance très inquiétante... Je lui fis un signe amical de la main tout en me forçant à sourire.<o:p></o:p>

    Sortant lentement de sa torpeur, elle répondit à mon geste. Alors m'apparurent des dents terrifiantes ! Un sourire de morte à faire claquer les os. Un sourire venu du plus profond de l'inconnu, un sourire vertigineux, maléfique et très doux à la fois qui voulait dire "Je suis la Tristesse, je suis la Douleur, je suis le Malheur, je suis le Désespoir".<o:p></o:p>

    Je me rendis compte qu'il n'y avait pas de prunelles dans son regard. En fait elle n'avait pas de regard. Les orbites vides, elle n'avait que deux trous noirs en guise d'yeux, et peu à peu c'est un crâne que je vis à la place de ce que je croyais être un visage aux traits indéfinis. Un crâne qui me souriait dans les ténèbres. La Dame Blanche s'approcha de moi. Le crâne plein de détresse m'adressa la parole. Je m'attendis à entendre une voix sépulcrale, horrible. Dans un sanglot très humain, familier et féminin ressemblant beaucoup à une voix d'adolescent, la morte me supplia de l'aider à rejoindre le monde supérieur. Accablée de tourments, elle errait sans but dans les lieux obscurs où l'avait jetée le sort. Incapable de rejoindre par elle-même les hauteurs désirées, elle demandait du secours aux vivants.<o:p></o:p>

    - Que puis-je faire pour vous, lui demandai-je ?<o:p></o:p>

    Toujours de sa voix d'enfant : <o:p></o:p>

    - Le mal que j'ai commis sur terre, répare-le car je suis prisonnière de mes actes, mes pensées négatives me submergent. Moi je ne peux plus, je suis morte et condamnée à errer jusqu'à ce qu'une âme charitable me sorte de là. Va, sois courageux, écoute-bien ce que je vais te demander de faire...<o:p></o:p>

    Je lui coupai aussitôt la parole :<o:p></o:p>

    - Je ne suis pas une âme charitable. Débrouillez-vous et foutez-moi la paix ! Chacun ses problèmes, assumez les vôtres, moi je ne vous dois rien. Je n'ai pas envie de jouer à la bonniche, pas même pour un fantôme. Personne ne pourra jamais rien faire à votre place là où vous êtes. Ne comptez que sur vous-même pour trouver la porte de sortie, je ne peux rien pour vous, dégagez ! Je ne suis pas une âme charitable vous dis-je...<o:p></o:p>

    J'espérais ainsi me débarrasser de l'importune tout en la faisant réagir sur son sort. Quelques mots expéditifs, durs mais salutaires : le seul service que je pusse lui rendre.<o:p></o:p>

    Encore plus attristée, la Dame Blanche se retira en silence avant de disparaître dans l'obscurité. <o:p></o:p>

    Inexplicablement, pendant trois jours j'entendis ses soupirs désespérés autour de moi, comme si j'étais témoin d'une lutte intérieure de la Dame Blanche avec elle-même, une lutte âpre, ultime, dantesque. Trois jours d'intenses échos en moi. Puis plus rien.<o:p></o:p>

    J'appris peu de temps après sous forme de songe étonnamment réaliste qu'une âme généreuse avait acquiescé à la demande de la pleureuse, la propulsant définitivement vers la Lumière.<o:p></o:p>

    Cette âme, c'était moi.<o:p></o:p>

    629 - Moi, Raphaël...

    Je m'appelle Raphaël, j'ai peur du noir, je suis plein de panache, j'habite le Mans.<o:p></o:p>

    Il paraît que je suis invivable mais je ne le crois pas. J'ai des amis, beaucoup d'amis. En fait c'est faux, je n'ai pas d'amis du tout vu que je n'ai que des ennemis. Peu de gens savent m'apprécier. Et ceux qui m'apprécient habitent loin du Mans... A Marseille, sur l'île de Ré ou à Istanbul. Ce qui n'est pas plus mal.<o:p></o:p>

    Je m'appelle Raphaël mais je préfère qu'on ne m'appelle pas autrement. Je suis humble, mon ego est peu développé, j'aime beaucoup TF1. Je suis très sociable surtout envers mes gros connards de voisins, mon abruti d'épicier qui me dit toujours "bonjour" et ce crétin de postier qui se trompe de boîtes aux lettres !<o:p></o:p>

    Je suis très attentionné à l'égard de mes semblables d'une manière générale. Je ne les raille jamais étant donné que, je le répète, je suis sociable. Le boucher-charcutier est mon meilleur ami. Sensible, raffiné, pas moustachu du tout, efféminé et amateur de grande littérature, végétarien convaincu, mon boucher-charcutier est un être d'exception. Nous parlons souvent philosophie et peinture ensemble.

    Sa femme quant à elle est plutôt versée dans les activités horticoles. Je lui fais lire des livres en latin et admirer les arts chinois.
    <o:p></o:p>

    Je m'appelle Raphaël, je suis manceau comme je viens de le dire, j'aime énormément les chiens, les bons gros toutous qui me lèchent le visage avec leur bonne grosse langue baveuse (langues canines qui ne me dégoûtent pas du tout), les bons gros toutous qui puent et qui aboient sans arrêt en plein dans mes zoreilles. J'aime beaucoup les enfants aussi. Les gentils petits enfants qui chient dans leur froc et braillent tout le temps dans mes petites noreilles très réceptives à ce genre de concert si doux... <o:p></o:p>

    Je n'ai jamais eu le désir de foutre une balle dans le crâne d'un gros toutou qui vient me lécher la main, jamais, je le jure sur la tête de mes chats. J'aime trop les gros chiens baveux. Surtout les méchants et aussi les qui puent fort le chien.<o:p></o:p>

    Les enfants, je les préfère petits, avec des couches qui se remplissent de merde au moment des repas. C'est très appétissant les petits enfants merdeux. Plus tard à quatre ans, qu'ils sont mignons ces petits quand en hiver ils ont de la morve au nez qui coule au-dessus des plats chauds sur la table familiale des honnêtes citoyens où je suis invité (on m'invite souvent dans les familles normales, ordinaires, tant je suis apprécié des gens moyens) !<o:p></o:p>

    Vraiment, les chiens et les mômes, quel pied !<o:p></o:p>

    Les femmes sont ma plus estimable compagnie, surtout les laides. Elles ont du coeur, celles à qui je joue de ma lyre grinçante ! Je puis déverser sur ces oiseaux sans éclat ma plus aimable musique ! Servir la cause perverse des esthètes de mon espèce est leur plus glorieuse revanche de laides... Les belles aiment moins se faire railler, aussi dois-je être encore plus odieux envers ces créatures qui finissent toujours par pleurer comme dans les bons films au cinéma où à la fin c'est le héros qui gagne pas. <o:p></o:p>

    Je m'appelle Raphaël, j'habite le Mans, les gros chiens sont mes meilleurs amis à quatre pattes, j'adore les enfants, je dîne souvent chez les gens sans histoire, le travail est ma religion et finalement j'aspire à devenir un anonyme, irréductible, définitif Monsieur Dupont.<o:p></o:p>

    630 - Lettre à Chirac

    Monsieur le Président de la République,<o:p></o:p>

    Citoyen éveillé et responsable de ce pays riche, puissant et influent que vous gouvernez, et par-delà ma simple citoyenneté française, âme consciente des tristes réalités accablant une grande partie de la planète loin de nos frontières préservées, je m'adresse à l'homme de pouvoir que vous êtes. <o:p></o:p>

    En vertu de mon droit inaliénable (et de mon devoir de citoyen éclairé) d'exercer liberté d'expression, énergie et intelligence aux services du bien public, du progrès social et humain, de la fraternité et de la justice universelles -valeurs suprêmes dont la France républicaine s'enorgueillit traditionnellement de manière très officielle lors de cérémonies magnifiques et coûteuses-, je vous rappelle simplement que l'on meurt encore de misère en 2006 dans ce monde censé être réglé par un humanisme occidental dominant, cher aux dirigeants des nations les plus nanties. <o:p></o:p>

    Humanisme pompeusement revendiqué par une poignée de pays s'appropriant d'autorité la presque totalité des richesses du globe pour les gaspiller à des fins de confort et de bien-être dont les excès indécents sont devenus la norme, même chez les plus pauvres de leurs chômeurs. Pays prétendument civilisés, exemplaires dont fait partie la France. Je constate que le cynisme, Monsieur le Président, est toujours du côté des plus forts qui ont l'immense avantage de pouvoir manger même quand ils n'ont pas faim, d'emmener leurs chiens chez le vétérinaire au moindre aboiement de travers, de s'offusquer que leur avion décolle avec un quart d'heure de retard... <o:p></o:p>

    Solidarité, altruisme, partage, justice : vains mots dont use et abuse notre république plus soucieuse de lustrer sa façade à coup de défilés militaires dispendieux et d'augmenter le niveau de vie de ses habitants toujours plus avides de confort, de vacances à la mer, de nouvelles chaînes de télévision, de matchs de football que de se serrer nationalement la ceinture avec héroïsme et pédagogie afin de mettre en pratique les valeurs les plus fondamentales qu'elle prétend défendre. <o:p></o:p>

    Partager les richesses Monsieur le Président, que dis-je partager, simplement ôter aux gavés que nous sommes une petite partie du surplus qui nous asphyxie afin d'en faire profiter les damnés qui n'ont pas eu l'heur de naître entre nos frontières dorées, partager les richesses disais-je, est-ce un objectif si inatteignable, si révolutionnaire, si impopulaire que cela dans un monde où, pour prendre un exemple étranger qui cette fois n'offensera pas votre fibre civique, il y a quarante ans un citoyen américain marchait sur la Lune au prix faramineux de millions de dollars pour chaque pas effectué, compte tenu des dépenses pharaoniques qu'exigea un tel programme spatial ? <o:p></o:p>

    Est-ce donc plus simple de faire sortir de nos usines républicaines canons, bombes et autres ingénieuses inventions martiales à la pointe de la technologie afin de répandre souffrances, misères, destructions pour des raisons qui Monsieur le Président, curieusement vous apparaissent toujours excellentes, pourvu que ces engins si utiles au bien de l'humanité soient vendus aux belligérants à des prix hautement patriotiques ? <o:p></o:p>

    Est-ce si insurmontable que ça de distribuer équitablement ces richesses qui nous étouffent, tellement encombrantes qu'elles débordent de nos poubelles ? Je ne parle pas politique ni grandes et complexes affaires économiques ici. Il est juste question de bon sens, de calcul basique, d'humanité élémentaire accessible même au plus borné des esprits. Pas de sentiments ni d'idéal, uniquement une réflexion froide, raisonnée, détachée, sommaire, confondante de simplicité : d'un côté on meurt d'excès, de l'autre on meurt de carences dans un monde où techniquement, matériellement il est possible de subvenir aux besoins vitaux de chaque individu, où qu'il se trouve sur la surface du globe.<o:p></o:p>


    Faut-il Monsieur le Président, être nécessairement bardé de diplômes, avoir fait des années d'études supérieures, sortir de l'ENA pour saisir cette effroyable réalité ?
    <o:p></o:p>

    Nous nous scandalisons à juste titre pour les conséquences funestes dans nos maisons de retraite d'un été virulent long de trois semaines. La catastrophe des pays les plus pauvres est quotidienne cependant, et pendant ce temps nous nous battons pour des chartes de qualité à propos de vacances, nous nous engageons pour des revalorisations de salaires, nous nous agitons pour le respect de normes européennes au sujet de la composition de nos crèmes solaires anti ultra-violet... Chaque jour de l'année les victimes de la faim sont cent fois plus nombreuses qu'un été de canicule en France. 365 jours par an, des êtres humains de tous âges meurent sous les regards certes apitoyés, compatissants, révoltés, mais parfaitement passifs de républiques très solennelles (dont la France), très dignes et très à cheval sur les principes sacrés de fraternité universelle, d'altruisme, de solidarité qu'elles incarnent...<o:p></o:p>

    Il est grand temps de dénoncer ce cirque Monsieur le Président. Les clowns ventrus du haut de leurs trônes compassés sont bien sinistres dans leur rôle de défenseurs des Droits de l'Homme... <o:p></o:p>

    Les premiers droits, qui consistent à manger à sa faim, à accéder aux soins et à l'éducation, ne sont-ils pas bafoués éhontément par ceux-là même qui sont censés les défendre bec et ongles, qui ont le pouvoir matériel, logistique, politique, humain de réparer la grande injustice alimentaire dont il se sont rendus coupables à travers le pillage historique, méthodique des richesses coloniales et qui ne font rien ou si peu ? Jamais la république du commerce des armes ne s'est aussi bien portée qu'aujourd'hui ! Nos usines à canons tournent à plein régime, l'Europe engraisse, l'Afrique crève, que demande le peuple ? <o:p></o:p>

    Encore plus de beaux défilés militaires, encore plus de feux d'artifice, encore plus de congés payés.<o:p></o:p>

    Vous me pardonnerez d'avoir succombé à l'emploi d'expressions triviales afin de vous exprimer ce que je crois être l'essentiel en tant que citoyen français. En des circonstances particulières, un langage virulent sied mieux qu'un autre, plus formel, moins éloquent. J'ai eu le courage Monsieur le Président de faire mon devoir de citoyen français, même si cette lettre est surtout symbolique.<o:p></o:p>

    A vous de faire preuve de courage dans votre rôle de chef d'Etat d'un des pays les plus riches, et paraît-il, les plus vertueux de la planète.<o:p></o:p>

    Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à ma parfaite considération.<o:p></o:p>

    631 - Le lait de Junon

    " Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie. " PASCAL<o:p></o:p>

    Cent mille aubes se lèvent sur cent mille humanités dans un coin de notre galaxie. Cent mille autres feux couchants illuminent inutilement cent mille mondes morts, ailleurs dans les profondeurs de la Voie Lactée. Je viens de parler de deux-cent mille planètes et je n'ai parlé que d'une infime partie de ce que contient la Voie Lactée. <o:p></o:p>

    La Voie Lactée, poudre blanche dispersée dans la nuit cosmique où est incluse une particule insignifiante, le Soleil…<o:p></o:p>

    Notre Soleil, étincelle quelconque noyée dans la multitude des feux stellaires formant l'écume sidérale... Invisible dans la masse globale, imperceptible à l'échelle galactique, grain de sable dans le désert, tête d'épingle dans l'océan, l'astre qui nous éclaire se fond parmi les myriades de soleils anonymes composant cette poussière en fusion que l'on nomme "galaxie".<o:p></o:p>

    Une galaxie... Des paysages par centaines de milliards, une diversité incalculable de terres, des horizons à n'en plus finir, mais surtout des milliards de milliards d'hommes, pourquoi pas ? Ces chiffres paraissent exagérés aux yeux des lecteurs incrédules, bornés par leur clocher qu'ils prennent pour le centre de l'Univers ? Ils sont pourtant à revoir à la hausse ces chiffres prodigieux, sans cesse, tant que reculera l'horizon cosmique devant la puissance de nos télescopes. Il y a quatre siècles, nul n'osait imaginer l'Amérique. Nous qui voyons des merveilles dans l'immensité de notre galaxie, portion d'espace ridiculement étroite au regard du reste du cosmos, soyons moins sots que nos aïeux superstitieux : osons croire à l'infini. A l'heure du savoir, des découvertes en tous genres, l'inimaginable est à portée de vue. Alors levons les yeux, ou plutôt fermons-les et songeons à notre galaxie...<o:p></o:p>

    Partout, des étoiles. <o:p></o:p>

    Isolées, regroupées par deux, trois, par centaines, par millions ou par milliards, elles témoignent de l'inconcevable réalité. Dans leur sillage, une infinité de planètes. Des "planètes Terre" par milliers, par millions, par milliards. Des globes bleus, des sphères vertes, des disques blancs, des boules grises... <o:p></o:p>

    Perdus dans le vide comme des points sans attaches ou bien rassemblés en îles diffuses aux dimensions vertigineuses, en brumes aux étendues incommensurables, les hôtes célestes sont éparpillés de mille manières différentes et cependant unis dans cette grande structure appelée Voie Lactée. <o:p></o:p>

    Issu de la nuit des temps, le peuple des étoiles couve son mystère dans le silence galactique.<o:p></o:p>

    632 - Les abattoirs industriels

    Imaginez une usine où des humains anonymes aux corps calibrés seraient égorgés puis démembrés méthodiquement par une machine implacable réglée pour tourner à plein régime... Impeccablement alignés, les corps dépecés en diverses parties sortiraient dans des barquettes sous cellophane à destination de la grande distribution. C'est le sort de millions d'animaux de boucherie. Vous me direz, les animaux de boucherie ne sont pas des humains et la comparaison est par conséquent exagérée, déplacée, saugrenue. On ne peut donc pas comparer humains et animaux de boucherie, penserez-vous.<o:p></o:p>

    Justement si. Et moi je compare. <o:p></o:p>

    A la place des animaux d'élevage, je mets délibérément des humains dans mon exemple, et ce pour mieux faire ressortir l'ignominie d'une chose que l'habitude nous a rendue banale. L'horreur des abattoirs, pourtant bien réelle, ne nous apparaît pas spontanément. Depuis toujours nous avons vu nos parents, grands-parents, maîtres d'école, voisins, amis se régaler des produits carnés issus des abattoirs. Enfants, on nous déposait même avec amour des tranches de jambon sur notre pain...<o:p></o:p>

    Tant et si bien que par la magie du couvert, dans les esprits affectueusement conditionnés ou simplement sous les palais sensibles aux causes gastronomiques, la tranche de jambon a toujours été -ou est devenue au fil des habitudes- un objet intrinsèque séparé de la sinistre réalité à laquelle il est tragiquement rattaché. Comme si cette chose rose et parfumée qui a toujours la même forme poussait sur des arbres en toute innocence...<o:p></o:p>

    Du cadavre rendu joli grâce à un emballage soigné, des tranches de mort préparées avec professionnalisme par des bouchers fiers de leur travail, de leur corporation, des pièces de honte que certifient des logos officiels garantissant leur qualité, des morceaux d'authentiques agonies, des côtelettes de souffrances, de la chair engraissée à la rentabilité, des êtres doués de sensibilité que l'on a traité de la naissance à la mort comme de la marchandise, des animaux transformés en produits standard, voilà ce que nous mangeons ! <o:p></o:p>

    La viande, c'est ça.<o:p></o:p>

    Il y a en outre un mythe très vulgaire tournant autour des mets carnés justifiant les appétits "ogresques" des plus primaires d'entre nous : la viande rendrait fort, beau, intelligent.<o:p></o:p>

    La bêtise et l'insensibilité de ces mangeurs de viande convaincus sont telles qu'ils méritent toute notre pitié.<o:p></o:p>

    633 - La vieille Albertine

    Vierge, stupide, économe, la vieille Albertine aimait égorger les chats du village. Pieuse comme un poux, aussi fière que les cloches de l'église, plus moche que sa cousine Berthe, Albertine en bonne vieillarde vicieuse qu'elle était ne s'adonnait aux délices interdits des délits mineurs qu'en présence de ses avocats importés d'Israël qu'elle dégustait avec beaucoup d'huile, ce qui avait la fâcheuse tendance à la faire baver.<o:p></o:p>

    A 78 ans bien sonnés, la bigote indigne convoitait les faveurs nauséeuses de son curé, un écouillé édenté qui avait des airs de serin persifleur. Cela dit l'homme d'église trépassa juste avant qu'Albertine ne succombât à ses passions malsaines. A ses funérailles, elle alla se faire cuire une grosse plâtrée de carottes. A neuf heures du soir, sa marmite pleine de choses étranges et indéterminées déborda de telle manière qu'on l'accusa de sorcellerie.<o:p></o:p>

    Elle fut jugée démente mais elle démentit sans aucune vigueur pour sa défense. Ses habituels avocats avalés, elle alla cette fois-ci se faire cuire un coco. Bref, pendant les trente ans qui suivirent l'affaire de la marmite, Albertine égorgea irrégulièrement les félins du voisinage. Parfois un par mois, parfois trois ou quatre tous les semestres. <o:p></o:p>

    Jusqu'à aujourd'hui où, alors qu'elle est âgée de 108 ans et qu'enfin vient de mourir son petit-fils, elle a fait une demande afin de bénéficier de son héritage. Elle est aussi alerte qu'une limace sur une feuille de laitue, mais cela ne l'empêche pas d'être sotte, méchante, cupide.<o:p></o:p>

    Depuis que j'ai emménagé à proximité de la vieille Albertine, je ne laisse plus sortir mes deux chats. Comme les autres au village, j'attends qu'elle crève.<o:p></o:p>

    A 108 ans elle est capable de tout, même de nous enterrer tous.<o:p></o:p>

    634 - La bêtise ordinaire des gens bien intentionnés

    La bêtise, la simple, banale, quotidienne, terrible sottise des honnêtes gens de mon quartier m'est particulièrement insupportable. <o:p></o:p>

    Ainsi dans la tête de ces imbéciles moyens les humbles citoyens vers lesquels convergent soudainement les projecteurs de l'actualité sous prétexte qu'ils sont encore plus bêtes que la moyenne de leurs congénères de par l'exercice original ou intensif de leur profession (tel un charcutier recevant une médaille pour services rendus à la cause carnée), deviennent des héros élevés à la dignité d'un article dans le canard local.<o:p></o:p>

    De simples victimes de leur condition sociale, ils passent du jour au lendemain au statut élogieux et immortel de héros par le simple fait de l'importance médiatique donnée à l'événement... <o:p></o:p>

    Décidément, les gens de mon quartier sont mes pires ennemis. Surtout cette Madame Dumou, brave ménagère cinquantenaire d'aspect à la fois insignifiant et caricatural avec son cabas plein de poireaux qui dépassent, avec sa pensée lisse, inoffensive, révélatrice de la mollesse ambiante de la masse dominante qui lui ressemble... Madame Dumou, femme du peuple sans histoire, bonne, honnête, émotive, "bien comme il faut", propre sur elle est en fait un véritable terroriste de la pensée. D'une extrême dangerosité. L'adversaire irréductible de tout bel esprit épris de hauteurs. <o:p></o:p>

    Ennemie jurée des idées brillantes, élevée dans le culte de la médiocrité et du pot-au-feu du dimanche, Madame Dumou à la base ne croit qu'aux vérités potagères contenues dans son cabas. Depuis les profondeurs vertigineuses de son vénérable réceptacle à légumes qu'elle trimbale d'épiceries en superettes, n'importe quel Dupont sous le soleil de sa télévision allumée en permanence peut, pour un oui ou pour un non, devenir un messie. <o:p></o:p>

    Quand je croise Madame Dumou dans la rue, armé de mon sourire lénifiant, je prends bien garde à toujours lui adresser mes plus conventionnelles salutations en ne laissant jamais rien paraître de ma véritable nature : elle ne sait pas que j'appartiens à la secte honnie des beaux esprits. <o:p></o:p>

    635 - Châtier les laides

    Un jour un interlocuteur de belle espèce me fit remarquer qu'un esthète digne de ce nom ne devait jamais s'abaisser à souffleter une femme, si sotte qu'elle fût.<o:p></o:p>

    Certes. J'ajouterais que les femelles beautés, même les très méchantes, ont tous les droits et qu'en aucune façon ces créatures vénéneuses ne méritent de recevoir à la face le gant d'un sybarite, si haut perché sur son pommeau qu'il soit. Je ne conteste pas un instant cette remarquable vérité. <o:p></o:p>

    Mais les laides, les filles de l'ombre, les non élues vouées à la déchéance esthétique, les femmes enfin qui n'ont pas eu l'heur de naître sous l'aile de Vénus, ont-elles donc aux yeux du bel esprit quelque prix ? Je ne pense pas. Les laides femmes ne sont-elles pas méchantes par définition ? Une femme laide ne peut être bonne. Et quand même elle serait bonne, comment sans beauté aucune pourrait-elle se faire aimer d'un homme de rang ? <o:p></o:p>

    Et si la beauté qui s'allie à la corruption a encore quelque douceur, quelque éclat sous nos regards pleins de raffinement et d'indulgence, en revanche la laideur associée à la scélératesse ne mérite-elle pas notre plus profond mépris ainsi que les châtiments les plus sévères du simple fait que chez ces enfants de vipères nés de la fange rien ne pourra jamais nous séduire, nous les beaux sangs ?<o:p></o:p>

    Je ne puis me résoudre à accorder à la laideur le moindre des droits octroyés aux descendantes d'Aphrodite. Ce serait faire offense au goût que de ne pas gifler le visage ingrat de celle qui voudrait usurper à la beauté sa couronne. Non, les laiderons ne méritent pas notre pardon. Leur existence-même en ce monde formant une permanente injure à la beauté, aucune pitié ne doit amoindrir leur douleur d'être ce qu'elles sont.<o:p></o:p>

    Les belles femmes, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, stupides ou brillantes pourront toujours arguer de cette cause supérieure qui les caractérise, la beauté, pour se faire pardonner leurs défauts. Ce qui ne sera jamais le cas des laides. <o:p></o:p>

    Cet ultime argument qui ne fait qu'exacerber leur disgrâce légitime définitivement les soufflets qu'avec morgue et cruauté nous leur destinons.<o:p></o:p>

    636 - Ivresse d'esthète

    Comment décrire le plaisir subtil et fulgurant de l'esthète que je suis lorsque volontairement je me frotte aux béotiens et me fais passer pour l'un des leurs dans le dessein d'éprouver le vertige de mes propres hauteurs ? <o:p></o:p>

    J'affectionne singulièrement la proximité du vulgaire, j'aime le côtoyer avec cette manière sévère et cynique qui est la marque des esprits supérieurs. Le plaisir suprême consiste à me mettre à la portée du premier rustre venu et à me faire passer pour un grossier de sa condition sans rien laisser paraître de ma supériorité. Pour cela je dois me faire violence et masquer cet air hautain inné qui me caractérise. <o:p></o:p>

    Sorte de gants blancs de l'esprit, de hauts-de-forme de l'âme naturels aux belles gens, les allures dédaigneuses de la race noble sont des signes de qualité insupportables à la roture.<o:p></o:p>

    En certaines circonstances les sangs rares de mon espèce évitent de laisser parler le naturel. <o:p></o:p>

    Ainsi, pour passer vraiment inaperçu dans ces bars j'adopte les us odieux de mon entourage. Quand parfois à l'heure vespérale dans un de ces établissements plébéiens j'ingurgite quelque breuvage enivrant, je fais mine d'apprécier l'infâme musique de fond issue du juke-box alors qu'en réalité je ne souffre que les quatuors de Beethoven... <o:p></o:p>

    Mon regard croise celui du patron, des clients... Faussement uni à cette assemblée de minables qui pataugent dans leur médiocrité quotidienne, je lève mon verre avec eux aux causes les plus inepte : à la santé de Bébert, à la prochaine baisse des impôts locaux, à l'ouverture de la supérette du coin de la rue... Ennemi de la moindre finesse de pensée, le cercle se referme un peu plus autour du gros rouge. A partir de cet instant, tout est possible. Par exemple, un des éthyliques dans un éclair de stupidité hautement prévisible se lamente, inconsolable, sur le sort de son chien malade puis sans transition cause allègrement météorologie, femmes, automobiles... Au second verre, solennel comme une statue de plâtre, le regard lointain et mystérieux, il se met à débiter des banalités mécaniques au sujet des roues de son vélo, allant jusqu'à invoquer le dieu Michelin avec dans la voix de sincères tremblements d'admiration pour le concepteur de la chambre à air.<o:p></o:p>

    En choeur, tous approuvent.<o:p></o:p>

    Et moi, depuis mes sphères divines que mes compagnons de beuverie sont incapables de concevoir, je surenchéris.<o:p></o:p>

    Mes propos, d'une insignifiance abyssale mais clamés sur un ton plein d'une fureur feinte mi-alcoolique mi-crapuleuse, les flattent et les rassurent jusqu'au fond de leur coeur prompt à battre à la moindre sollicitation "bistrotière", tout en berçant exquisément leurs viscères imbibés de vile piquette... En quelques crachats d'ivrogne je deviens leur grand amiral de zinc, à la vie à la mort.<o:p></o:p>

    Je ressors du bar deux fois ivre. Ivre de bière fine et ivre de jubilation cynique. <o:p></o:p>

    Le plaisir de la boisson, associé au plaisir de l'esprit, est ainsi décuplé.<o:p></o:p>

    637 - Le naïf

    Ils m'appellent "le naïf" en riant parce que j'aime les étoiles plus que leurs babioles d'or et de feutre fin. Avec mes rêves doux et étranges, je passe pour un idiot, un sot sans le sou, un enfant de bohème, un pauvre imbécile sans avenir. <o:p></o:p>

    Je donne du prix aux songes, au firmament, à l'Amour. Ils se croient meilleurs et indispensables sous prétexte que leur trésor à eux tient dans un coffre, que le mien tient dans la tête.<o:p></o:p>

    J'ai des scrupules, de la dignité, plein de noblesse : on me dit faible, stupide, sans ambition. Indifférent à leurs modes vestimentaires, à leurs vanités intellectuelles, je ne jure que par la Poésie. Cela ne vaut rien sous leurs chapeaux bien taillés, aussi se permettent-ils de cracher sur ma face éclatante de bonté. La vertu les fait exploser de rire. Leurs vices ne me touchent cependant pas : je plane loin au-dessus de leurs noires certitudes. Mon regard se perd dans le zénith. Eux, me reprochent de ne pas aimer l'argent, l'artifice, le profit, d'être inutile avec mes visions lunaires. <o:p></o:p>

    Ils m'appellent "l'idéaliste" avec un air supérieur parce qu'ils ont une assurance-vie, une voiture puissante, une situation, un coeur dur, et que moi je n'aspire qu'à rejoindre les astres, ne crois qu'en mes hauteurs, n'aime que ce qui est grand, beau, immortel.<o:p></o:p>

    Moi le "naïf", "l'imbécile", "l'idiot", le "pauvre type", quand je les salue avec mon sourire tendre et niais, leurs rires gras redoublent et ma face blanchit encore un peu plus. <o:p></o:p>

    Ils m'appellent "le naïf" avec mépris, les poches pleines, le coeur vide, car depuis longtemps ils ont oublié les sons purs et glorieux de mon vrai nom.<o:p></o:p>

    638 - Bonheur tranquille au village

    Du haut du clocher où il admire le paysage, le bedeau maudit le curé dont il entrevoit la silhouette dans une ruelle. Ombre furtive et sinistre qui contraste avec l'atmosphère joyeuse du village... L'été est éclatant, l'horizon s'étend devant lui, à perte de vue. Il respire l'air avec gaîté, enivré par les senteurs de flore et d 'azur. Son regard se noie avec délices dans les brumes chaudes qui déforment les étendues incertaines dans le lointain. En bas il voit toujours le prêtre. Plus loin la Fanchon coupe de l'herbe.<o:p></o:p>

    Quittons les hauteurs de l'épieur, assistons de plus près à l'ouvrage de Fanchon... Elle est laide, fortunée, héritière de plus beau domaine de la paroisse. Un vélo passe près d'elle. C'est le bûcheron. Une brute sournoise passionnément éprise de gnôle. Aimé de Suzanne, dites "Suzie la putain" selon les mauvaises langues, il affectionne plus la compagnie des arbres que celle de sa "Suzie". Son point fort : ses poings. Il cogne. Hommes et femmes. Il est respecté dans le village.

    Revenons à l'abbé. Fin, racé, sévère, c'est un homme d'esprit. Un océan le sépare de ses ouailles. Le coeur pur, pétri de noblesse, il a cependant une fâcheuse tendance à aimer plus que chaleureusement la fille du fermier Claude, jolie plante de 22 ans aux appas inexistants. Le fermier Claude est un gentil boeuf avare et travailleur, sobre, peu causant mais plein d'affection pour ses amis. Un brave type.
    <o:p></o:p>

    Mais la cloche sonne à l'école communale. C'est la récréation. Les enfants sont excités : un mendiant longe le mur de l'institution. Il reçoit quelques cailloux sur le dos sans broncher. Sourd, il n'entend pas les moqueries de certains enfants plus cruels ou plus délurés que d'autres.<o:p></o:p>

    Les fermières sont à leurs ouvrages ou bien flânent. Ça souffle, maugrée, bavarde sous les toits de chaumes, dans les chemins creux, au fond des poulaillers.

    La vieille Bergerette, aussi féroce qu'à l'accoutumée et un peu dérangée, vient de menacer de mort par trépanation précipitée le fils de l'épicier âgé de cinq ans, échappé de la cour de récréation. Le saint homme en soutane qui la croise tente de l'apaiser et ne récolte que des injures qui choquent même le bedeau, toujours embusqué dans son observatoire en compagnie des cloches.
    <o:p></o:p>

    Midi. Certaines cuisines empestent, d'autres exhalent d'exquises promesses potagères... Le maire vient gronder avec bonhomie la vieille méchante. Cette dernière répond par un coup de canne qui aurait pu être mortel à l'élu, tandis que des canards mêlent leurs cris aux plaintes des ânes.<o:p></o:p>

    Ainsi en va-t-il des affaires quotidiennes, tragiques et insignifiantes de ce village sans nom, que nous appellerons cependant "Trifouillis-les-Hirondelles".<o:p></o:p>

    639 - L'imposture des toges

    Quand on met en scène sur des planches (ou sur la pellicule cinématographique) la Bible, Napoléon, Charlemagne, de Gaule ou Colomb, on ennoblit nécessairement la réalité.<o:p></o:p>

    Le théâtre avec sa gestuelle, ses codes, sa gestion artistique de l'espace, du mouvement, de même que les tableaux de maîtres avec leurs spécificités picturales, ne sont pas le reflet "à la lettre" de la réalité. La réalité est plus décevante, triviale, ordinaire dans la forme. En termes visuels, "scéniques" et verbaux le réel est moins éclatant : rois, princes ou messies ne prennent JAMAIS des airs solennels et compassés tel qu'on se l'imagine, même quand ils communiquent des paroles immortelles... Et ce qu'ils disent avec des mots de marbre, si tant est qu'ils les prononcent vraiment ces fameux mots aux échos inextinguibles qu'on leur attribue, ils ne les clament JAMAIS avec cette diction parfaite, étudiée, "professionnelle" que nous miment avec grandiloquence les gens de théâtre ou ainsi que le suggèrent les livres enluminés. <o:p></o:p>

    La prétention d'un certain théâtre, la pompe des ouvrages pieux, l'artifice des tableaux, la gravité des statues, bref le mensonge esthétique, la fantaisie académique des arts en général, ont depuis des siècles façonné notre imaginaire de telle sorte qu'on ne peut plus concevoir ces illustres personnages historiques QUE dans des postures stéréotypées, caricaturales, quasi mythologiques, même quand ils sont représentés en train de faire des choses ordinaires de la vie quotidienne. Alors qu'en réalité ces personnages faisaient caca eux aussi, et joliment encore, aussi éthérés soient leurs regards dans les tableaux religieux et artistiques exécutés à travers les siècles. Nos grands peintres, sans grande imagination, se sont singés mutuellement avec leurs tableaux aux compositions scéniques irréalistes, invraisemblables, franchement improbables pour mieux ancrer en nous cet imaginaire de "Disneyland pour adultes cultivés".<o:p></o:p>

    Les grands personnages pouvaient être pris d'une quinte de toux en plein discours "historique". Ils pouvaient ne posséder aucun talent oratoire et s'emmêler les pinceaux en émettant ces mots sculptés dans l'airain qu'on leur prête, mots parfois ponctués de ratés, voire de lapsus, et même couverts par d'incongrus gargouillements d'estomac... Eux aussi. Pourquoi les grands personnages historiques auraient-ils spécialement le don oratoire, le don théâtral, le don de conteur pour parler aux foules, à leurs généraux, à la postérité ?<o:p></o:p>

    L'art a conditionné nos esprits de manière si éclatante qu'à la place d'hommes accessibles à la défécation l'on s'est mis à concevoir des demi-dieux toujours vêtus de toges, qui faisaient à tout bout de champs des effets de manches (profitant de ce qu'ils étaient vêtus de toges justement, le costume-cravate se prêtant moins à ce genre d'exercice), à croire en des sortes de supers pantins solennels 24 heures sur 24 qui ne se prenaient jamais les pieds dans le tapis, graves du matin au soir même quand ils dormaient... <o:p></o:p>

    La farce des immortels sketchs gréco-latins, romano-chrétiens, gallo-romantiques, charlemagno-romanesques dure depuis des siècles, le temps lustrant l'Histoire. Ce qui n'arrange rien.<o:p></o:p>

    Voilà pourquoi je dis que les toges, les statues et les panthéons aux lignes savantes sont des impostures.<o:p></o:p>

    640 - Rimbaud pot-au-feu

    Comment pourrais-je croire en Rimbaud, alors qu'on l'évoque avec des vapeurs d'éther dans la bouche, des ronds de fumée dans la tête, de gros lapins rouges dans le chapeau ? Un personnage inspirant des clichés aussi indigents est trop suspect... Moi quand je parle d'Arthur, il me sort de la bouche des postillons, de la tête des idées vagues, du chapeau rien du tout.<o:p></o:p>

    Je ne crois pas en ces grandeurs scolaires inculquées par la superstition républicaine. Les "poteaux de couleurs", les "peaux rouges criards" et autres "haleurs" sont de pures sottises d'érudits. Certes bien tournées dans la forme, mais écrites pour le vent des envolées vides et cependant lues avec d'imbéciles frémissements dans la voix. Révélateur de la triste capacité de l'esprit humain à se laisser faussement bercer par des sornettes, Rimbaud est le symbole de l'embrigadement des masses crédules et ignorantes dans une sensibilité poétique frelatée, artificielle, relayée par de doctes cornichons de l'Académie à qui nul n'oserait tenir tête.<o:p></o:p>

    Moi je prétends que Rimbaud est un médiocre voyant et que ses disciples sont de bêlantes andouilles.<o:p></o:p>

    Parce que l'Enseignement National a inclus dans son programme ces pompeuses, indigestes carottes diarrhéiques censées incarner l'aboutissement de la Beauté verveuse et métrique (au lieu de dispenser en priorité à ces populations scolaires de bonnes grosses patates poétiques bien substantielles ou d'exquises salades lyriques pleines de légèreté, plus propres à contenter leurs véritables aspirations juvéniles), des générations de rebelles à la carotène enrégimentés par leurs professeurs de lettres font semblant d'apprécier le mets orange.

    Le clou Rimbaldesque est à ce point enfoncé dans ces crânes ramollis que cracher sur le plat officiel est perçu comme un acte quasi criminel.
    <o:p></o:p>

    Je ne doute pas que j'aurai toujours sur le dos ces hordes de contaminés de la "pensée universitaire" pour me reprocher ma dissidence déplacée, à leurs yeux inacceptable... En effet, dans ce système bien huilé où l'esprit se nourrit de certitudes institutionnelles, on ne s'oppose pas ainsi au Dieu Rimbaud. Rimbaud, on ne le discute pas : ou on le vénère, ou on n'est rien qu'un pauvre épicier de province inaccessible aux hauteurs zénithales...<o:p></o:p>

    Au fait, qui parlait de rébellion poétique ?<o:p></o:p>

    641 - Terroriste

    J'ai vu le jour sous l'empire de Misère, dans les quartiers des damnés de Calcutta.

    Certains disent de moi en riant, incrédules, que je suis une caricature, un cliché éculé, mais moi je sais bien que je suis un homme de chair et de lumière, fier et ravagé, plein de rêves et de douleur.
    <o:p></o:p>

    Elevé entre ciel et caniveau avec les herbes sauvages, la faim m'a poussé au crime. La geôle a fini d'endurcir mon coeur qui je crois était fait pour l'amour. Chien galeux parmi les loups, j'erre sur la terre des hommes, en quête de vengeance et de justice car les loups ont fait de moi un autre loup. Plus laid, plus libre, plus féroce, plus affamé. <o:p></o:p>

    Plus fort.<o:p></o:p>

    Ma force justement, je la puise dans le désespoir, n'attendant déjà plus rien alors que commence et s'achève ma vie.<o:p></o:p>

    Je souhaite la mort des riches, la victoire de l'arbitraire, la suprématie de l'altruisme universel et oeuvre de tout coeur pour le malheur de mes ennemis. Je porte en moi la haine la plus noire mais aussi un amour infini : la haine innée du pauvre pour le nanti, l'amour sans fin du déshérité pour son Dieu absent. Sans loi ni jours heureux, je conçois des guerres sans terme. Mais, n'étant qu'un gueux, je tue à mains nues, vole à pleines dents, pleure sans larmes.<o:p></o:p>

    A présent je meurs de mes crimes, meurs de votre indifférence, meurs de faim. Vous m'appelez TERRORISTE parce que vous avez peur, parce que vous êtes riches, parce que vous êtes du bon côté de la barrière. <o:p></o:p>

    Avec votre belle conscience de repus.<o:p></o:p>

    Vous m'appelez TERRORISTE et moi je vous appelle COUPABLES.<o:p></o:p>

    642 - La faiblesse de l'esthète

    Christine,

    Je ne vous oublie pas, amante. Je pense encore à toi, Christine mon cher, très cher Amour. Toi mon Amour littéraire, mon amour de plume, mon amour chartrain, mon amour oui, mon amour, mon Amour… Vous l’épistolière qui vous enracinez dans le temps par votre silence-même, je pense à vous sous la pluie de fin d’été qui tombe au Vieux-Mans. Christine, vous me charmiez avec vos traits sans grâce, jadis… J’aimais me perdre longuement dans les profondeurs de votre visage sévère, à travers votre photo. Vos lettres lucides et romanesques vous rendaient belle. Vous étiez mon amour impossible, triste et sans éclat. Presque comique. Vous l’objet sans valeur, moi l’esthète paradoxal… Je voulais conquérir cette face faite pour les amours cruelles et nobles, cyniques et sincères. En imagination je caressais votre visage, baisais vos lèvres, essuyais vos larmes… Et le songe était beau.
    <o:p></o:p>

    Christine, vous êtes belle et sombre, ingrate et charmante, triste et désirable. Hélas ! La maternité semble avoir apporté quelque imbécile rayon de lumière sur votre front, aimé autrefois pour son voile de mélancolie. Fragile, sans attrait et cependant touchante, vous incarniez l’idéal poétique, entre rose et pissenlit, cristal et caillou. Je rêvais de pâles conquêtes, de blêmes amours, de lunaires créatures aux sourires énigmatiques et funèbres, et vous étiez là, hibou onirique planant dans la nuit de mon imaginaire fantasque et dolent… Oiseau étrange aux ailes silencieuses, vous m’ensorceliez Christine avec vos yeux doux, avec vos mots durs, avec vos rires comme des sanglots.<o:p></o:p>

    Comment pourrais-je oublier vos élans timides et livresques, tendres et    chagrins ? Vous m’aimiez à votre façon, et moi de même. Vous avec désenchantement et masochisme, moi avec égoïsme et férocité. Vous étiez lugubre, j’étais mondain. Cependant la Poésie présidait à cet hyménée supérieur. Là fut son salut. Les dieux de l’Art et des Lettres ont souscrit à cette union épistolaire. Aujourd’hui, alors qu’il pleut tristement sur la cité, j’éprouve quelque sincère tendresse pour vous Christine.<o:p></o:p>

    Je baise aimablement votre front hier voué à mes sarcasmes d’Amant immodeste. Je vous aime non plus seulement du bout hautain et séduisant de ma plume, mais aussi avec mon pauvre, simple, dépouillé cœur de mortel.<o:p></o:p>

    643 - Les imbécillités du NET

    Lorsque l'internaute de base entreprend sur le NET une démarche de communication (présentation personnelle, étalage de ses états d'âmes, journal improvisé), que ce soit à travers l'écrit ou l'image, spontanément, systématiquement il le fait sur le mode humoristique. Avec plus ou moins de réussite. Tout le monde veut faire rire. Très peu y parviennent. Souvent le résultat est médiocre, voire franchement navrant.<o:p></o:p>

    Tous ces apprentis-clowns cybernétiques se croient irrésistibles. Certains parodient sans aucun talent des chanteurs à la mode, d'autres s'agitent ainsi que des guignols insipides, de plus hardis bavent même comme des chameaux...<o:p></o:p>

    Tout ça pour quoi ? Pour quel résultat ? Ces pitoyables tentatives de se rehausser, de se faire aimer, applaudir à travers la dérision, la légèreté, la provocation n'atteignent pas le premier échelon de l'humour digne de ce nom, celui qui touche l'honnête homme, le bel esprit. Pataugeant lamentablement dans leur mélasse de nullités humoristiques, incapables de prendre la moindre distance sur leurs affligeantes pitreries, ces internautes si pressés de ne pas se prendre au sérieux, si prompts à vouloir se rendre légers, spirituels, aimables, ratent totalement leur cible. <o:p></o:p>

    Et se montrent consternants.<o:p></o:p>

    L'exercice humoristique est si difficile, si périlleux pour le cyber-quidam que le mieux serait qu'il ait la force, l'intelligence de ne pas succomber à l'appel traître de l'Araignée. Si la Toile mondiale est dense, facile d'accès et très flatteuse, elle n'en demeure pas moins un espace d'expression sans filet pour les naïfs qui ratent leur numéro.<o:p></o:p>

    Son aspect inoffensif est illusoire : la renommée d'un anonyme peut voler en éclats sur une seule prestation. Le ridicule est une arme d'autodestruction insoupçonnable.

    Ce n'est pas parce que l'outil informatique avec ses merveilleuses possibilités est à la portée de tous, que tous ont nécessairement des choses à dire, à montrer au reste du monde. Pour leur propre bien, le retrait de la scène informatique planétaire des postulants à "l'humour dupontesque" serait préférable à leurs gesticulations désespérées pour se faire une place au soleil décidément bien pâle de la gloire cybernétique.
    <o:p></o:p>

    644 - Le roi des avares

    Je connais un homme aux moeurs ahurissantes. Plus vieux que nature avec ses os saillants, aussi terne qu'une pelure de patate, ce singe acariâtre est d'une avarice extrême.<o:p></o:p>

    Lorsque je m'invite dans sa masure insalubre, même le contenu de sa gouttière est trop cher pour m'accueillir... Pas question de m'offrir un thé ! D'ailleurs avec quoi ferait-il bouillir son eau de pluie, attendu que le bois mort semble être son plus précieux trésor ? Il préfère s'excuser mille fois plutôt que de me céder une tasse de thé. D'ailleurs son thé est périmé et son eau de gouttière fangeuse, je ne l'ignore pas. Quand au sucre...<o:p></o:p>

    Rétif à l'électricité, il ne consomme que de la chandelle. Grand lecteur de journaux récupérés dans les poubelles, il est très au fait des actualités caduques. <o:p></o:p>

    Ça ne mange pas de pain. Effrayé par les nouvelles technologies et les moyens de communications révolutionnaires, il a trouvé une alternative peu onéreuse au téléphone portable, à l'ordinateur et à Internet : l'isolement.<o:p></o:p>

    Les amis ça coûte cher et c'est précisément pour cette raison qu'il déteste en avoir. Aussi, pour tenter de le sortir de sa solitude économique, dois-je rendre visite contre son gré à ce farouche exilé du monde de la consommation. En échange de son thé imbuvable qu'il me refuse systématiquement, j'apporte des oranges à ce prisonnier volontaire. Je crains, bien à tort, qu'il ne tombe malade de privations. En fait cet ascète est un roc. Je converse longuement avec lui. Cela ne le dérange guère de causer et je crois même qu'il apprécie beaucoup, vu que les mots ça ne coûte rien. Mais dès qu'il s'agit de sortir un verre, une tasse, une allumette... Là il se braque, devient muet, se sent mal, semble prêt à trépasser. <o:p></o:p>

    La dépense est le point faible de ce chêne nourri de terre maigre.<o:p></o:p>

    Sa détermination à ne rien débourser est redoutable. Je le connais, il préfère frôler la Camarde plutôt que d'aller chez le médecin. Il a décrété ne jamais tomber malade, que la maladie c'était pour les riches, les mous pas musclés, les gens de la ville trop bien nourris, les frileux pas assez économes, les fous qui jettent leur argent par les fenêtres... Toutes les excuses sont bonnes pour ne pas payer "l'impôt sur la bonne santé" comme il dit. <o:p></o:p>

    Ainsi s'est-il constitué de solides anticorps, par la force des choses.<o:p></o:p>

    Cet homme hors du commun aime singulièrement la nature : salades de pissenlits, champignons, pommes sauvages, marrons, soupes d'orties, fruits tombés et céréales opportunes de toutes sortes à portée de main, mûrs ou pourris, légalement appropriés ou astucieusement emparés, tels sont les composants de ses repas aigres et corsés. <o:p></o:p>

    Ainsi ce qui ne l'a point tué l'a-t-il rendu plus vif.<o:p></o:p>

    A quatre-vingt-neuf ans ce vieux hibou reclus et misanthrope, vrai châtaignier mûri sous l'abstinence, est l'homme qui finalement me fait le plus rire au monde tout en suscitant chez moi une réelle admiration. <o:p></o:p>

    Le roi des avares...<o:p></o:p>

    645 - La poésie des réacteurs

    Croiser ton regard dans les airs, chère Sandrine, à bord de cet avion en provenance du Caire et sur le point d'atterrir à Orly dans le bruit confus des aérofreins et le sifflement net des réacteurs en décélération (ces stridulations caractéristiques annonçant l'atterrissage d'un aéronef, vrombissements intenses perceptibles par les passagers seulement), croiser ton regard là‑haut dans ce doux bruissement des moteurs disais-je, fut un théâtre intense. Du vrai, du beau tragi-comique avec pour décor tout un paysage, un monde vu d'en haut qu'il fallait coûte que coûte rencontrer sans heurt, sous peine de mort. <o:p></o:p>

    Nous étions acteurs charnels, incarnés, vivants et dangereusement proches l'un à côté de l'autre, avec le sol qui grossissait à l'approche de l'aéroport, un monde plus réel que nous ne l'imaginions parce que nos tombes futures étaient en bas, non en l'air. Notre devenir était sous nos pieds, quoi qu'il fût advenu. Telles étaient mes pensées...<o:p></o:p>

    Tu m'apparaissais plus belle en plein drame, au seuil de la tourmente (à l'approche du sol je me préparais à mourir comme c'est le cas à chaque atterrissage) !<o:p></o:p>

    Et ces bruits aigus de réacteurs -magnifique mugissement de la mécanique apprivoisée-, ces bruits de puissance, de gueules hurlantes muselées, maîtrisées par la main humaine, ces bruits de réacteurs en décélération, olympienne clameur du fer gorgé de feu, cette haleine brûlante enfin que crachait la machine, c'était de la MUSIQUE. <o:p></o:p>

    Mieux : du Mozart.<o:p></o:p>

    Oui tu étais belle dans cette scène, parce que cette couverture qui te recouvrait, si légère, ténue, aurait pu devenir ton linceul. Tout devenait vertigineux depuis mon siège : le paysage défilant à ma droite, la perspective certes peu probable mais non impossible d'un écrasement en bas, tes yeux furtivement croisés à ma gauche.

    Et derrière mon masque serein, la tempête.
    <o:p></o:p>

    Bercé par le bruit des réacteurs évoquant le galop aérien de deux pégases, j'attendais le contact libérateur avec le sol, le frisson au ventre... Exquis tourbillons de la chair et de l'âme agitées par des causes suprêmes ! Amour et mal de l'air les secouaient... Sur le point de vomir, entre agonie et éblouissement, effroi et émerveillement, je m'en remettais aux ailes qu'une flamme faisait rugir. Dieu ! Quel concert que ces sifflements ! C'était pour moi l'appel du large, le cri de la liberté, le chant du ciel. <o:p></o:p>

    Enchanteurs sont ces engins volants qui décollent avec fureur dans un crachat de fumée et reviennent dociles, gémissants à l'atterrissage ! Ces aigles géants qui rasent les toits avec plein de majesté avant de se fondre dans l'azur sont semblables aux coeurs des hommes en proie à leurs plus chers tourments.<o:p></o:p>

    Sandrine, voyager à tes côtés lors de ce vol de retour fut la plus délicieuse épreuve de ma vie.<o:p></o:p>

    646 - Education religieuse

    L'abbé Boyer, à la tête d'un orphelinat de province depuis 1830, est un sadique-né redoutable qui mène son petit monde d'une main de fer.<o:p></o:p>

    Son plus grand plaisir est de broyer méthodiquement les petits êtres perdus confiés par l'Assistance Charitable de France.<o:p></o:p>

    D'une foi inébranlable, le bon abbé enseigne avec rigueur et droiture la piété la plus doctrinale. Les orphelins de son institution sont sa bête noire : il méprise ces enfants de démons de toute sa hauteur ogresque. 120 kilos de muscles et de haine à l'état brut s'acharnant sur les pupilles, cela entretient sa belle santé. Encouragé par ses supérieurs, loué par les dames de bonne société, dans les bonnes grâces du pape lui-même, l'abbé jouit d'une considération universelle.<o:p></o:p>

    Austère mais juste, le père Boyer ne flagelle ses petits orphelins que pour des motifs hautement moraux : pénitence religieuse, affermissement de la foi, élévation spirituelle. Ou des fautes graves : vol d'un morceau de pain, assoupissement à la prière du matin, récitation maladroite de la Bible en latin... Le bon père estime en effet qu'à huit ans tout enfant se doit d'être raisonnable et rompre définitivement avec les molles tendresses de l'âge candide. <o:p></o:p>

    - "A huit ans on est un homme, bon sang !", répète-t-il sans cesse à ses pensionnaires pleins d'ingratitude...<o:p></o:p>

    D'un caractère trempé, l'abbé ne supporte pas les plaintes des plus chétifs. D'ailleurs la seule vue de ces êtres débiles le met généralement hors de lui. Alors lorsqu'en plus ces derniers se plaignent, il explose le Père... Mais heureusement jamais à bout de ressources, il fait taire les récalcitrants avec des procédés qui ont fait leurs preuves : privations de nourriture, de sommeil, corvées et prières, marches nocturnes forcées pieds nus avec fardeaux, etc. Des années à observer ses protégés, à expérimenter sur eux les idées pédagogiques les plus ingénieuses lui ont apporté les bases d'un enseignement sans faille. On ne la lui fait pas à l'abbé. Autodidacte, il connaît les méthodes pour mâter ces graines de vice...

    Petit Pierre est sorti de l'institution religieuse à l'âge de 21 ans avec une formation de commis agricole, après 13 ans passés sous la protection de l'abbé. Aujourd'hui il travaille comme vacher dans une ferme. Payé en pain frais, bon lait crémeux de vache, litière de paille, solitude et rosée matinale, il mange presque à sa faim. Bref, il est heureux.
    <o:p></o:p>

    Gloire à l'abbé Boyer, sévère mais juste !<o:p></o:p>

    647 - L'âme de l'amant

    Christine,

    Vous avez raison : je me perds dans des batailles stériles et mes conquêtes ont le prix dérisoire des émotions fugaces, des satisfactions vaniteuses, des plaisirs sans lendemain. Pitoyable, je ne suis qu’un Casanova des causes éphémères.
    <o:p></o:p>

    Puisque mon plumage trop léger n’agrée point à votre cœur si exigeant, je ferai en sorte de devenir un phénix digne de votre nom. Vous deviendrez l’hôte privilégié de ce cloître d’honnêteté nommé Raphaël.<o:p></o:p>

    Je me ferai amant austère pour vous mieux plaire. Avec des paroles chastes, dévotieuses, voire âpres. Je veux gagner votre âme et non plus votre simple coeur de femme. Offrez-moi non plus votre infernal hymen mais votre front décent, que je le baise avec respect, pudeur et sérénité. Qu'entre nous règnent les lois majeures de la vertu : je n’aspire plus qu’à un blanc hyménée.<o:p></o:p>

    Elevez-moi à votre hauteur que je puisse admirer de près votre couronne et lui rendre grâce. Cheminons sur les voies droites, nettes et claires d’un amour débarrassé de ses terrestres souillures. Faisons triompher poésie, pureté, beauté. Dans cette admirable affaire l’esprit est souverain, tandis que la chair n’est que corruption, laideur et diableries… La grande aventure de l’authentique amour commence là où se rompt le joug de la passion impure. L’amant libéré des charnelles séductions peut alors s’offrir sans artifice à l’être aimé. <o:p></o:p>

    C’est une fusion des âmes qui s’opère, et exclusivement des âmes. <o:p></o:p>

    Oublions nos corps, cher amour. Soyons des anges, sachons aimer avec élévation, sachons aimer comme on aime si rarement en cette époque de moeurs immodestes. Ne regardez pas mes vieux péchés mais l’éclat neuf de mon âme livrée aux feux de la pudeur.<o:p></o:p>

    Je porte la croix de la Vertu qui me mène jusqu’aux deux cierges de vos prunelles posées sur mes larmes sanctifiées : je vous dédie mes plaies futures et vous conjure de m’aimer avec autant de folie désincarnée que de raison séculière.<o:p></o:p>

    648 - Face effacée

    Christine,

    Ce trouble que vous me causez avec vos yeux globuleux, votre sourire absent et votre air d'affligée, cette humeur abyssale qui baigne mon être et dont vous êtes la source, cet état d’ivresse où vous m’avez mis et qui vous honore tellement, c’est l’or de mon âme qui s'allège, la gloire de mon temps perdu à vous désirer, le salut de mes jours dédiés à votre nom, la raison froide de mes rêves ardents, le sang blanc de mes heures qui passent.
    <o:p></o:p>

    Je vous aime comme j’aimerais une cathédrale.<o:p></o:p>

    Vous êtes un chérubin Christine, et je ne suis pas ce diable que vous imaginez. Je vous aime avec dans la tête un choeur gothique et des ailes romanes, et je chante cet amour onirique en dormant. <o:p></o:p>

    Vous êtes le rêve plus étrange de ma vie.<o:p></o:p>

    Vous êtes belle à cause de votre laideur. Mais vous n’êtes point laide : vous êtes une pierre, un vitrail, une flèche. Et moi je suis cet éclat qui vous manquait. Je vous aime comme un démon qui s’est fait Amour. Chartres m’a béni et vous m’avez maudit, tandis que j’ai prié.<o:p></o:p>

    Prié Christine…<o:p></o:p>

    Puis l’astre s’est levé, l’ange est apparu.<o:p></o:p>

    649 - La mort

    Lorsque claquera la Porte, s'ouvrira le grand show cosmique. <o:p></o:p>

    Effrayant, inouï ou intime et serein selon l'imagination, les craintes ou les espérances de chacun, le passage ne sera finalement qu'une formalité. <o:p></o:p>

    Au-delà de la pourriture, la Lumière. <o:p></o:p>

    L'atroce, l'immonde, l'épouvantable pourriture est l'ultime illusion à chasser, le dernier piège à éviter, la suprême insignifiance à mépriser. Une fois le cadavre sous la stèle, le spectacle doit continuer. Après les horizons bornés du temps, l'Éternité. Qui n'est rien d'autre que l'affranchissement de la conscience d'un cadre physique, matériel, la libération de l'esprit des limites d'une durée linéaire.<o:p></o:p>

    La mort est une aventure à vivre, une expérience unique à ne manquer sous aucun prétexte. La mort, voyez-vous c'est aussi l'humour.<o:p></o:p>

    Nos restes que dévore le ver et que corrompt la fange ne sont qu'inoffensives grimaces de la matière. Et le marbre recouvrant nos os, qu'un masque grotesque. Rien que des drôleries puantes. Pas de quoi élever des autels, et nul besoin non plus de les conserver dans des bocaux ou de les embaumer. Chaque destinée est un trésor autrement plus intéressant que ces puériles poteries funéraires. <o:p></o:p>

    Un homme qui meurt laisse tout derrière lui, c'est une banalité de le dire. Pourtant, la plupart des gens follement attachés à ce qui est périssable s'acharnent à accumuler passionnément des biens temporels. Peut-être à travers ces possessions ont-ils l'impression de prolonger, densifier leur existence... Châteaux et or, qui ne sont qu'assemblages d'atomes voués à de perpétuelles transformations et recyclages -même si c'est à l'échelle géologique-, châteaux et or disais-je contempleront du haut de leur immuable indifférence leurs maîtres lorsque ces derniers seront étendus au fond de leur cercueil. Envers ceux qui leur auront manifesté de chaleureuses affections, les objets se montreront bien ingrats à l'heure du grand départ...<o:p></o:p>

    Aussi, préférons un sage et relatif détachement à l'égard de la matière. S'enchaîner à ce fardeau de poussière, c'est s'embarquer pour le grand Ailleurs avec d'amers mirages. Le dépouillement matériel libère l'esprit, allège le coeur.<o:p></o:p>

    L'existence terrestre est l'apprentissage grandeur nature de l'Homme et sa dépouille en route pour le cimetière, le point limite entre deux extrêmes. Derrière, la misère. Devant, l'infini.<o:p></o:p>

    Nul ne connaît la mort, personne n'a jamais côtoyé le Mystère, aucun vivant ne peut dire un mot de ce qui se passe dans la tombe mais tous ont l'intuition d'un endroit sans limite. Même les plus sots, les plus noirs, les plus incrédules, les plus obtus, les plus lourds des esprits ont cette intuition.<o:p></o:p>

    La tombe n'étant que le promontoire de l'infini, répétons-le, le grand show doit continuer...<o:p></o:p>

    650 - La "Mère Vieille"

    On l'appelait ironiquement "la Mère Veille" (la mère qui veille), lorsqu'elle gémissait certaines nuits dans son fauteuil. <o:p></o:p>

    Ou plus méchamment "la Mère Vieille", à cause de ses rides hideuses.<o:p></o:p>

    La "Mère Vieille" était une de ces ombres décharnées issues de la fin du XIXième siècle qui ont traversé notre enfance et que plus tard nous évoquons avec une nostalgie mêlée d'horreur, nous la génération choyée née sous les ailes de l'opulence. Dans les années 1970, en effet, existaient encore de vraies reliques du siècle précédent -quasi centenaires- qui portaient en elles tout un monde révolu. Ces fossiles humains croupissaient dans les hospices : on pouvait les voir lors des sorties réglementaires aux abords de ces établissements de charité où ils avaient choisi -ou pas- de finir leurs jours.<o:p></o:p>

    Du plus loin que je me souvienne, ce fantôme continuellement agonisant dont j'ignorais d'ailleurs le véritable nom n'était qu'un pitoyable pantin de chair morte, une pauvre vieille femme sénile, une misérable rescapée de la tombe -laquelle semblait ne jamais parvenir à la happer parfaitement-, une morte-vivante oubliée du monde, reléguée dans un coin de l'hospice. Quand à cent ans et des poussières elle rendit l'âme, j'en avais dix. <o:p></o:p>

    Pour moi ce spectre catarrheux avait toujours été la "Mère Vieille" ou la "Mère Veille".

    Je me ressouvenais mollement de ce triste oiseau de mon enfance, l'autre soir avant de m'endormir. Dans mon demi-sommeil je me demandais dans quelles limbes avait bien pu échouer cet être plein de misère, trente ans après sa mort... Je m'endormis sur ces pensées.
    <o:p></o:p>

    C'est alors que je fis un songe étrange : je partais à la recherche de la "Mère Vieille".

    J'errais dans une nuit imaginaire pensant retrouver la vieille femme de mon enfance, quand un ange m'apparut. Je fus ébloui par son regard plein de force et de gloire. Son visage au sexe indéfini dégageait une noblesse inouïe. Il me demanda qui je cherchais aussi follement en plein rêve...
    <o:p></o:p>

    - Je cherche celle que l'on surnommait la "Mère Vieille" quand j'étais enfant. Qu'est devenue cette pauvre vieillarde malade dans l'autre monde ?<o:p></o:p>

    Éclatant dans son habit de lumière, l'ange me regardait toujours avec insistance, une flamme au front. Je répétai :<o:p></o:p>

    - Je cherche cet humain déshérité qu'on évoquait sans douceur jadis et que tout le monde a oublié aujourd'hui. Qu'est devenue cette pauvre âme ?<o:p></o:p>

    Sur ces mots l'ange dégagea un éclat de plus en plus intense.<o:p></o:p>

    Juste avant que je ne me réveille de ce songe troublant, dans un état de conscience suprême et fulgurant je saisis le sens et la profondeur de la réponse codée qu'il me fit :<o:p></o:p>

    - Je suis l'âme vermeille.<o:p></o:p>

    651 - Visite au Louvre

    Au Louvre deux mondes antinomiques se télescopent. Là-bas, l'Art -objet d'attention suprême, par essence affranchi des bornes de la médiocrité et de la pensée horizontale- nous est imposé à travers une structure policière ultra sécuritaire incompatible avec la Beauté censée incarner liberté de pensée, hauteur de vue, noblesse d'âme.<o:p></o:p>

    Caméras de surveillance innombrables captant tous les champs, violant tous les visages, badges à puces électroniques ostentatoires du personnel, cerbères armés aux allures agressives canalisant la foule, fouilles systématiques des sacs à l'entrée aux rayons X, tout cela finalement agresse l'esthète en quête de tranquillité et contribue à déshumaniser sa démarche voluptueuse. Le visiteur épris de hauteurs artistiques, dès qu'il passe le seuil du Louvre, a l'impression d'être l'hôte d'une geôle en or, infantilisé, obligé de marcher au pas dans les rangs, encadré "d'armoires" stressantes à l'oeil suspicieux, escorté par une véritable armada de systèmes électroniques et informatiques hyper sophistiqués... Voilà qui détériore les rapports humains ainsi que l'atmosphère de cet endroit dédié à la paix et au raffinement.<o:p></o:p>

    Ce régime totalitaire (d'inspiration policière et administrative parfaitement étriquée) à travers lequel sont accessibles les oeuvres n'incite pas les beaux esprits à la sérénité. En outre, en ces lieux hautains, prétentieux, l'on sent les effets infâmes de la vanité humaine : suprématie de l'argent, règne du luxe, dictature de l'apparence, promotion de l'intellectualisme creux, port du foulard Hermès, mépris de l'authentique esthète vêtu sans éclat mais hanté par le Beau... Aux antipodes des musées de province encore pleins de charme, de simplicité, d'humanité, voire de jovialité.<o:p></o:p>

    Au Louvre hauteur de vue artistique et réalités sécuritaires brutales sont indissociables.

    Noblesse de l'homme et bassesse marchande vont également de pair sous la pyramide de verre : l'Art est prétexte à faire pipi pour un euro, à boire un verre d'eau pour 1 euro cinquante, à faire payer de banales cartes postales deux euros, à se déplacer dans les galeries avec un chapeau sur la tête à cinquante euros... En fait les toilettes sont bien sûr gratuites au Louvre, ainsi que les verres d'eau, et on n'est pas obligé de porter de la soie pour passer pour un honnête homme. On ne paye rien de tout cela.
    <o:p></o:p>

    Mais c'est tout comme.<o:p></o:p>

    Une fois passée l'entrée éprouvante de cette caserne et achevée la quête du ticket d'entrée délivré par des machines serviables parlant un anglais international parfait, la chose la plus vulgaire à laquelle on peut assister au Louvre, ce sont ces éternels groupes de japonais abrutis au dernier degré qui dans un silence solennel se pressent les uns sur les autres, fiévreux, pour mitrailler... Est-il besoin de le préciser ? La Joconde et la Vénus de Milo.<o:p></o:p>

    Ce qui m'amène à penser que décidément l'Art n'est pas seulement un facteur d'élévation individuelle, il est aussi le révélateur de la suprême bêtise des masses.<o:p></o:p>

    652 - Rock'n'imbécile

    Depuis mon plus jeune âge j'ai toujours considéré le rock comme une musique primaire, ridicule, immature et bête conçue pour des auditeurs eux-mêmes primaires, ridicules, immatures et bêtes. Une musique propre à abrutir les foules dociles. Avec le temps, l'expérience, la sagesse, mon opinion s'est confortée dans ce sens.<o:p></o:p>

    La culture rock, puissant vecteur d'abêtissement des masses juvéniles, incarne le niveau zéro de l'intelligence, de la beauté, de l'élévation des coeurs, de l'éclairement des consciences. Violence, laideur, vulgarité, régression caractérisent cette musique de "singes contorsionnés", "d'ânes bêlants", de "perroquets hirsutes", même sous ses formes en apparence les plus inoffensives. Les messages traditionnels de cette musique sont des plus primaires, archaïques, voire franchement imbéciles : baisons, cognons, crachons, détruisons, haïssons (je caricature sciemment, quoi que la réalité puisse être bien pire..)<o:p></o:p>

    La sotte frénésie avec laquelle les foules en transe agitent le chef autour de leurs idoles bestialement grimées, le regard plein de ténèbres, un éclair infernal au front, la fureur aux entrailles, la guitare électrique en guise de phallus, sorte de sceptre hurleur défiant le Ciel, m'inspire les plus tristes sentiments. Mais aussi des réactions hilares...<o:p></o:p>

    Comment peut-on se laisser fasciner, manipuler, influencer, conditionner, endoctriner par cette musique tribale -pour ne pas dire infernale- issue des tréfonds du cervelet humain, déréglant sens, pensée, sentiments, exacerbant noirceurs de l'âme, corrompant tympans et sens de la modération, dénaturant l'homme en le faisant pantin simiesque ou chien aboyeur, détournant à son compte le sacré, inversant les valeurs fondamentales les plus nobles ? <o:p></o:p>

    J'ai toujours été frappé par l'apparence grotesque des chanteurs de rock. Avec leurs accoutrements ridicules ils sont bien les seuls à ne pas rire de leurs excès... Quant à leurs moeurs et excentricités, qu'elles soient simplement scéniques ou réellement adoptées, je ne vois qu'outrages, déviances, démence. <o:p></o:p>

    Rien de bien, ni de beau, ni de noble, ni de constructif.<o:p></o:p>

    Pour prendre l'exemple le plus anodin, le moins agressif, les Beatles, dieux vivants, ne sont à mes yeux que des ânes chantants. Certes ils chantent juste, connaissent les règles savantes de la musique, sont mondialement célèbres, mais ils ne font que de la musique rock en attendant, genre bête et crétin considéré à tort comme majeur. Le rock n'est à mes yeux ni plus ni moins qu'une musique inférieure, outrancière, voire bestiale et ouvertement destructrice, une musique de sinistres hystériques et de doux imbéciles à laquelle on a décerné des notes de noblesses.<o:p></o:p>

    Car enfin le reste, la déification des stars, les concerts historiques, les millions d'adeptes embrassant la cause, c'est juste la folie des hommes. <o:p></o:p>

    Ou leur bêtise.<o:p></o:p>

    653 - Eloge de l'insignifiance

    (En signe de protestation constructive aux vaniteux qui me reprochent une certaine "insignifiance", je leur propose ce texte qui glorifie ce qu'ils désignent subjectivement comme une tare. Pourquoi décréter sottement que l'insignifiance est une triste chose alors qu'elle fait partie de l'Homme, qu'elle participe aussi de sa grandeur, précisément parce qu'elle est humaine et qu'elle souligne la riche réalité des êtres multi facettes que nous sommes ?)<o:p></o:p>

    L'insignifiance libère le mortel du poids de l'existence. Elle affranchit celui qui s'y adonne des lourdeurs de son époque, des vanités de sa condition, des devoirs mondains.

    Se complaire dans le RIEN, le PEU, le DERISOIRE, c'est s'élever dans sa propre estime plus que dans celle des autres. C'est se regarder en face avec courage au lieu d'adresser à autrui ces sourires en forme de grimaces.
    <o:p></o:p>

    Exister à travers ragots, médiocrités, pitreries pitoyables, c'est renoncer à la mascarade officielle consistant à résonner plus fort que le clocher. Moi je me sens exister dans mes petitesses, petit à petit, détail après détail, instant après instant. Je ne rate aucune virgule dans le grand livre des phrases creuses et des mots vides de mon existence : je savoure les effets infinis du vent émis...<o:p></o:p>

    Le VENTEMI... Mot vide de sens qui coule comme une eau claire ! Le VENTEMI... Les EFFETINFINI du VENTEMI... Ça passe et ça fait passer des trains de vapeur, ça laisse des traits de fumée, des trous de brume, des traces de rosée. Ce rien avec lequel je remplis tout. Ce rien dont je fais le monde. Ce rien qui meuble et ma chambre et l'air, et ce texte et ma pensée. <o:p></o:p>

    Certains agitent l'air et appellent ça de la poésie. Moi j'appelle leur poésie du rien. Mais du vrai rien : du rien du tout.<o:p></o:p>

    Passe-temps vicieux des sans coeur qui se croient pleins d'amour pour le verbe, trop souvent la poésie leur fait croire à des merveilles en toc. Ils y croient dur comme fer, allant jusqu'à écrire à l'encre de Chine leurs mots immortels... Qui meurent sur place, sitôt séchés dans leur sillon de papier.<o:p></o:p>

    L'écran plat où s'affichent leurs états d'âmes oiseux, en connexion avec la planète entière, leur donne l'illusion de la profondeur. Serais-je le seul à ne pas me prendre au sérieux ? <o:p></o:p>

    C'est leurs regards lointains qui les rendent ridicules, ceux-là qui se prennent pour des plus que des "rien-du-tout"... Incapables de se voir posés sur leurs deux pieds, ils préfèrent voiler leur réalité avec de flatteuses fumées. Alors ils se donnent des pseudonymes effarants, des allures hallucinées... Ils s'imaginent des destins, des histoires, des mystères... Ils se conçoivent avec des artifices, singent les princes, portent d'étranges chapeaux... <o:p></o:p>

    Et après cela ils ont l'audace de me reprocher mon insignifiance dénuée d'atours, mon vide mis à nu, mon vent sans voile ! C'est que tous à travers leurs délires d'importance ont oublié l'essentiel : l'homme est un aussi fétu, un feu, un pantin.<o:p></o:p>

    Tout de paille.<o:p></o:p>

    654 - Un message de l'au-delà

    (Message mystérieux apparu sur mon écran d'ordinateur avant l'ouverture du système Windows, sur fond d'écran bleu)<o:p></o:p>

    Du séjour de ceux que vous appelez "les morts" je vous envoie ce message, moi qui fais partie maintenant de l'humanité à jamais ensevelie sous la tombe. J'appartiens désormais à l'immensité "dormante".<o:p></o:p>

    Votre monde captera les éclairs de ma pensée et selon que vous serez ouverts, insensibles, indifférents ou bien perplexes, vous croirez à un prodige, à un artifice, une illusion, à une aberration des lois naturelles, à un dérèglement de votre esprit, mais tout est simple, tout est clair depuis les hauteurs de l'au-delà. Proche du Mystère où à ma guise je peux faire agir les invisibles forces, je laisse tomber jusqu'à vous un infime rai de la Lumière. <o:p></o:p>

    Ne soyez pas effrayés par ces images qui apparaîtront au gré de vos songes, par ces annonces qui miraculeusement s'inscriront aussi bien sur la pierre, vos fronts et vos écrans que le sable des plages qu'effacera aussitôt l'écume... Qu'ils soient durables ou éphémères, écrits sur l'onde ou le granit, limpides ou codés, prenez ces signes comme les témoignages sûrs de ceux qui du haut de leur demeure suprême voient l'essentiel et, investis d'un pouvoir supérieur, envoient ces mots sur terre à l'heure où l'Humanité est mûre pour les recevoir. <o:p></o:p>

    Ne perdez pas de temps à résoudre des mystères qui n'en sont pas quant à la forme et au comment, l'important est ce que disent les messages, non la mécanique immatérielle, imperceptible qui vous les fait parvenir. Croyez-moi tout est facile et beau pour l'esprit, une fois élancé à travers le tombeau.<o:p></o:p>

    Quand vous brûlez un cierge, allumez une cigarette, crachez le feu ou allumez simplement votre cheminée et que vous voyez la flamme monter en forme d'oiseau, quand plus tard dans le ciel devant vous l'oiseau tourne pour former un cercle, quand aux hasards de vos lectures, de vos rêveries, de vos occupations domestiques ce cercle chemine et devient un zéro et lorsque finalement au gré de vos allées et venues sous le soleil de la réflexion le zéro vous suggère l'infini, et que ce mystère aux apparences anodines vous le voyez se graver sous vos yeux à travers un rond de fumée étonnant, un nuage qui s'arrondit ou un tourbillon de poussière furtif mais chargé de sens créant un cône dans l'air et dévoilant un astre sur le sol, c'est moi qui écrit, moi qui avec ma plume céleste vous dit combien l'aventure est fantastique !<o:p></o:p>

    Quand il vous semble que le vent vous adresse des mots humains, quand le sort vous fait des clins d'oeil inouïs, quand vos chemins vous mènent là ou vos pas ne vous auraient jamais menés, quand vous partez vers de sombres certitudes et que parvenez à de radieux impossibles, quand vous choisissez la nuit et que le jour vous éclaire, quand vous jetez un caillou et que vous recevez une étoile, un être omniscient est là qui vous parle, vous tend la main, un être qui hante les grandeurs cosmiques comme les moindres détails du quotidien, que vous voyez de mille façons différentes, toujours subtiles. <o:p></o:p>

    Et moi depuis mes sommets éclatants, plus vivant que vous ne le pensez, confirmant l'existence de cet être qui depuis toujours vous destine ses lueurs divines (que vous ne percevez pas nécessairement), je trace l'indicible réalité dans la matière pour mieux vous convaincre de ma glorieuse immatérialité. <o:p></o:p>

    Ni fantôme, spectre ou ombre, derrière la fosse où s'est achevé mon apprentissage terrestre, je suis VIVANT.<o:p></o:p>

    655 - Théâtre amoureux

    Christine,

    Votre silence me pèse, chère exilée, estimable morte, précieuse stèle. Avec votre visage fait pour charmer les peintres maudits et les poètes désespérés, vous êtes un tombeau gracieux et tendre, une porte ouverte sur des amours éternelles, sombres et exquisément morbides…
    <o:p></o:p>

    Je songe à vous dans le secret des jours qui passent, indolents. On me croit vide, insoucieux, léger… Je suis hanté par un amour étrange et beau dédié à cette statue éloignée que vous êtes… Vous la lointaine amante, idéale conception poétique, pietà aux traits élégiaques, bohémienne au front onirique, vous incarnez les hauteurs non académiques mais sincères de mon âme sensible aux causes suprêmes. <o:p></o:p>

    Les sommets inédits où j’ai accédé, porté par vos ailes funèbres, rejoignent les flèches du vaisseau chartrain. Mon olympe de marbre et de lumière, d’ombre et de gloire est situé à l’exacte intersection de l’amour et de la laideur, de la souffrance et de la beauté, de l’éblouissement et du vertige. Entre la fosse et l’infini.

    Sur le chemin des étoiles.
    <o:p></o:p>

    Chartres n’est qu’un prétexte, le symbole de ma quête esthétique et spirituelle : un trésor à portée de vue, la première marche vers l’horizon cosmique. Et vous Christine, vous représentez l’idéal de cet infatigable sybarite que je suis à la poursuite d’un mystère d’âpre beauté dépassant nos ordinaires conceptions temporelles. Voilà à mes yeux ce que vous êtes : un idéal. <o:p></o:p>

    Quasi christique. <o:p></o:p>

    656 - La mère Chapogne

    La mère Chapogne, t'es vieille comme une peau de momie, t'es sale, tu chiques et t'es complètement arriérée dans ton trou de province avec tes poules ! T'es qu'une affreuse sorcière du Diable, avaricieuse, méchante, teigneuse comme c'est pas possible, voleuse d'eau de pluie, rôdeuse des mares, « rapiéceteuse » de chaises, médisante comme une vipère, mais je t'aime bien quand même. Tu portes le même chapeau rapiécé depuis quarante sept ans, t'es jamais sortie de ton village depuis que tu y es née il y a quatre-vingt quatre ans, tu sais pas lire, t'aime pas les gens, tu nourris les rats de ta maison, mais ça empêche pas que t'as du charme la vieille. <o:p></o:p>

    T'entends la Chapogne ? Je t'aime bien moi, vieille chouette ! D'ailleurs t'en as une de tête de chouette, tu sais. Une vraie tête d'oiseau de malheur. Tu sens bon le foin et les bois la vieille. J'aime te voir revenir de la forêt, t'entendre râler toute seule avec tes fagots sur le dos. Tu mets du pittoresque dans la campagne. Tu es la compagne des corbeaux, une silhouette mauvaise sous la Lune, un chat-huant dans la nuit. <o:p></o:p>

    Tu parles patois et tu supportes pas les parisiens avec leurs manières. T'as raison la Chapogne. Des comme toi, y en a plus dans la campagne. T'es la dernière des ramasseuses de fagots. T'as pas l'électricité dans ton taudis, mais en hiver ta cheminée avec le feu qui chante dedans, elle chauffe jusqu'au fond des âmes. T'as du caractère la Chapogne. Avec ta canne noircie à la braise t'as remis plus d'un garde-champêtre à sa place dans ta carrière de voleuse de bois mort ! <o:p></o:p>

    Quand ça sera le jour où qu'y faudra te mettre dans le trou, avec ou sans le curé, promis j'irai cracher sur ta tombe comme y feront tous les autres au village qui t'ont jamais aimée. Mais moi je te garderai dans mon coeur comme la plus chère de toutes les chamelles de vieille fumure que la terre ait jamais portée ! T'es une vraie caillasse de vieille carne, la vieille ! Ha oui je t'aime bien la Chapogne. Même que t'es pas prête de crever, pas vrai ? C'est que t'es en pleine forme et que t'as encore sacrément envie de nous faire goûter à ta canne, hein la vieille ? Allez, le Bon Dieu y te donnera bien encore vingt ans avant d'aller t'envoyer bouffer du pissenlit par la racine. Le temps de bien emmerder encore toute une génération au village. <o:p></o:p>

    657 - L'élite des journalistes

    Les journalistes de l'Express, du Nouvel Observateur et du Point, qu'ils écrivent sur la politique, la culture ou l'économie ne sont jamais sérieux. <o:p></o:p>

    Je veux dire qu'ils sont peu réalistes. Le monde parisien d'où ils analysent le monde, leurs articles traités avec froideur et érudition depuis leurs bureaux feutrés, leurs allures "journalistiques", leurs affaires impérieuses, leur pensée aseptisée où toute considération locale, quotidienne, familière est bannie, tout cela fait croire que ces gens pressés sont dépourvus d'intestins et qu'ils ne vont par conséquent jamais aux toilettes.<o:p></o:p>

    Ils parlent d'Israël, de Chirac ou de l'Europe comme si leur vie n'avait de sens qu'à travers ces agitations "éclatantes". Comment prendre au sérieux de tels articles qui laissent sous-entendre que leurs auteurs sont des êtres "importantissimes" ne pouvant se passer de pondre des cocos aussi impératifs ?<o:p></o:p>

    Le journalisme a son élite, elle travaille chez l'Express, chez le Point et chez le Nouvel Observateur. Dans ces bureaux illustres où se croisent scribouillards et fronts télégéniques très actifs et très conscients de leur irremplaçabilité, côtoyant tous des hommes haut perchés, pardon ! haut placés, on doit se persuader que dans un tel contexte un cabinet de toilette n'a pas sa place.<o:p></o:p>

    Il est vrai qu'un journaliste de chez l'Express, Le point ou le Nouvel Observateur, ça ne chie que des papiers. <o:p></o:p>

    658 - Pourquoi je méprise les Napoléon

    L'ambitieux tyran a pour dessein de satisfaire son criminel ego. Il se croit grand alors qu'il est petit. En effet, lorsqu'il soulève des armées de paisibles jardiniers pour servir sa cause, il casse des oeufs pour ne faire aucune omelette... Il dérange des montagnes pour ses lubies mesquines.<o:p></o:p>

    L'empereur qui a des vues sur le monde sacrifie la vie de milliers d'individus dont pour certains les vues et l'intelligence englobent et dépassent ses petites réalités de despote. La force de l'empereur, c'est précisément qu'il a pour lui la force. Mais rien de plus. Les vues d'un Napoléon sont uniquement politiques, géographiques, historiques. Les vues de tel ou tel soldat enrôlé de force par ce Napoléon vont parfois bien au-delà de celles pour lesquelles il donne sa vie. <o:p></o:p>

    Lorsqu'un grand mathématicien, quelque beau philosophe, un chercheur ou un penseur quelconque pris dans l'étau de l'histoire se retrouve en train d'agoniser sur un champ de bataille napoléonien alors que dans sa tête se sont formées, inconnues du monde, des conceptions bien plus éclatantes, autrement plus élevées, plus durables et consistantes que les considérations temporelles et politiques d'un Napoléon postulant aux palmes militaires, l'absurdité des conquêtes impériales n'en est que plus intolérable. Un empire politique constitué sur les ruines de tels esprits, apolitiques eux, ressemble à une partie d'échecs ubuesque. C'est un château de pierre que l'on détruit pour le remplacer par un palais de sable.<o:p></o:p>

    De même certains politiciens voudraient faire nôtres leurs ambitions... Ils aimeraient que nous embrassions nous aussi la cause qu'ils défendent. Ce serait dans certains cas un bien grand gâchis que de détourner de leurs voies de beaux esprits, de rétrécir leur vue incluant des horizons plus vastes que le champ politique !<o:p></o:p>

    Sur la balance de l'esprit, quel intérêt à vouloir dominer le monde lorsque dans les rangs des soldats enrôlés pour la cause, un esprit dépasse ne serait-ce que d'un pouce les lauriers posés sur la tête de celui au nom de qui ces rangs ont été formés ? Mauvais calcul. Les Napoléon ont des vues brèves, tandis que la plupart de leurs victimes ont des vues de grande portée. Le déséquilibre est là. <o:p></o:p>

    Ubu a pour lui la force. Quant à la bêtise, c'est sa loi.<o:p></o:p>

    659 - Terrorisme étatique

    Certes les chefs d'états des pays les plus riches du monde qui s'étaient réunis au G8 de Londres arboraient des mines affligées tout à fait de circonstance devant les événements sanglants de la capitale britannique. J'ai attentivement écouté les brèves interventions officielles de Bush et de Poutine qui condamnent à raison le terrorisme.

    Tous deux pourtant pratiquent le terrorisme d'état, professionnel, légalisé et qui plus est, à l'échelle industrielle, terrorisme pudiquement appelé "gestion de crise" ou bien "opération de maintien de l'ordre". Le premier, en Irak. L'autre, en Tchétchénie. Tous deux assassinant, massacrant sans état d'âme un peuple, en tout cas s'attaquant à des populations civiles sans défense. Viols, destructions, enlèvements, tortures et assassinats en Tchétchénie. Meurtres de civils (femmes et enfants) en Irak, là encore pudiquement appelés "dégâts collatéraux". Sans compter que pour défendre sa cause pétrolière Bush n'hésite pas à exposer une catégorie de son propre peuple à la mort en envoyant des jeunes soldats yankees au casse-pipe.
    <o:p></o:p>

    (Poutine quant à lui, entre autres crimes à son actif, laisse mourir les jeunes hôtes d'un sous-marin accidenté -le Koursk-, en refusant l'aide des pays voisins pour une question de pure fierté nationale, affaire révélatrice de l'état d'esprit des têtes couronnées de ce monde qui condamnent le terrorisme islamique mais qui jouent aux échecs avec la vie de leurs hommes).<o:p></o:p>

    Trente sept mort dans le métro londonien, le bilan est terrible. Mais combien plus terrible est le résultat du terrorisme étatique, lorsqu'on compte plus de mille morts, rien que dans les rangs de l'armée US... Combien de milliers d'autres morts anonymes en Irak et en Tchétchénie à mettre sur le dos de ces deux dirigeant évoqués, si prompts à s'émouvoir devant les victimes "civilisées" du métro londonien ? <o:p></o:p>

    Les deux plus grands terroristes du monde que sont Bush et Poutine ont la chance d'avoir pour eux la loi, le pouvoir, ils peuvent en toute impunité perpétrer leurs méfaits à l'encontre des populations civiles, confortablement assis sur leur trône.

    Tous les terroristes sont à condamner, aussi bien ceux qui oeuvrent "au noir" dans le métro que ceux qui sont déclarés. Aussi bien ceux qui le pratiquent illégalement que ceux qui le font de manière professionnelle et dûment encadrée par la loi.
    <o:p></o:p>

    660 - Débilités cacaotées

    Victimes des clichés éculés d'un érotisme des plus poussifs, pour la saint-Valentin des gogos rigolards, bêtes et forcément méchants vont s'acheter au prix fort des mets au cacao dans des magasins spécialisés pour fêter dignement un des jours les plus commerciaux de l'année. Des mâles dopés au viagra vont se prendre pour de légendaires et d'irrésistibles Casanova sous prétexte qu'ils laperont la peau de leur femelle hormonée recouverte de crème de cacao, cet accessoire anodin étant bien évidemment vendu à prix d'or...<o:p></o:p>

    Aux pigeons en mal de jeux érotiques innovants, persuadés d'être plein d'imagination et de fantaisie, on peut vendre n'importe quoi à des prix luxueux : préservatifs à l'odeur de vanille, lubrifiants parfumés à la fraise, peinture au cacao... Toutes les débilités imaginables sont commercialisables, pourvu qu'on les pare d'artifices pseudo-érotiques sensés contribuer à l'épanouissement sexuel des "citadins branchés". Pour peu qu'on flatte habilement leur vide cérébral et qu'on transforme leur imbécillité congénitale en valeur mercantile, les "pionniers sexuels" de nos villes se sentant valorisés par ces produits faits exprès pour eux ne rechignent pas à débourser un maximum d'argent pour satisfaire leur "richesse érotique".<o:p></o:p>

    Les sots existent, Dieu merci ! Grâce à eux des commerçants futés peuvent s'enrichir sans grands efforts. La société est bien faite : les produits les plus superflus, les plus idiots et les plus faciles à concevoir sont vendus aux prix les plus élevés à une certaine clientèle. Mais pas n'importe laquelle, non... Cette clientèle fait non seulement partie de celle dont les saillies sont les plus faciles à régler, déclencher, planifier par prospectus publicitaires interposés, mais c'est aussi la plus aisée. <o:p></o:p>

    Ainsi tout le monde est content, acheteurs comme vendeurs. La société est vraiment très, très bien faite.<o:p></o:p>

    661 - Le "JT"

    On l'appelle très sérieusement la "Grand-Messe du 20 heures". Ou plus sobrement, plus imbécilement le "JT". <o:p></o:p>

    Le "Jité" pour les abrutis encore plus dociles que les autres.<o:p></o:p>

    Comme le hamburger mondialisé, la "Grand-Messe du 20 heures" est le modèle type de l'émission de télévision consacrée aux nouvelles, le standard international de la diffusion neutre et conviviale de l'information, dans un style plus ou moins calqué sur l'officiel et sérieux -et tout aussi aliénant- "TIMES".<o:p></o:p>

    Bref, la "Grand-Messe du 20 heures" est censée être l'aboutissement de la "pensée" dans le domaine de la culture télévisuelle. <o:p></o:p>

    Au "JT", le summum de la vulgarité s'affiche en costume-cravate. Les termes mêmes "Grand-Messe du 20 heures" forment une atteinte au bon goût. Ces mots sous-entendent que le téléspectateur perverti par le matraquage médiatique ambiant adhère sans résistance à ces normes qu'on lui impose en douceur par costume-cravate et ton neutre interposés.<o:p></o:p>

    Les présentateurs de ces cérémonies triviales et ineptes (journalistes coupables d'abrutir les foules avec leur discours formaté devenu LA REFERENCE en matière de communication publique dans l'inconscient collectif) s'y font un nom, deviennent "célèbres" pour des millions d'esprits passifs et peu exigeants. Montrer sa tête au "Jité" suffit pour devenir un être cher dans le coeur de millions de téléspectateurs... Ces journalistes sont admirés comme des dieux, des acteurs de cinéma, des héros mythologiques même ! Leur mérite ? S'adresser chaque soir à la grande étable humaine captivée par la plus formidable machine à abrutir les foules qui ait jamais été inventée.<o:p></o:p>

    Ainsi Patrick Poivre d'Arvor, minable petit journaliste ni meilleur ni pire qu'un autre et écrivain parfaitement insipide, Hugo des concierges, insignifiant, affligeant de nullité littéraire, sans le moindre talent, fait figure de héros contemporain chez le téléspectateur moyen... Les présentateurs des prévisions météorologiques, sous prétexte que leur image est contenue entre les quatre coins carrés de l'écran dans lequel il s'agitent avec des sourires lénifiants, sont adulés comme des princes. Les journaux télévisés et tout le cirque qui tourne autour transforment n'importe quels petits journalistes de province en Albert Londres. <o:p></o:p>

    En apparence seulement. Dans la notoriété, mais certainement pas dans le talent.

    Faire du journal télévisé la référence contemporaine en matière d'information, l'utiliser comme voie officielle, traditionnelle par laquelle s'exprime le Président de la République, c'est oublier que nul n'est censé posséder cet instrument diabolique destiné à avilir les foules, à faire taire la pensée, à niveler les sensibilités dans le sens des intérêts commerciaux.
    <o:p></o:p>

    Nul n'est censé non plus prendre connaissance dans les détails ou dans les grandes lignes des faits menus et majeurs agitant ou apaisant la planète, nouvelles rapportées à travers des prismes officiels toujours déformants. Information moulée dans un cadre occidental, définitivement figée dans son traitement, sa priorité et sa diffusion par les écoles de journalisme et par conséquent triée, reformulée, tronquée, exagérée ou aseptisée. En bref, ciblée de manière arbitraire, subjective, partiale, par les journalistes à la solde de l'esprit médiatique dominant, loin, très loin de l'authentique journalisme à la Albert Londres.

    Savoir que la terre tourne avec son lot quotidien de douleurs et de merveilles devrait suffire à l'information définitive de l'honnête homme. Le reste, les présentateurs de journaux télévisés, n'est que vanité. Les journalistes affichant leur face compassée sont des têtes en trop, des pantins convaincus de leur utilité, juste un bruit inutile qui s'ajoute au permanent brouhaha planétaire qu'ils s'ingénient à répercuter d'abrutis en abrutis, inlassablement, médiocrement, pathologiquement.
    <o:p></o:p>

    662 - Aux pornocrates du NET et à leurs associés

    Courrier postal envoyé à la société CREANET au 36, rue du Chemin Vert à Paris (01 48 07 59 14).<o:p></o:p>

    Madame, Monsieur,<o:p></o:p>

    C’est avec l’intention d’agir énergiquement contre ce que vous représentez que je vous adresse ce courrier. Vous n’ignorez pas que des pornocrates de toutes espèces, de la plus commune à la moins avouable, font appel à vos services pour envoyer à d’honnêtes internautes qui n’ont rien demandé des propositions malsaines et suspectes à caractère pornographique. Ce qui contribue de manière éhontée à la pollution des moeurs autant que des boîtes à lettres informatiques.<o:p></o:p>

    Mon association (512 membres) a pour but de combattre légalement non seulement les pornocrates du WEB, mais également leurs acolytes commerciaux. Les marchands de ces pitoyables services et produits sexuels sont moralement assimilables à des proxénètes. Ces individus douteux sévissant toujours dans le lâche anonymat, à travers l’association nous nous adressons en priorité à leurs suppôts, qui eux restent accessibles et peuvent par conséquent recevoir publiquement les fruits terribles de notre ire. <o:p></o:p>

    Le premier moyen de pression à la portée du citoyen responsable qui souhaite lutter efficacement contre les nuisances de ces minables oeuvrant dans l’ombre est d’envoyer une lettre d’avertissement à ceux qui, comme vous, s’associent à leur détestable commerce. Si à l’issue de ce premier courrier vous refusez d’abandonner votre vile collaboration avec ces pornocrates, ce qui est légalement votre droit, moi et mon association agirons par d’autres moyens plus coercitifs. Sous toutes les formes légales à notre disposition. <o:p></o:p>

    Le but : faire cesser la pollution pornographique sur le WEB.<o:p></o:p>

    Ma proposition est fort simple, à prendre ou à laisser : cessez de travailler pour cette faune en col blanc. <o:p></o:p>

    Forte de 512 membres actifs dont une bonne partie est particulièrement déterminée, l’association (non violente et respectueuse des lois républicaines) a une réelle capacité de mobilisation citoyenne. Une couverture médiatique à la fois locale et nationale, ainsi que le soutien de quelques élus courageux et de personnalités faisant autorité dans la lutte contre la pornographie nous permettent des audaces magistrales. Très négatives en terme d’image pour les sociétés comme la vôtre qui travaillent à la solde des pornocrates.<o:p></o:p>

    Cela dit vous avez également tous les moyens légaux à votre disposition pour tenter de contrer notre action si vous estimez utile d’entreprendre cette riposte symbolique.

    Je vous remercie pour votre attention et en dépit de ce grave différend nous opposant, vous prie de croire, Madame, Monsieur, à ma parfaite considération.
    <o:p></o:p>

    663 - Tentatives d'explications sur l'origine des SPAMS

    Afin de s'enrichir sur la bêtise de ses semblables, pourquoi ne pas imiter les spameurs et vendre en ligne des trucs débiles, des bidules grotesques, des machins insensés qui ont tous la particularité d'être chers, stupides, parfaitement inutiles ?

    Vaseline au goût de réglisse-menthe, Viagra bleu, orange, à pois, Xanax à 8,5, poudre d'escampette fluo, aphrodisiaques magiques à base d'extraits de peaux de bananes, boules de cristal en plastique, développeurs de pénis, strings comestibles, balais à chiottes électriques, médailles protectrices irradiées par les ondes supra-atomiques de grands marabouts et autres débilités du même genre doivent se vendre comme des petits pains sur le grand marché du NET, vues les sollicitations commerciales reçues quotidiennement par l'internaute moyen. Pour recevoir tant de ces publicités délirantes dans nos boîtes aux lettres électroniques, le filon doit marcher. Sinon les spameurs auraient arrêté leur business depuis longtemps.
    <o:p></o:p>

    A mon avis une minorité d'acheteurs très naïfs mais aussi très fortunés doit à elle seule faire vivre ce vaste marché... Le problème, c'est que je me demande si de tels imbéciles existent vraiment sur cette planète... Comment en effet peut-on être à la fois riche et sot pour risquer des centaines voire des milliers d'euros dans des achats aussi improbables, étant donné que les gens riches sont également des gens intelligents dans la très grande majorité des cas ? En général pour gagner assez d'argent au point de pouvoir se permettre d'en jeter par les fenêtres, il faut avoir autre chose que du fromage blanc dans la cervelle... Boursiers, hommes d'affaires, banquiers, financiers, avocats renommés peuvent se permettre ce luxe. Or je doute sincèrement que ces sommités brillantes et aisées, aussi futiles, aussi superficielles soient-elles, succombent à de telles imbécillités.

    Alors qui sont ces acheteurs de développeur péniens ou de lunettes à rayons Z servant à regarder à travers vêtements de soie et murs de béton, prêts à débourser des centaines, des milliers d'euros pour ces objets de dingo-débilitos-arriérés ?
    <o:p></o:p>

    Mystère.

    Personnellement je ne connais personne qui lise en bavant d'envie ces publicités affligeantes. Il y a peut-être une autre explication : les spameurs seraient en fait des parieurs insensés, des gens fortunés et désoeuvrés, complètement déments (ou sous l'emprise de drogues bizarres), qui s'amuseraient à inonder les boîtes aux lettres électroniques du monde entier avec leurs sollicitations invraisemblables, perdant temps et argent à essayer de convaincre des smicards ou des étudiants à dépenser 500 euros pour voir apparaître leur arrière grand-mère décédée dans une boule de cristal dernier cri ou pour devenir d'irrésistibles séducteurs grâce à des gouttes d'un produit magique à faire pénétrer par les oreilles. Et c'est à celui qui obtiendra la première commande. Si tel est le cas, le manège risque de durer encore longtemps. A moins qu'une bonne âme se sacrifie pour faire cesser ce pari stupide en envoyant à un de ces spameurs un chèque de 850 euros contre l'achat d'une souris d'ordinateur verte distributrice de capotes anglaises parfumée et auto-rétractables ou qu'il tape directement le numéro de code secret de sa carte bancaire pour recevoir en échange du débit de 412 euros et dix-huit centimes un magnifique porte-clés incrusté de rubis en formes de poissons rouges qui clignote dans le noir...
    <o:p></o:p>

    Je ne vois pas d'autres explication au phénomène de spameurs.<o:p></o:p>

    664 - Nouvelle tentative d'explication aux SPAMS crétinisants

    Une question me taraude quant au phénomène des SPAMS crétinisants :<o:p></o:p>

    Quel être humain assez sot, véritablement atteint d'imbécillité profonde, répondrait aux diverses sollicitations commerciales douteuses toutes plus clinquantes et débiles les unes que les autres vantant les mérites de maintes pilules miracles ou de je ne sais quelle poudre de perlimpinpin fluorescente ?<o:p></o:p>

    Tel charlatan en ligne promet de doubler la taille pénienne en quelques semaines grâce à des pilules révolutionnaires vendues "seulement" 200 euros la boîte... Un autre marabout à la pointe de la communication télématique jure par tous les diables à qui veut l'entendre, témoignages bidons à l'appui gros comme des caricatures de publicités pour lessives, qu'il a percé le secret des dieux du hasard et est prêt à céder sa "machine à trouver les numéros gagnants du LOTO" moyennant la modique somme de quelques centaines d'euros...<o:p></o:p>

    Les spameurs sont-ils en fait de simples malades mentaux doués pour l'informatique et n'ayant rien à faire d'autre de leurs journées qui s'amusent depuis leur hôpital psychiatrique avec Internet ou bien au contraire sont-ce plus curieusement des professionnels de l'escroquerie en ligne parfaitement sains d'esprit (si l'on peut dire) qui émettent leurs propositions commerciales spécialement conçues pour des internautes à la fois malades mentaux et ayant un certain pouvoir d'achat qui s'ennuieraient dans leur chambre d'hôpital psychiatrique ayant accès à Internet ? Conditions improbables qui donne une idée de la foi et de la patience incroyables de ces SPAMEURS... Autrement dit ces SPAMS seraient-ils ciblés uniquement vers ces personnes mentalement déséquilibrées ? En ce cas, et ce serait une explication plausible, ces commerciaux répandraient dans des millions de directions différentes leurs SPAMS dans l'espoir qu'une infime partie soit lue par ces malades mentaux enfermés dans leur asile... En effet, seuls les déséquilibrés mentaux étant susceptibles de répondre à ce genre de proposition d'agrandissement pénien par ingestion de pilules miracles vendues à prix d'or ou de gain au LOTO par le truchement d'une machine fort onéreuse destinée à émettre des numéros gagnants, je ne vois pas d'explication plus rationnelle au phénomène des SPAMS débiles.

    Stratégie pour le moins aléatoire de la part de tous ces SPAMEURS, certes... Mais qui doit certainement finir par payer à la longue puisque les SPAMS débiles continuent de fleurir sur les autoroutes virtuelles.
    <o:p></o:p>

    Une solution existe pour stopper définitivement le phénomène et libérer le NET de l'encombrement "spamique" : couper la connexion Internet dans les chambres des aliénés. Quand les débiles mentaux à la fois assez riches et assez organisés pour commander et payer en ligne leurs pilules d'agrandissement phallique ou leurs machines révolutionnaires à gagner au LOTO ne pourront plus répondre aux SPAMEURS et ainsi entretenir le phénomène, ces derniers finiront par se lasser.<o:p></o:p>

    665 - Le SIDA, maladie de l'âme

    A mes éventuels détracteurs,<o:p></o:p>

    Faites l'effort inhabituel de ne pas détourner les yeux de ce texte, de le lire jusqu'au bout, aussi vomitif soit-il pour votre sensibilité allergique aux propos prenant des apparences trop vénéneuses. Ayez cet héroïsme qui n'est ni de droite ni de gauche mais qui est simplement vertical.<o:p></o:p>

    Certes je ne dis pas que je suis un être donnant aux premiers abords l'impression d'être bon et altruiste. Je dis simplement que j'ose émettre le fruit de mes réflexions, outrancières mais sincères. Je ne m'appelle pas Marcel Dupont, je m'appelle Raphaël Zacharie de Izarra. Je ne suis ni de droite ni de gauche, je suis Izarrien.

    J'ai conscience de déplaire avec ce texte sur le SIDA qui n'a cependant pas la prétention d'être l'émanation la plus pure de la "Vérité Universelle", mais plus modestement d'être l'écho sans compromis de ma réflexion que j'estime encore assez pertinente et saine pour pouvoir publiquement l'exprimer sans que j'aie à en rougir.


    POUR LE DROIT D'EMETTRE UNE PENSEE DIFFERENTE, QUI N'EST NI INTOLERANCE NI HOMOPHOBIE POUR AUTANT
    <o:p></o:p>

    Je ne me suis personnellement jamais senti concerné ni par le SIDA ni par les dangers de la drogue ni par les accidents de la route le samedi soir après minuit. <o:p></o:p>

    Le SIDA dans nos pays riches est inadmissible car nous sommes trop civilisés pour mourir d'autres maladies que celles, plus traditionnelles, produites par l'obésité, l'excès de confort, de viande, de corps gras, de léthargie physique, morale et mentale. Ces maladies cardiaques, spirituelles ou hépatiques contractées au cours d'une vie d'habitudes honnêtes d'occidental moyen sont beaucoup plus acceptables que l'exotique SIDA qui lui tue sournoisement depuis les toilettes de discothèques, depuis les sordides bakrooms, depuis les emblématiques ghettos de sodomites, et surtout depuis les soirées "amicales" entre étudiants... <o:p></o:p>

    Le SIDA a été le révélateur de nos bassesses, de nos moeurs d'occidentaux dégénérés. Avec cette maladie nos dépravations privées ont été mises sur la place publique.

    Je n'ai jamais donné le moindre sou pour aider à lutter contre le SIDA. Je n'en suis ni fier ni honteux. Je ne me sens personnellement pas concerné, voilà tout. On nous dit qu'il faut aider la recherche parce que cette maladie peut frapper n'importe lequel d'entre nous. C'est la raison que les organisateurs de soirées charitables avancent pour susciter le don des citoyens. Hé bien moi je ne me sens pas concerné à titre individuel, je ne donne par conséquent pas d'argent pour la recherche contre le SIDA puisque le critère mis en avant est l'identification de l'homme de la rue aux malades du SIDA.
    <o:p></o:p>

    Il se trouve que je ne suis pas un "homme de la rue". Mais un honnête homme, un bel esprit, une âme d'exception.<o:p></o:p>

    Ai-je encore le droit dans cette démocratie où la part belle est faite aux plus insignifiantes, aux plus éhontées minorités, de me différencier par mes qualités et non par ma médiocrité, comme c'est le cas chez mes contemporains soucieux d'être acceptés à travers leurs déchéances étalées sans pudeur ? Puis-je encore être ultra minoritaire dans mes hauteurs ? Ou aurait-il mieux valu que je sois un sodomite patenté pour être unanimement reconnu dans ma différence ? <o:p></o:p>

    A l'image des bougres fréquentant les bakrooms du Marais, de Carpentras ou de Trifouillis-les-Oies revendiquant leur droit à se donner du plaisir entre pédérastes, je revendique la beauté de mon esprit, la grandeur de mon âme, la qualité de mon être. Là où le vulgaire sodomite est applaudi pour son courage d'avouer avec une particulière fierté l'involontaire différence sexuelle héritée de par sa naissance, moi je suis hué, conspué, raillé, voire taxé de "facho" parce que j'ai l'audace de dire que par acquis, par choix j'aime la Vertu, la Beauté, la Lumière. Tolérance à deux vitesses : les dénaturés et obsédés sexuels innés sont dans notre société mieux admis, reconnus, applaudis que les défenseurs de valeurs plus éthéréennes guidés par l'éclat de leurs esprit et non par l'instinct de leur chair.<o:p></o:p>

    Paradoxe : lorsqu'une minorité revendique des bassesses, elles est saluée. Lorsque une majorité met en avant des valeurs traditionnelles, elle est dénigrée. Dans ce second cas, le plus grand nombre ne fait pas loi dans notre étrange démocratie de jouisseurs et de ruminants en tous genres... Moi qui croyais naïvement que la démocratie c'était la loi du plus grand nombre, à l'image du vote où les 51 pour cent de OUI avaient nécessairement raison face aux 49 pour cent de NON... Je constate que la démocratie n'est en fait pas la loi du plus grand nombre, ou à défaut la loi du plus vertueux, du plus éclairé, du plus sage, mais tout simplement la loi du plus sot, du plus lénifiant, du plus pervers. <o:p></o:p>

    Ou même, comble du comble, la loi du plus petit nombre.<o:p></o:p>

    Petit nombre de grandes et belles âmes, en compensation ? Non. De préférence une minorité de corrompus, de dévoyés, de petits esprits.<o:p></o:p>

    Ainsi de nos jours il est interdit d'être NORMAL et de le revendiquer avec fierté et soulagement. Le terme NORMAL est devenu politiquement incorrect. Pour prendre un exemple concret et quotidien, devant les handicapés physiques ou mentaux les bien-portants n'osent plus se définir eux-mêmes comme des gens NORMAUX. <o:p></o:p>

    Il y a peu de temps encore il fallait remplacer le mot NORMAL par le mot VALIDE, moins offensant pour le handicapé qui se sentait alors rejeté, déconsidéré, nié dans sa triste différence. Le terme VALIDE était pourtant édulcoré, hypocrite, frileux à souhait, bref socialement assez correct pour être accepté à la fois par les malades et les bien-portants, aussi décérébrés les uns que les autres... Mais cela n'a pas suffit pour endormir encore plus nos cervelles déjà bien ramollies. <o:p></o:p>

    La sottise a donc progressé d'un cran : le terme VALIDE, voyez-vous c'est déjà dépassé. Aujourd'hui même le mot VALIDE doit être pris avec des pincettes supplémentaires. Des pincettes pour prendre d'autres pincettes, en somme. <o:p></o:p>

    A présent il est beaucoup plus correct, lorsque l'on n'est atteint d'aucune tare physique ou mentale, de se définir en des termes de plus en plus "courtois" : les gens VALIDES d'hier sont devenus des gens "DITS VALIDES".<o:p></o:p>

    Quand s'arrêtera la bêtise ambiante ? Décidément, le SIDA est une vraie maladie de l'homme, une maladie dans tous les sens du terme.<o:p></o:p>

    Je ne fustige nullement les faiblesses humaines en elles-mêmes ici, compréhensibles, mais le vice consistant à glorifier les écarts de conduite, à les étaler publiquement sans pudeur comme si c'étaient des vertus. <o:p></o:p>

    L'essentiel de mon discours se résume à ceci : <o:p></o:p>

    Je reproche aux homosexuels de naissance de s'être donné la peine de naître pour revendiquer leur fierté d'être ce qu'ils sont, tandis que moi je suis fier d'être ce que je suis non par le simple fait de ma naissance, mais par l'effort de mon esprit. <o:p></o:p>

    En cela je revendique le droit d'être respecté pour mon choix de vie et non pour les tares ou privilèges iniques hérités à ma naissance.<o:p></o:p>

    Je ne fais que modestement illustrer le discours de Beaumarchais à travers son fameux Figaro reprochant à son maître d'être simplement né maître et d'en tirer vaine fierté, alors que lui se targuait d'avoir de l'esprit.<o:p></o:p>

    Je n'appréhende pas le SIDA en termes de châtiment divin ou avec des frémissements vengeurs dans ma plume comme certains de mes détracteurs seraient éventuellement tentés de le penser, mais plus modestement comme la banale conséquence du hasard et aussi des comportements inconscients des gens. Je ne dis pas que c'est bien ou que c'est mal, je dis que c'est ainsi. Je ne dis pas non plus que c'est bien fait pour les infectés, au contraire je les plains et ne souhaite que leur guérison. Le SIDA tue de manière inique, certes. Mais de tout temps vivre signifie être confronté à la mort, et ce tous les jours. Traverser la rue comporte un certain risque mortel, celui de se faire renverser par un véhicule. Motorisé ou non. La vie comporte un certain nombre de risques ayant pour conséquence de la perdre, et souvent fort bêtement.<o:p></o:p>

    Le SIDA fait mal à nos sociétés sur-protégées car soudain la mort y surgit dans toute sa crudité, se répandant par voie lubrique et non plus par voie gastronomique, suicidaire, routière, alcoolique ou hépatique. En outre c'est une maladie que nous partageons avec les pays pauvres. Le seul point commun funeste que nous ayons avec eux. C'est cela qui nous est si intolérable. Les épidémies étaient encore acceptables dés lors qu'elles étaient traditionnellement cantonnées aux pays sous-développés. De même nous tolérerions beaucoup moins la famine si elle sévissait en Europe.<o:p></o:p>

    Le Sida a également la particularité odieuse de révéler nos comportements inavouables et écarts extra-conjugaux. Ca n'est pas un reproche que je fais, juste un constat, dénué de jugement. Je n'ai pas l'intention d'ailleurs de juger. Je suis plein de compassion pour les malades. Cela ne doit pas m'interdire pour autant d'émettre un son de cloche personnel. Je ne dis pas que le discours ambiant sur le SIDA est bien ou mal. Il est honorable, estimable, respectable.<o:p></o:p>

    Simplement ça n'est pas mon discours.<o:p></o:p>

    J'exige que l'on tolère ma différence. L'on tolère bien, et de manière excessivement complaisante encore, la différence revendiquée, clamée, sur-proclamée des sodomites et autres licencieux de tous bords. Que les tenants d'opinions opposées aux miennes portent sans faillir leur fardeau de contradictions et de vin mêlé d'eau, je porte mon fagot de bois vert de mon côté.<o:p></o:p>

    Je ne suis ni homophobe ni intolérant, bien au contraire. Je suis juste Raphaël Zacharie de Izarra, et c'est ça que l'on me reproche surtout.<o:p></o:p>

    (J'ajoute à mon texte deux réponses faites à divers détracteurs me reprochant la virulence et l'irresponsabilité apparente de mes propos.)<o:p></o:p>

    1 - Je ne maudis personne dans ce texte : je ne fais qu'exposer non sans un réel courage mes idées à propos du matraquage sur les moyens de se protéger du SIDA. Je ne maudis pas, je médis à raison me semble-t-il, à propos du discours actuel sur le SIDA. Je dis pour résumer mon discours, que le SIDA est une épidémie qui ennuie notre société parce que le SIDA ça représente la mort, mais que les catastrophes humanitaires permanentes qui ravagent les pays pauvres à travers famines, guerres, misère, c'est le SIDA puissance 10. L'attention est monopolisée aujourd'hui par NOTRE SIDA à nous, occidentaux, parce que ça nous touche. Une épidémie issue du tiers monde a pénétré notre sanctuaire de nantis, c'est "l'avantage" du SIDA, hyper-médiatisé. La mort, on ne fait pas tant d'histoires quand elle fauche loin de nos frontières. Il n'y a jamais eu de campagne de mobilisation nationale ni même mondiale pour lutter contre ce SIDA puissance 10 que représentent l'injustice, la famine, la misère au-delà de nos frontières lustrées.<o:p></o:p>

    Le SIDA est surtout une épidémie de riches (diffusée en partie à cause de nos moeurs corrompues, ajouterais-je), non pas qu'il n'existe pas dans les pays pauvres, mais c'est parce qu'il a touché nos pays d'obèses insatiables qu'il a tant de succès sur le plan médiatique. Et non parce que c'est une maladie létale de grande ampleur, tout simplement. Si le SIDA était resté cantonné aux pays pauvres, croyez-vous que l'on ferait autant d'histoires à son sujet ? Nous aurions continué d'ignorer égoïstement ses victimes. Aujourd'hui si on les prend en compte dans notre sensibilité, c'est uniquement parce que le SIDA est chez nous. Les médias ont largement conditionné les esprits pour persuader la population entière que l'ennemi numéro 1 de l'humanité c'est le SIDA, alors que ces mêmes médias n'ont jamais mobilisé les esprits pour lutter contre des fléaux autrement plus funestes que le SIDA quant au nombre de victimes.<o:p></o:p>

    A l'image des attentats de New York, dès que l'occidental moyen peut s'identifier à des victimes (qui lui ressemblent donc), il estime que la mort des innocents est injuste. Tant que les victimes ne sont ni sous nos caméras de télévision ni sous nos latitudes de repus, elles demeurent abstraites. Voilà le sens de mon texte sur le SIDA. Je prétends que le SIDA, ou plutôt les ravages qu'il occasionne dans le monde, n'est pas le fléau qu'il faudrait éradiquer en priorité. Or dans les esprits occidentaux, il l'est. <o:p></o:p>

    SIDA, épidémie frappant à la porte des riches. Misère, épidémie invisible.<o:p></o:p>

    2 - Votre analyse fort peu éclairée, visiblement influencée par le discours médiatique crétinisant me laisse plutôt penser chez vous au désir d'une forme de censure qui ne dit pas son nom... Je dis que le SIDA est une maladie de nantis égoïstes.

    Le SIDA puissance 10 a toujours existé dans les pays pauvres. Ce SIDA se nomme INJUSTICE, MISERE, FAMINE. On ne s'émeut que par ce qui nous touche directement dans nos pays de repus. Je dénonce le matraquage indécent fait autour du SIDA pendant que des victimes d'un SIDA bien pire en terme quantitatif meurent en silence dans le monde. Je ne me suis jamais réjoui du malheur des uns ou des autres, qu'ils soient riches ou pauvres. Je dénonce simplement le caractère douteux, suspect de ce matraquage médiatique à propos du SIDA. Ce matraquage médiatique permet de révéler des vérités peu flatteuses en ce qui concerne notre égoïsme endémique.
    <o:p></o:p>

    Les vrais ennemis de la vérité, ce sont les médias qui conditionnent habilement les esprits de façon à diriger, voire annihiler la pensée de chacun et ainsi contribuer à fabriquer une pensée de masse conforme, lisse, mensongère. Le SIDA est une grande manipulation médiatique orchestrée par des nantis effrayés à l'idée de "crever en baisant". Il y a des problèmes bien plus urgent (aujourd'hui comme hier) que le SIDA dans le monde. La misère fait plus de victimes sur terre que le SIDA. Je ne nie pas que le SIDA est un fléau, je dis que s'il fallait éradiquer un fléau en ce monde en priorité, ce n'est pas au SIDA qu'il faudrait s'attaquer en premier mais à la MISERE qui tue bien plus cruellement, en plus grand nombre et ce depuis bien plus longtemps que le SIDA.<o:p></o:p>

    C'est l'aveuglement à propos de cette vérité que je dénonce. C'est l'indécence de la situation que je condamne. Le SIDA, comme les attentats de New York, n'émeut que les gens manipulés qui ne croient qu'aux images télévisées qu'ils voient. En dehors du SIDA, pour ces atrophiés du ciboulot qui se croient des humanistes, le reste du monde est une vaste face cachée.<o:p></o:p>

    666 - Faiblesse d'esprit

    Dix ans après ses funérailles, dans la presse François Mitterrand est passé d'intrigant douteux à "homme hors du commun", "personnage extraordinaire"... Les journalistes s'en donnent à coeur joie dans le concert de louanges et la mythification de l'homme Mitterrand. Extraordinaire François Mitterrand ? <o:p></o:p>

    Foutaise !<o:p></o:p>

    Mitterrand fut Président de la République française, c'est tout. Le reste n'est que légendes, embellissements, histoires revues, déformées à travers un prisme sentimental bien consensuel. C'est que les années apaisent bien des amertumes dans le coeur humain, et en une seule décennie les pires défauts du "cher disparu" se transforment en "qualités exceptionnelles"... Sous la baguette magique du temps, François Mitterrand, mortel semblable à tous les autres, est devenu une sorte de prince de la République, un génie énigmatique, une légende historique...

    Dix ans après sa mort, ses mensonges les plus pervers ne sont plus que finesses politiques et pouvoirs de séduction ! Sa mégalomanie pharaonique n'est plus aujourd'hui que l'oeuvre désintéressée d'un "visionnaire" ayant "le sens aigu de l'Histoire"... Le culte odieux de la personnalité qu'il a insidieusement développé tout au long de ses deux septennats, en 2006 s'est transformé miraculeusement en panache de monarque. Légitime effet de la fonction que cette soif de grandeur architecturale, pensent en choeur ses anciens détracteurs... C'est même le signe des grands, ça ne peut pas tromper, n'est-ce pas ?
    <o:p></o:p>

    Comme le discours change vite en dix ans ! <o:p></o:p>

    De manipulateur machiavélique Mitterrand est devenu une sorte de de Gaule sauveur du pays, une espèce de Saint-Louis rédempteur, un genre de Roi Soleil qui nous en met plein la vue ! En dix ans seulement, le vice a été fait vertu. Curieux retournement de veste d'une presse unanime... Hier vénéneux, aujourd'hui comestible, le champignon Mitterrand avec son écharpe et son chapeau est une silhouette fédératrice, un réceptacle à glorifications. La mite est devenue un mythe. Ironique effet du temps sur nos défunts dirigeants...<o:p></o:p>

    Destin extraordinaire que la vie de François Mitterrand à en croire le discours ambiant ? Je ne vois rien d'extraordinaire au destin de Mitterrand. La preuve : il est mort depuis dix ans. Lors de la commémoration du dixième anniversaire de sa mort on a pu voir Laurent Fabius se ridiculiser publiquement en portant chapeau et manteau à la Mitterrand... Le couvre-chef de Fabius porté à la Mitterrand, nouvel attribut des "princes de la République" ? Singerie pitoyable d'un clown de l'Énarque qui ose se prendre au sérieux ! Et tout ça pour servir la cause ambiante, pour être dans le bon ton. Le maître-mot de tous ces rendeurs d'hommage : ne surtout pas égratigner la fable ! Tous constatant que la légende a plutôt bien pris, dégonfler la mayonnaise passerait pour une faute de goût. Nécessairement impopulaire.<o:p></o:p>

    Mitterrand ne fut qu'un pauvre type comme nous tous, un homme ordinaire, un simple mortel, un médiocre comme nous le sommes tous sans aucune exception. Cessons de sacraliser nos semblables sous prétexte qu'ils portent un grand chapeau ou qu'ils ont le pouvoir de lever des armées en bougeant le petit doigt ! Empereurs, rois, esclaves, vagabonds, alcooliques, ouvriers d'usine, PDG, hommes à deux têtes, à trois pattes, mathématiciens, balayeurs de rues, génies ou dingos : tous dans le même sac ! Rien que des humains, de simples mortels, des êtres imparfaits, faillibles.<o:p></o:p>

    Les hommages médiatiques rendus à François Mitterrand ne sont qu'un vaste cirque, loin, très loin de la vérité, de l'âpre vérité politique dépouillée de ces flatteurs, mensongers artifices.<o:p></o:p>

    667 - Le vent des élections américaines

    Raillons la grande exhibition des prétendus journalistes de la télévision qui, sous prétexte d'élections américaines, se mettent en scène de manière parfaitement déplacée !<o:p></o:p>

    Ces journaleux sans talent gominés comme des figurants de grosses productions hollywoodiennes gonflent l'information à l'extrême jusque dans les moindres détails, allant jusqu'à faire des reportages sur le fonctionnement mécanique des urnes, puis se prostituent interminablement à la cause ainsi créée, blatérant à l'infini, conjecturant sans fin sur ce que nous saurons dans quelques heures. <o:p></o:p>

    Ne craignant pas le ridicule, ils vont même jusqu'à se rendre sur place à New York avec toutes leurs équipes pour mieux "informer" les français en disséquant les élections... Quel que soit le vainqueur, cela ne changera évidemment rien à la vie quotidienne des 60 millions de français, mais tous ces journaleux pénétrés de leur importance font comme si l'ordre de l'Univers dépendait de l'issue de ces élections. Ils ont tous l'air tellement convaincus qu'aux USA se déroule en ce moment LE phénomène du siècle et que chaque français ne doit rien ignorer des moindres événements qui s'y passent !<o:p></o:p>

    Ces héros infatigables de la presse se sentent investis d'une mission. Epris d'idéal journalistique, poussés par le devoir professionnel, ils se sentent redevables de discours, d'explications, de reportages envers les populations qu'ils informent. Et en plus ils ne cessent de mettre en avant leur éthique !<o:p></o:p>

    Il y a une énorme différence entre le vrai journalisme et le vulgaire matraquage de cervelles. N'est pas Albert Londres qui veut.<o:p></o:p>

    668 - TF1, chaîne des minus

    Sur TF1, les jeux les plus ineptes ont acquis leurs lettres de noblesse. Les candidats rêvant de canapés en cuir et de téléviseurs avec écran plasma géant n'éprouvent pas la moindre honte à exhiber leur médiocrité, leur nullité, leur inanité à la France entière. Du moins à la France des millions de têtes beuglantes qui leur ressemblent et qui bavent d'envie devant les trésors vulgaires qu'on propose de faire gagner aux "sympathiques candidats" hilares et fébriles qu'ils incarnent...

    Les présentateurs de chez TF1 sont des abrutisseurs de foules, de parfaits ratés qui prennent leur revanche en aliénant des millions de leurs semblables. Minables animateurs de quinzaines commerciales recyclés dans la présentation de jeux télévisés, marchands de lessive dans l'âme, ces incultes aux moeurs béotiennes sont pris pour des petits dieux par ceux qui religieusement les font apparaître sur leurs écrans avec cette crétine délectation qui est la marque de l'authentique petit esprit, espèce commune particulièrement détestable directement affiliée à la gent bovine quant aux étonnantes aptitudes ruminantes.
    <o:p></o:p>

    Le petit esprit est en général un français moyen, un citoyen de base sans exigence ni hauteur de vue qui vingt fois par jour mérite de recevoir de salutaires coups de bottines au cul de la part des belles gens de mon espèce qui ont l'heur d'arborer dentelles fines et particule.<o:p></o:p>

    A la différence de ces minus pleins de mollesse et d'aspirations mesquines que je raille sans remords, je répands venin hautain et idées brillantes pour m'opposer avec énergie aux bassesses lénifiantes que diffuse criminellement la chaîne commerciale TF1. Eux, les petits esprits aliénés à la propagande "lessivière" de TF1, ne sont capables que de sourire à ces vendeurs de poudre à laver qui leur font les yeux doux... Pauvres animaux d'élevage qu'ils sont devenus, misérables bestiaux humains engraissés dans l'étable TF1 ! Je leur crache au visage un fiel distingué et corrosif issu du fond de mon âme éclatante, et cela a pour effet d'accentuer leur sourires d'imbéciles... Ils sourient de sotte béatitude, persuadés que leur bave de bovidés aura raison de mes crocs salubres. Alors je les laisse baver, baver, baver jusqu'à ce que la morve de leur pensée les ramollisse encore plus, avant de les noyer jusqu'au cou.<o:p></o:p>

    Ils ne souriront plus quand, tout gorgés qu'ils seront de viscosités cavicornes, je viendrai leur asséner l'ultime et fracassante vérité qui dans un sursaut de dignité les rendra à leur humanité perdue :<o:p></o:p>

    "TF1 ayant fait de vous les réceptacles dociles et bêlants de mes mots les plus durs, permettez qu'en outre je déverse sur vos têtes cornues le contenu copieux et odoriférant des chiottes de la pensée que promeut votre chaîne favorite afin que dans une vision fulgurante et rédemptrice vous voyiez en vous non seulement de placides bovins avides de granulés télévisuels, mais également de pauvres pigeons aux ailes couvertes de votre propre merde, cette merde vôtre quotidiennement malaxée et régurgitée par TF1". <o:p></o:p>

    669 - Les larmes des nantis

    (Attentats du 11 septembre 2001 : un texte contre le discours officiel mensonger et le matraquage médiatique à sens unique.)<o:p></o:p>

    On parle souvent "d'horreur", de "barbarie" quand on évoque les attentats terroristes du 11 septembre 2001 contre les tours géantes du Word Trade Center à New York...<o:p></o:p>

    Ce serait vite oublier les raisons qui ont amené ces attentats, en tous cas la situation économico-politique de l'Amérique du Nord.<o:p></o:p>

    Sans approuver pour autant ces attentats meurtriers et très spectaculaires contre le symbole obscène du pays le plus opulent, le plus gaspilleur et le plus égoïste du monde, je comprends parfaitement la colère des terroristes et la joie des pays qui ont applaudi ces "horreurs" comme les médias occidentaux se plaisent à qualifier ces événements, sans s'embarrasser de nuances. Horreurs ? Certes. Mais alors comment qualifier l'embargo sur l'Irak qui a duré 10 ans et qui a tué à petit feu, loin de nos caméras larmoyantes, des centaines de milliers de gens, enfants compris dont les survivants sont devenus rachitiques faute de soins médicaux et de rations alimentaires ? Ces innocents-là, bien plus nombreux que les innocents de New York, avaient le tort d'être irakiens, il est vrai. Pendant que les enfants de l'Amérique du nord devenaient obèses, les enfants de l'Irak rendaient l'âme jour après jour.<o:p></o:p>

    Quelle honte de commémorer avec des splendeurs martiales dispendieuses les victimes des attentats du 11 septembre 2001 et de passer en même temps sous un criminel silence les centaines de milliers d'Irakiens victimes de la barbarie américaine !<o:p></o:p>

    Sachant que les 300 millions d'américains qui représentent 4 pour 100 de la population mondiale consomment 25 pour cent des richesses de la planète, une journée pour faire tourner les États-Unis d'Amérique coûte des milliers de morts dans les pays pauvres. Une journée ordinaire aux États-Unis d'Amérique se paye à l'autre bout de la planète par des milliers de gens spoliés, écrasés, exploités, tués... Soit directement par fait de guerre (comme en Irak), soit indirectement par pillages, monopoles économiques et injustices interposés. Pour qu'un américain moyen puisse vivre selon les critères de décence et de confort en vigueur sous ses latitudes, il lui faut marcher sur la tête de 10 personnes habitant dans les pays pauvres.<o:p></o:p>

    La véritable barbarie n'est pas dans l'écroulement fracassant des tours de New York mais dans la face cachée, insidieuse des choses. La vraie barbarie est dans l'obésité de l'Amérique. C'est son excès de richesses (formant une authentique pornographie alimentaire), son arrogance martiale, sa suprématie mondiale qui ont provoqué l'écroulement des tours. C'est à cette ignoble vérité en priorité que devraient s'éveiller les consciences à l'évocation des attentats du 11 septembre 2001. Je ne me laisserai pas embrigader dans le grand cirque mondial consistant à commémorer 3000 victimes nanties, en ignorant éhontément les millions d'autres victimes déshéritées causées par les USA.<o:p></o:p>

    670 - La République des plus forts

    France, pays des Droit de l'Homme ? En théorie. La France est aussi historiquement une république d'esclavagistes, d'exploiteurs, de pilleurs, de massacreurs de populations africaines.<o:p></o:p>

    Nos frontons solennels, nos infrastructures fiables, nos avenues pleines d'éclat, ne nous cachons pas la face, ont été érigés sur les crânes fêlés de ces Nègres trop bêtes que nous avons pressés comme des citrons jadis, à qui nous vendons aujourd'hui notre armement à profusion. Source principale de revenus des pays occidentaux, le commerce des armes est une bénédiction pour la France ayant elle aussi gagné sa part du gâteau. Notre pays civilisateur se place en tête du marché mondial pour la qualité de son feu... La France, pays des Droit de l'Homme, recommande aux belligérants du monde entier de s'étriper au prix français. Ceci est officiel, intégré, reconnu, applaudi. Fierté nationale, le commerce des armes a permis à la France de s'enrichir dans des proportions inespérées.

    Beaux esprits, coeurs nobles et âmes justes, ne croyez pas aux vérités officielles de la France. Plus on monte dans la "dignité de la fonction", plus le drapeau est paré d'atours précieux, plus le mensonge est éclatant.
    <o:p></o:p>

    Ne vous laissez jamais endormir par les discours pompeux, lisses, idéalisés de la République Française. Les plus nobles déclarations de cette république pleine d'or et de puissance sont là pour faire écran à ses noirceurs érigées en vertus. Ainsi le colonialisme, la croissance par le commerce des armes, les conquêtes au son du canon, bref les pires fripouilleries trouvent de belles justifications dans la bouche de Marianne, autre invention perverse et puérile du système afin de figer dans le marbre les foutaises de la République Française. Gravée dans la pierre noble, n'importe quelle sentence banale ou absurde prend des allures olympiennes. Cousues dans un tissu rare, toutes les couleurs deviennent vertueuses, patriotiques, idéales. Le moindre imbécile discipliné pour peu qu'il porte un chapeau tricolore, une grande écharpe auguste ou des médailles bien usinées peut faire passer ses mensonges pour des vérités.<o:p></o:p>

     Il y a un droit suprême au pays des Droits de l'Homme, comme dans tous les autres pays nantis : le droit du plus riche, du plus fort, du plus roublard.<o:p></o:p>

    671 - Les bienfaits du bagne

    Je viens d'avoir une idée lumineuse pour lutter contre la criminalité, la débauche et la petite et grande délinquance : rétablissons le bagne. <o:p></o:p>

    Les prisonniers ainsi devenus bagnards ne se morfondront plus stérilement au fond de leurs cellules et se rendront utiles à la société. Mieux : ils oeuvreront au dédommagement des victimes tout en éprouvant les rigueurs de la loi, ce qui leur fera encore mieux passer le goût du vice. Plus ils travailleraient à indemniser leurs victimes, plus tôt ils sortiraient. <o:p></o:p>

    Au lieu de cela nos prisons actuelles sont des écoles du crime qui amollissent les moeurs et coûtent à la collectivité. Le bagnard non seulement ne coûte rien à la société des honnêtes gens, mais en plus il rapporte puisqu'il travaille -dans tous les sens du terme- pour sa réhabilitation. <o:p></o:p>

    Les prisons, écoles du crime et de la paresse sont remplies de oisifs qui songent parfois à la vengeance. Le travail des délinquants leur serait salutaire. La prison brise, détruit, corrompt les êtres en leur faisant perdre leur temps et n'indemnise aucunement les victimes. Le travail au contraire éduque, redresse, forme, répare, rend leur dignité aux assassins et autres agresseurs.<o:p></o:p>

    Évidemment il y aura toujours des faux humanistes pour crier à la régression des moeurs, à la perte des acquis humanitaires... Et c'est ainsi que nos prisons débordent de criminels oisifs nourris, logés, blanchis aux frais de la princesse. Personnellement j'aimerais mieux savoir mon agresseur en train de travailler pour me dédommager plutôt que de le savoir enfermé à ne rien faire car dans les deux cas, agresseur et victime sortent perdants de cette triste affaire.<o:p></o:p>

    A bas les prisons ! Vive le bagne social !<o:p></o:p>

    672 - Notre jeunesse, notre non avenir

    Je me suis rendu compte avec bonheur qu'avec l'âge je devenais franchement intolérant, invivable, bien plus asocial qu'avant. Un bon signe de mâturité : plus ça va, moins j'ai de chance de devenir sénile (la sénilité engendrant nécessairement la mollesse de la pensée).<o:p></o:p>

    En effet, je ne supporte plus de voir des conneaux assis aux terrasses des cafés la cigarette au bec, une bière à la main. Tous des étudiants formatés, des chiots pré-abrutis par les radios qui les gavent d'imbécillités musicales, tous des "rebelles" élevés au lait tiède de la télé-réalité, tous des écervelés condomisés, pilulisés, abreuvés de jeux vidéos, de "cinéma tout public", de Mac-Donald...<o:p></o:p>

    Et ça veut faire la loi, ça ce permet de l'ouvrir, ça a des revendications juvéniles ! Et tout ça pour dire quoi ? Pour nous baver sur les semelles !<o:p></o:p>

    Je ne supporte plus la proximité de cette jeunesse fumeuse, buveuse, dépucelée, libérée, discothéquisée, ensystémisée jusqu'à la moelle.<o:p></o:p>

    Quel que soit le bar où j'entre, il y a toujours de ces troupeaux de jeunes étudiants ramollis qui empestent mon air avec leur satané tabac, qui polluent mon cadre de vie avec leur présence importune. Je voudrais que le patron du bar les jette dehors quand j'arrive, afin que je puisse boire un verre en paix. Je ne supporte pas leur vocabulaire, leurs moeurs, leurs aspirations. Tous semblables dans l'avachissement mental, tous des petits clones reproduits à des millions d'exemplaires, marqués aux fers indolores d'une industrie dévouée qui leur dicte quoi manger, quoi boire, quoi fumer, quoi faire. <o:p></o:p>

    Vrais veaux de batteries à peine sortis de la puberté et déjà traités à l'extasie, au hachich, au coca-cola, alcoolisés, médicamentés, sur-infectés mais sous-cultivés, petits lapins de laboratoire fabriqués, modelés, façonnés par les grandes marques, ces jeunes esclaves illettrés portent haut l'étendard de leur chère "liberté de pensée" ! C'est devenu des produits et ça croit penser ! Génération d'intoxiqués qui ne savent plus écrire le français correctement, ces fainéants d'étudiants infectent Internet avec leurs messages illisibles rédigés en texto. Et ça prétend aux études !<o:p></o:p>

    Mais ce que je supporte décidément de moins en moins chez eux, c'est leurs foutues cigarettes. Un jour je me vengerai. J'entrerai dans un bar, m'assiérai à côté d'eux. J'allumerai un cigare de ma composition, le plus infâme possible, écoeurant à souhait, et cette fumée-maison infecte à donner la chiasse au Diable, avec une délectation rancunière, lentement, impunément, effrontément, je la leur cracherai à la face !<o:p></o:p>

    673 - La mort de l'ourse Cannelle

    Un ours de plus ou de moins dans les Pyrénées, quelle importance au regard de l'écologie planétaire ? Le problème est plus dans les têtes conditionnées par l'air du temps, réglées sur des valeurs à la mode, que sur le terrain. Pendant un siècle la Terre a fort bien tourné sans les ours dans les Pyrénées. En quoi l'absence de ce prédateur a-t-elle empêché les gens et les autres animaux de vivre ? Au contraire, combien de vies humaines ont ainsi été épargnées dans les Pyrénées depuis la disparition de l'ours ? L'avantage de sa disparition est réel, tout comme est réel l'avantage de la disparition du loup de la totalité de notre territoire.

    Un siècle après la disparition de l'ours des Pyrénées l'Homme a voulu le réintroduire dans son ancien habitat. L'échec fut total. Selon certains, cet échec serait le prélude à une sorte de fin du monde, juste parce qu'une ourse n'a pas survécu à sa nouvelle condition d'animal sauvage... (Remarquons au passage que cette liberté d'artifice l'a tuée, alors que la cage l'aurait sauvée.) Bref, d'après les écologistes ce serait une catastrophe... Allez donc dire ça aux gens qui souffrent la faim dans les pays pauvres ! Soyons sérieux, et surtout faisons preuve de décence car les vraies catastrophes sont ailleurs en vérité.
    <o:p></o:p>

    Pendant un siècle il n'y a pas eu d'ours dans les Pyrénées. Où est-elle cette prétendue catastrophe longue de un siècle? Je ne suis pas anti-écologiste, bien au contraire. Seulement je défends les vraies causes écologiques sans me ranger aux côtés de ces parisiens épris de jolis sentiments par pure sensiblerie, qui pensent avec les fibres les plus légères de leur coeur citadin, incapables qu'ils sont d'analyser les situations sur le terrain. <o:p></o:p>

    Certaines bonne âmes se lamentent sur le sort de l'ourse Cannelle tuée par un chasseur de manière anecdotique, et qui plus est tombée proprement, nettement sous ses balles, mais je ne les entends nullement élever la voix concernant le sort des millions d'animaux que nous torturons industriellement, que nous massacrons sans aucune pitié dans les abattoirs, véritables camps d'exterminations pour volailles, ovins, porcins, bovins, lieux absolument indignes de gens civilisés ! Et tout ça au nom de nos estomacs de nantis infoutus de s'abstenir d'ingérer de la viande. Alors que l'homme pourrait fort bien s'en passer et vivre en meilleure santé en remplaçant la viande par des protéines issues de produits non carnés (laitages, végétaux, oeufs, poissons). <o:p></o:p>

    Il n'y a pas de progrès véritable sans rupture avec certaines habitudes ancestrales. Le problème de l'ours des Pyrénées a surtout valeur de symbole. Dans les faits, l'ours est un problème insignifiant au regard des abattoirs qui sont des lieux d'abomination extrême. Là, à un rythme industriel on met fin à l'existence de millions d'animaux (élevés en batteries dans le pire des cas). Remarquons que la mort de l'ourse Cannelle émeut surtout les "parisiens" carnassiers au coeur de porcelaine. Ils ont certes des moeurs délicates, mais aussi des palais fins, des estomacs avides de chair animale...<o:p></o:p>

    Le comble en ce cas, n'est-ce pas de se désoler avec des trémolos dans la voix -et la bouche pleine- de la disparition de l'ours des Pyrénées ? Se désoler en plein dîner du sort de l'ourse tuée par un chasseur, se désoler de la sorte autour d'un gigot d'agneau ou d'un pot-au-feu, quelle ironie ! Perversité inouïe des moeurs écologiques !<o:p></o:p>

    Avant de vouloir faire évoluer les mentalités en visant les sommets, commencez par le bas, vous les défenseurs de belles causes. Allez d'abord répandre l'idée que les abattoirs industriels sont des abominations, au lieu d'aller stérilement voler au secours d'un individu dont l'espèce est de toute façon en voie d'extinction. Faites-vous végétariens. Allez militer pour l'abolition des abattoirs. Allez manifester contre la puissante institution bouchère. Là vous serez cohérents, là vous serez héroïques, là vous ne serez pas vain. Laissez donc de côté votre ourse Cannelle, allez plutôt brandir des pancartes dans les abattoirs, les boucheries industrielles et artisanales. Vous y délivrerez un vrai message écologique.

    Et relativiserez la mort de l'ours Cannelle, soyons-en persuadés.
    <o:p></o:p>

    Je ne suis pas animé par la sensiblerie citadine mais par de vrais sentiments de justice, par une pensée lucide, pénétrante des problèmes liés à l'écologie, à nos rapport avec la gent animale. Imaginez que l'espèce en voie d'extinction réintroduite dans son ancien élément naturel ne fût pas l'ours des Pyrénées mais le mulot commun de nos plaines... Monteriez-vous ainsi au créneau pour défendre ce minuscule rongeur ? Lui n'a pas l'avantage, au contraire de l'ours, d'être gros donc visible à l'échelle humaine, et surtout il n'inspire pas le même degré de sympathie chez les humains, ce qui est un facteur parfaitement arbitraire. Donc injuste. Ce que vous feignez d'ignorer, me semble-t-il, vous les défenseurs de l'ours des Pyrénées. L'ours a pour lui d'être gros et touchant. Il a ses doubles en peluche dans notre mémoire collective. Le mulot lui n'a pas cette place de choix dans le coeur des hommes. Abolissons d'abord ces espèces de privilèges accordés aux animaux, rendons-les égaux devant la souffrance qu'on leur inflige, ensuite vous pourrez me reparler de votre ours des Pyrénées.<o:p></o:p>

    674 - L'ours contre-nature

    L'agitation ridicule autour de l'ourse Cannelle tuée récemment est significative de l'état d'esprit de notre société prompte à s'émouvoir pour des phénomènes spécifiques qui collent à l'air du temps, aussi minuscules soient-ils. A l'échelle locale et planétaire les conséquences de la disparition de l'ours des Pyrénées sont insignifiantes. Les seuls dommages sont d'ordre symbolique, politique, psychologique, culturel, mais certainement pas écologique. En somme, une "catastrophe" très artificielle, grossie au point que des millions de citoyens en France dans le monde se sentent concernés par la mort de Cannelle... Quand la multitude d'âmes sensibles (se délectant par ailleurs de viandes bouchères issues des ignobles abattoirs) se désole de la disparition du plantigrade, je me chagrine de constater avec quelle facilité on peut contaminer les esprits sur des sujets aussi dérisoires que la disparition du dernier représentant d'une espèce animale en voie d'extinction. <o:p></o:p>

    Le règne animal comme tout ce qui existe en ce monde n'est pas figé, il est en constante évolution. Le changement est dans l'ordre normal des choses. Toute espèce est vouée à disparaître un jour. Lentement ou sous l'effet de forces majeures. Les forces majeures (poussée de la civilisation, accidents, pollutions) sont aussi une forme de sélection naturelle, que ces forces dominantes soient générées par l'Homme ou par les volcans. Non seulement l'Homme fait partie du monde, mais il est également à son sommet. Il n'y a pas que les cailloux et les quadrupèdes qui font la loi sur Terre, n'en déplaise aux écologistes qui ont tendance à négliger la légitimité de l'espèce humaine dans les changements du milieu naturel. Qui oserait prétendre que les rats, les moustiques, les blattes ont un droit de nuisance sur l'Homme sous prétexte qu'ils sont la Nature ?<o:p></o:p>

    Nature et urbanisation sont des réalités faisant partie de ce monde. En quoi l'urbanisation, la civilisation devraient être sacrifiées à la cause de l'état    sauvage ? Au contraire, la ville est vertueuse, l'ours nuisible. La preuve dans les faits et l'actualité : l'Homme avance, l'ours recule. <o:p></o:p>

    En dépit des efforts de l'Homme, créature intelligente aux idées baroques, l'ours des Pyrénées ne s'enracine décidément pas dans ce qui fut jadis son milieu (et peu importent les causes de cet échec : accidentelles ou naturelles, elles sont significatives)... Preuve qu'il n'a plus sa place dans les Pyrénées. <o:p></o:p>

    On peut certes le déplorer, mais c'est ainsi. <o:p></o:p>

    Réintroduire l'ours dans les Pyrénées, dans quel but ? Même la gratuité du geste ne paie pas dans ce monde réglé sur des lois souveraines. Les bonnes âmes en ont d'ailleurs eu pour leurs frais... Douce folie que de s'acharner à replanter une racine brisée ! De même, ne serait-il pas ridicule de regretter la disparition des dinosaures ? Quel sens y aurait-il à réintroduire en 2004 les meutes de loups dans les forêts autour de Paris ? Fondamentalement la disparition de Cannelle a peu d'importance. Le règne du vivant est influencé par les forces dominantes : les astres font les marées, l'Homme fait les courants. Le phénomène de la sélection naturelle dans lequel l'Homme est intimement inclus opère et jouit aujourd'hui de tous ses droits en venant d'éliminer l'ourse Cannelle, avatar monstrueux de notre vision du monde "plantigradiste", "lycanthropiste", "dodoïste".<o:p></o:p>

    675 - Drame au collège

    A travers cet article imaginaire à peine caricatural, ironisons sur les aberrations et excès de notre société contaminée par l'insidieuse dictature de la "pensée molle" (phénomène largement relayé par les médias) contribuant à créer une sensibilité de masse embourgeoisée, irresponsable et superficielle.<o:p></o:p>

    Le jeune Benjamin, obèse adolescent de 14 ans, a bénéficié des services d'une cellule de soutien psychologique après un traumatisme subi dans l'enceinte même de son collège : il a été victime d'une réprimande de la part de son professeur de français sous prétexte qu'il perturbait le cours en jouant sur son téléphone portable. Le professeur lui reprochait en outre d'envoyer des mails et d'écouter de la musique sous forme MP3 en classe via le téléphone portable en question. L'enseignant, après une garde-à-vue prolongée a finalement été mis en examen pour avoir sonné les cloches de l'élève dissipé. Il aurait agité la main en l'air en direction de l'élève dans un signe explicite. La menace est légalement constituée.

    Une gifle symbolique qui risque de lui coûter de six à dix-huit mois de prison ferme.

    Une enquête a été diligentée par les services de police judiciaire au sein de l'établissement afin d'établir les responsabilités de chacun, du professeur indigne jusqu'au directeur du collège, responsable d'avoir engagé ce professeur aux méthodes pédagogiques pour le moins douteuses.
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    Par ailleurs, détail pouvant aggraver lourdement les faits reprochés au professeur de français pour la suite de cette affaire, après perquisition à son domicile, les enquêteurs ont retrouvé dans la chambre du professeur incriminé une série de photos de vacances dont sur l'une on peut distinguer sans ambiguïté à l'arrière plan un enfant en maillot de bain âgé d'environ cinq ans. Des soupçons de pédophilie pèsent désormais sur cet homme aux méthodes d'enseignement musclées... Des vérifications sont en cours actuellement afin d'identifier la petite victime sur la photo. Le passé trouble de cet individu est en train d'être décortiqué par les enquêteurs dans les locaux de la police judiciaire.<o:p></o:p>

    En attendant les résultats de l'enquête, Benjamin a préféré poursuivre ses cours par correspondance. Il peut aujourd'hui jouir en toute quiétude de son droit à l'accès à la communication grâce aux multiples fonctions de son téléphone portable, sans s'exposer au risque d'être brutalisé par des adultes peu scrupuleux.

    Souhaitons à Benjamin de pouvoir se reconstruire sans trop de séquelles après la dure épreuve qu'il vient d'endurer. Il sera prochainement l'invité vedette de la célèbre émission télévisée animée par Mireille Dumas qui débattra pour l'occasion sur le sujet des sévices corporels et psychologiques subis à l'école par les élèves de la part de certains professeurs particulièrement pervers. (Benjamin témoignera sur le plateau de MD à visage couvert). Une honte pour notre société, une dérive tragique qu'il faut dénoncer à tout prix. Triste époque où les professeurs osent encore lever la main sur nos chères têtes blondes sous les plus légers prétextes ! Un projet de livre est actuellement en cours : un directeur de grandes éditions a d'ores et déjà pris contact avec l'avocat de Benjamin afin d'obtenir les droits pour la publication exclusive de ce témoignage-choc. L'ouvrage pourrait être en vente dès la rentrée littéraire de septembre prochain.

    (Dans le souci de préserver le droit à l'anonymat de la victime et de ne pas faillir à l'éthique de notre rédaction, précisons que "Benjamin" est un prénom d'emprunt.)
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    676 - Les flammes de la raison

    Il me semble que la crémation des moyens de locomotion généralisée dans les banlieues du pays est le signe d'un grand bouleversement social, un mouvement de fond qu'une stupide répression policière ne saurait éteindre. Je ne cesse d'entendre que brûler des voitures, ça n'est pas une solution pour résoudre les problèmes des jeunes de banlieue...<o:p></o:p>

    Justement, je pense que c'est une solution. Sans ces heurts spectaculaires (toucher à la tôle sacrée du français moyen, ça choque toujours l'opinion publique sensible à la préservation de ses joujoux favoris) comment faire avancer les choses, faire prendre conscience aux privilégiés des centres villes et des campagnes de la gravité de la situation dans les banlieues ? Brûler des voitures est, à mon sens, la meilleure solution pour faire bouger les choses, contribuer à faire changer les mentalités, secouer les consciences endormies. Brûler une voiture est certes répréhensible sur le plan strictement légal, mais c'est précisément avec ce genre de geste illégal, acte fondateur par excellence du pionnier social participant au progrès humain, qu'évoluent nos sociétés. <o:p></o:p>

    Mieux vaut faire une révolution en brûlant des voitures plutôt qu'en portant des têtes coupées sur des piques. Brûler des voitures est par conséquent un acte potentiellement héroïque, pour peu que cela débouche sur une amélioration de la vie des révoltés, une capitulation du pouvoir qui reconnaîtra par la suite la révolte comme un légitime soulèvement des banlieues contre l'injustice sociale. <o:p></o:p>

    C'est ainsi qu'évoluent les mentalités, que se fait le progrès social : en pratiquant la désobéissance civile, en manifestant illégalement contre le pouvoir. Aujourd'hui conspués, demain qui sait si les brûleurs de voitures ne seront pas honorés par les mêmes qui les condamnent actuellement ? Comme les porteurs de têtes coupées de 14 juillet 1789 sont de nos jours acclamés. La crémation des voitures de banlieue, c'est leur 14 juillet à eux. Leur révolution est en marche. C'est en se rebiffant de la sorte contre l'ordre social inique que progresse toute société. Aujourd'hui les mentalités ont évolué, dans sa grande majorité le peuple ne verse plus le sang pour se faire entendre, il brûle des voitures, brise du mobilier urbain. N'est-ce pas déjà un énorme progrès par rapport aux révoltes barbares du passé ? De nos jours même les plus enragés des insurgés des banlieues respectent la vie humaine. Plus civilisés que nos aïeux, ils se révoltent avec les moyens appropriés à leur portée : l'incendie de voitures. Où est leur crime ? Leur combat me semble parfaitement légitime. A leur place, ne réagirions-nous pas de    même ? Pour avoir vécu dans la banlieue et côtoyé un peu ses habitants, je comprends leur révolte. <o:p></o:p>

    Vive la révolution, vivent les âmes éveillées !<o:p></o:p>

    677 - Appel à l'insurrection des banlieues !

    Ému par la gravité et le caractère révolutionnaire des événements sociaux qui ont agité le pays, je m'adresse aux "fauteurs de troubles" en termes solennels. <o:p></o:p>

    J'en appelle à la poursuite acharnée de la rébellion, à la résistance héroïque face à l'oppresseur étatique. Cependant, convaincu que pour être légitime -tant sur le plan éthique que politique- le droit des populations au soulèvement contre l'injustice sociale doit s'établir sur des fondements moraux élevés, les moyens mis en oeuvre pour parvenir à cette fin ne doivent pas contredire cette exigence morale. Aussi je m'en remets aux bonnes volontés et incite les insurgés à abandonner leurs méthodes archaïques. Violence et bris de biens publics et privés doivent être proscrits au profit d'une attitude résolument pacifique et non-violente. Mais toujours ferme, déterminée. Je propose de grandes marches pacifiques avec encerclements des établissements républicains sensibles tels que Palais de l'Élysée, Préfectures, postes de police. <o:p></o:p>

    Pacifique, cet appel à l'insurrection n'en demeure pas moins réel. <o:p></o:p>

    Marches militantes et sièges des établissements publics non-violents mais éminemment séditieux, hautement subversifs. Le pouvoir doit fléchir sous la volonté souveraine du peuple. Tant que les décideurs aux commandes de l'État n'auront pas capitulé face au souffle juste de la révolte populaire, j'engage à la persévérance, voire à l'entrée officielle ou clandestine en résistance des éléments les plus combatifs, les plus braves selon la tournure que prendra le soulèvement, et ce afin de faire triompher la cause. Je rappelle avec insistance que les moyens engagés pour poursuivre la lutte, qu'ils soient individuels ou collectifs, officiels ou clandestins devront toujours être non-violents, pacifiques, respectueux des biens et de la sécurité d'autrui.<o:p></o:p>

    Courage camarades, la victoire est au bout de la rue ! Le peuple vaincra ! Vive la révolution, vive la justice, vive la liberté !<o:p></o:p>

    Raphaël Zacharie de Izarra, Le Mans, le 10 novembre 2005 <o:p></o:p>

    678 - Triste commémoration de la guerre

    Les morts du conflit mondial de 14-18 n'ont pas héroïquement donné leur vie pour la liberté, ils sont morts parce qu'ils étaient obligés de marcher avec le troupeau, sous peine de passer au peloton d'exécution. L'héroïsme patriotique est une funeste invention, une macabre farce inventée par les marchands de canons et les gouvernants pour mieux mener à bien leurs grandes parties d'échecs planétaires. Leurs pions étant les petits soldats disciplinés pétris de culture patriotique nécessairement caricaturale et mensongère. Ce qui fut particulièrement le cas lors de la Première Guerre Mondiale de 1914-1918.<o:p></o:p>

    Ce qui reste aujourd'hui de cette grande manipulation, ce sont quelques milliers de rendeurs d'hommages disciplinés qui se gèlent chaque matin du 11 novembre pour regarder hisser le drapeau tricolore, droits comme des piquets, alors qu'il seraient si bien à rester au chaud dans leur lit.<o:p></o:p>

    Certains clament que parce qu'ils se sont comportés en patriotes, les morts de la 14-18 méritent le respect national... Certes, à condition que le patriotisme soit une valeur estimable. Or qu’est-ce que le patriotisme sinon la préférence égoïste pour ses compatriotes dans le meilleur des cas, la haine des étrangers dans le pire des cas ? L'honnête homme est citoyen du monde, non exclusivement citoyen de son pays. Mes frères chinois ne sont pas moins mes frères que mes frères français. Tous unis dans la fraternité, l'égalité, la liberté républicaine ! Mon frère français n'est pas plus égal, ne mérite pas plus la liberté que mon frère esquimau. D'où l'absurdité constitutionnelle du patriotisme. Et de la guerre, puisque par définition toute guerre est un crime contre l'humanité. <o:p></o:p>

    Je remarque que plus le discours patriotique est primaire, acharné et s'adresse à des esprits simples, naïfs, sans défense sur le plan intellectuel, voire à de braves gens sans histoire, à des êtres franchement sots, à des sommités issues de villages isolés (parfois alcooliques), mieux il fonctionne. Plus on monte en visant la "cible intellectuelle", moins il a d'écho. Le patriotisme, c'est le sommet des capacités altruistes du petit français moyen discipliné. Pour un patriote de base, l'humanité s'arrête aux frontières du pays. Hors ces frontières, plus rien ne le concerne, ne le touche, ne l'intéresse.<o:p></o:p>

    679 - Une vie pleine de surprises

    Je viens de recevoir un mail contenant les "meilleurs voeux de Wanadoo" pour les fêtes de fin d'année, et ce avant toutes les autres enseignes commerciales. Quel sens de l'exclusivité chez Wanadoo ! Étant donné que je suis un garçon sensible et intelligent je me suis senti particulièrement touché par la délicate attention. Pour remercier Wanadoo de m'avoir avant toute la clique commerçante souhaité ses meilleurs voeux, j'ai lu scrupuleusement et avec une avidité mal contenue le mail qui m'était adressé en termes si personnels, tellement pertinents... Pour mon immense joie, figurez-vous que Wanadoo me fait la grâce de m'accorder réductions et avantages inouïs sur ses produits en ligne !<o:p></o:p>

    La vie a tout de même des côtés extrêmement "sympathiques" n'est-ce pas ? <o:p></o:p>

    Sympa Wanadoo !<o:p></o:p>

    En outre, le monde délicieux dans lequel je baigne (devenu doré depuis sa prise en main par les divers marchands de produits indispensables à mon bonheur) étant bien conçu, il se trouve que je vais passer l'hiver à lire les sélections de livres choisis avec goût par "France-Loisirs"... Le niveau littéraire, poétique et intellectuel des ouvrages proposés à grands renforts de publicités fort convaincantes par la maison "France-Loisir" étant égal à celui du passionnant magazine "Télé 7Jours", je sens que je vais passer une saison merveilleuse, plongé dans mes lectures aux couvertures savamment illustrées d'arabesques de toutes sortes avec des reflets dorés et "papier d'aluminium" et autres artifices du meilleur effet...<o:p></o:p>

    Sympa France-Loisirs !<o:p></o:p>

    Matraqué par les publicités (que je dévore avec fièvre) me promettant monts et merveilles mensuels et hebdomadaires, je suis également très tenté pour m'abonner à un bouquet de magazines tous aussi essentiels les uns que les autres.

    Chez moi j'ai des fenêtres, je vais donc naturellement m'abonner à "Fenêtres magazine". J'habite également pas très loin de la campagne. Je vais succomber à la tentation et m'abonner illico à "Campagne Magazine". Je possède également une voiture. Alors là pas d'hésitation, je vais m'abonner aux quatorze revues principales traitant de la bagnole ! J'ai deux chats. Va pour "Chats Magazine" et même pour "Trente Millions d'amis"...
    <o:p></o:p>

    Sympas les bouquets de magazines !<o:p></o:p>

    ("Sympa" est un terme que j'utilise désormais à tout bout de champ pour manifester aussi bien le contentement de mon estomac calé par les tripes préparés à la mode de Caen vendus en promotion "Spécial Noël" par boîtes de trois que la satisfaction de mes neurones anesthésiés par le pain blanc de l'esprit nivelé vers la rassurante médiocrité universelle déversée par radios, télévisions, presses en tous genres.)<o:p></o:p>

    Quel bonheur de vivre dans une société qui a si bien su concevoir, penser, et même devancer mes besoins les plus vitaux ! Depuis récemment je lis sans restriction et avec un intérêt toujours égal les prospectus et mails commerciaux qui me sont adressés et j'engage mes milliers d'amis inscrits comme moi au fameux "Club des gros Cons" à m'imiter sur la voie de la GRANDE CONNERIE GENERALE.<o:p></o:p>

    680 - Les tourments de la chair

    Madame,

    Le souvenir de votre face poudrée, mais surtout de votre chair glorieuse, altère exquisément la mécanique de mon coeur hautain. Ce dernier se dérègle à la pensée de votre femelle éclat, et du repos des jours ordinaires il est passé à la plus canaille des agitations. Au début mes sens mis en éveil ne cessèrent de lutter saintement contre les tourments les plus vifs du désir. Mais très vite, incapable de gouverner mon âme en proie à ces feux grandissants ni de commander à mes humeurs, je n'ai plus pu opposer aucune résistance à la délectable oppression, et mes nuits se sont embrasées de voluptés et de honte...
    <o:p></o:p>

    Mon coeur, si je puis m'exprimer par cette métaphore, mon coeur disais-je s'enfle d'inavouable amour, et songer à vous ma mie, songer à vous en société me cause, et c'est bien fâcheux, une bien indiscrète renommée... S'il m'est aisé de voiler les secrets de mon âme en dignes présences, croyez bien qu'il m'est assurément moins commode de dissimuler les effets évidents d'une virilité naissante...

    Sans que ma volonté n'intervienne, votre image hante mon esprit et mes pensées s'égarent sur les voies tortueuses de la sensualité... Pardonnez-moi de convoiter si hardiment votre hymen ma mie, mais la nature, si sage, si avisée m'a fait mâle, et son appel est bien difficile à mépriser.
    <o:p></o:p>

    J'ai beau aspirer au plus pur amour, à la plus chaste amitié avec vous, la réalité de mes sens ne m'épargne pas. A travers votre chère personne je ne vois non plus seulement l'admirable fille du couvent que dans mon idéal guindé j'aurais aimé que vous fussiez pour toujours, mais également la divine et lascive Vénus des peintres amoureux. <o:p></o:p>

    Vous m'inspirez de façon profane ma mie, et l'élan de ma plume mécanique (je veux parler de mon présent clavier) procède d'un feu semblablement brûlant. Entre le pinceau flatteur de l'artiste et cet écran d'ordinateur où vous lisez mes mots, une même cause dirige les passions. <o:p></o:p>

    Je vous en conjure, hâtez-vous de mettre un terme apaisant à ces flammes impures qui dévorent et mon âme et ma chair, secourez ce coeur et ce corps qui se consument en votre nom ! Pour mon salut et le vôtre ouvrez-moi vos draps, votre alcôve, puis accordez-moi le privilège de votre hymen. <o:p></o:p>

    Ou préservez-m'en à jamais.<o:p></o:p>

    Ne demeurez pas insensible à ma détresse, dans un sens ou dans l'autre   agissez ! Libérez ma mâle vigueur de sa coupable tension, assistez ma chair égarée ou bien tuez dans l'oeuf cette sensualité grandissante, mais de grâce ma mie, rendez sa souplesse originelle à cet objet embarrassant devenu rigide à l'évocation de votre personne, donnez-lui une paix libératrice durable.<o:p></o:p>

    Ah ! Combien je comprends les tourments endurés par les cloîtrés ! Dire que toute la force d'une sainte âme se trouve confrontées, non sans faillir parfois, à la légèreté et au despotisme d'un mâle appendice... Vous semblez ignorer avec une véritable inconscience, vous les élues de la Tempérance, la puissance de ces démons qui harcèlent sans cesse le sexe fort. Nous les représentants de ce sexe dit noble, nous les chevaliers, nous les guerriers, nous les fils de Mars, si nous ne faiblissons pas face à l'épée qui se dresse en ennemie, si nous portons aux nues nos vaillances belliqueuses, pleins d'ardeur et de courage au combat, à vos pieds chéris nous déposons les armes et contre vos flancs irrésistibles nous nous abandonnons. A la vue de vos appas nous baissons les bras, déjà vaincus. <o:p></o:p>

    Je ne connais nul héros martial qui demeurerait sans appétence et tout de mollesse face aux attraits sinueux d'une bergère. Ne faut-il pas appartenir à la race des saints, ou des morts, ou bien à celle des inversés pour ne point succomber au venin de ces créatures qui tentent malgré elles cette moitié de l'humanité que nous représentons ?<o:p></o:p>

    Sachez tirer bon enseignement de ces ultimes confessions, et selon ce que vous en aurez conclu en vérité et justesse conformément à ce qu'il faudrait précisément en conclure, vous prendrez soin de me faire un édifiant accueil lors de notre prochaine entrevue, ma mie.<o:p></o:p>

    681 - Dans la ville lumière

    Il était mentaliste de province, parcourant les villes moyennes de numéros en numéros. Non sans une certaine gloire, même si celle-ci était mêlée de médiocrité. Un bref passage à Paris l'éblouit définitivement : c'est là que l'amour, à 52 ans, entra dans sa vie.<o:p></o:p>

    Belle brune élancée, parisienne avant tout, elle arborait des os faciaux saillants qui lui conféraient un charme puissant. Il avait les dents jaunes mais souriait avec une exquise distinction "vieille France", quoique ses manières fussent légèrement maladroites. Ils venaient de se rencontrer dans la ville lumière. La ville lumière...<o:p></o:p>

    Avec ses pommettes anguleuses, sa mâchoire carrée, son front antique, le visage de cette superbe trentenaire à la coiffure sophistiquée rappelait celui d'une camarde somptueusement grimée. Lui, en dépit de ses dents jaunies n'était point laid.

    Ils s'aimèrent, dans la ville lumière. Puis apprirent à mieux se connaître de nuit en nuit, sous les feux de la cité éternelle.
    <o:p></o:p>

    Il n'était plus question pour lui de jouer au clown déclassé devant un public de sous-préfecture : le mentaliste devait tenir son nouveau rôle d'amant à part entière, avec ses dents teintées il est vrai. Elle, sépulcrale mais belle femme malgré tout, des étoiles plein la tête depuis leur rencontre, ne voyait plus la dentition douteuse de cet authentique provincial que les feux de la capitale avaient étourdi. Le mentaliste quant à lui voyait la face de l'amour en cette brune. Plus noire que brune d'ailleurs, avec ses yeux profonds, ses rires graves, sa chevelure ténébreuse... Dans la ville lumière, tout devenait éclatant.<o:p></o:p>

    Il riait à pleines dents, tandis qu'elle lui faisait des charmes sans fin avec sa belle chevelure, ses os proéminents et tous ses artifices mondains.<o:p></o:p>

    Dans la ville lumière, la lourde province s'était étrangement combinée avec l'Élégance. Une fusion improbable du sabot et de la semelle délicate. Et contre toute attente, parfaitement réussie. Femme raffinée aux attraits funèbres, la belle balayant d'un coup tous ses préjugés ne jurait plus que par ce mentaliste au parler désuet. <o:p></o:p>

    Et aux dents ternies. <o:p></o:p>

    Vraiment, elle rayonnait de beauté. De cette beauté chaude, venimeuse, orientale qui fascine, effraie et fait rêver. Le mentaliste, un peu gras, la veste démodée, avait l'air de ce qu'il était : un galant anachronique un peu rustaud. Lui avec ses dents négligées, elle avec ses traits quasi cadavériques, ils formaient un couple fulgurant, soudés comme deux éclairs simultanés, deux flammes d'un même orage. En fait deux spectres : le premier un peu ridicule mais touchant, le second dégageant un mystère un tantinet macabre. L'un ressemblait à une vieille photo jaunie, l'autre faisait songer à une grande statue mortuaire. Ils se perdirent dans la ville lumière. L'histoire ne dit pas ce qu'il advint de ce couple insolite car nul ne le revit plus jamais, mais nous imaginons qu'il s'est volatilisé dans les lumières de la ville. Désagrégé, dématérialisé, pulvérisé en direction des étoiles. Juste au-dessus de la ville lumière, précisément.<o:p></o:p>

    Lui avec ses dents colorées, elle avec sa tête en forme de crâne.<o:p></o:p>

    682 - La bêtise du Téléthon

    La bêtise du Téléthon tient non pas dans le fait qu'on nous demande de l'argent pour aider la recherche dans la lutte contre les maladies handicapantes et létales, le principe du don étant très louable, mais dans le fait d'organiser (à grands frais qui plus est) ce vaste abrutissement de foules. <o:p></o:p>

    En outre j'estime que l’État, le Ministère de la Santé plus précisément, devrait s'occuper du problème et le financer sans compter au lieu de le déléguer à des citoyens manipulés par les médias. Ce n'est pas au citoyen de s'occuper de financer la recherche dans la lutte contre des maladies, même si à côté il n'est pas interdit aux citoyens responsables d'entreprendre des démarches privées à ce propos. Le Téléthon étant une entreprise de bienfaisance privée, rien ne nous oblige à y adhérer.<o:p></o:p>

    J'estime encore que la lutte contre les maladies devrait être obligatoire sous forme d'impôt, la maladie étant affaire de tous. La fraternité à ce sujet devrait être exercée de force, par impôts interposés et non pas de manière capricieuse, aléatoire et ludique - et par conséquent immorale et malsaine- sous la forme actuelle du Téléthon. Un prélèvement direct et institutionnel serait beaucoup plus économique, plus rapide et plus efficace que la mise en oeuvre abêtissante de ce grand cirque télévisuel appelé Téléthon. Les gens acceptent bien, bon gré mal gré, que l'État leur soustraie leur argent quand il s'agit de financer l'Armée avec leurs impôts, pourquoi rechigneraient-ils à abandonner un peu de leurs richesses à une cause qui en vaut encore plus la peine ? <o:p></o:p>

    Par ailleurs, le prix de quelques tanks fabriqués par l’État français dépasse la somme des dons obtenus par le Téléthon. Il suffirait de prélever chaque année le prix de deux ou trois tanks et de consacrer l'argent ainsi économisé à la recherche, il n'y aurait plus besoin de faire de Téléthon. Cela ne coûterait rien au citoyen puisqu'il y aurait un simple transfert de richesses depuis le Ministère de l'Armée vers le Ministère de la Santé. Une goutte d'eau dans le budget de l'Armée.

    La lutte contre des maladies aussi graves que celles dont il est question à travers le Téléthon ne devrait pas se faire de manière arbitraire mais méthodique, structurelle, constitutionnelle, institutionnelle, l'enjeu étant tellement vital. Or à travers le Téléthon on en a fait une sorte de grande "guignolerie" insipide et crétinisante d'où le succès ou l'échec dépend du bon vouloir des gens et non pas d'une institution comme l'Enseignement National, les Finances ou la Justice.
    <o:p></o:p>

    J'ai l'impression que l’État a trouvé à travers le Téléthon le moyen de se décharger de ses responsabilités. Adhérer au Téléthon en ce cas serait se faire complice de l'irresponsabilité de l’État et du caractère inique de ce genre d'entreprise privée livrée à l'arbitraire. Dans ce système informel et joyeusement désordonné la vie d'enfants malades actuellement incurables dépend du caprice des gens et non pas d'une loi issue d'une volonté publique, légale, institutionnelle.<o:p></o:p>

    J'estime que le Téléthon est une entreprise arbitraire et ridicule de charité-spectacle qui consiste surtout à abrutir encore un peu plus les foules. Cela dit, entre le Téléthon et rien du tout il vaut mieux encore abrutir les gens au nom d'une bonne cause plutôt que les abrutir pour rien du tout. Je ne suis pas contre le fait que la recherche récolte de l'argent grâce au Téléthon, je suis simplement pour un système de don institutionnel. Sous formes d'impôt, tout bêtement. Et ce afin que la résolution des problèmes cruciaux, urgents et vitaux de notre société ne soit pas déléguée à des animateurs de télévision avec leurs entreprises clownesques hasardeuses.<o:p></o:p>

    683 - Les feux couchants

    C'est vers les quarante ans que la femme rayonne. Avant de décliner irrémédiablement.

    Entendons-nous bien, je parle de la femme, la vraie : la femme de classe, l'espèce à peau laiteuse ayant adopté les belles manières, la créature naturellement distinguée. Non la charcutière, non la dépeceuse de poissons des marchés de sous-préfectures ou bien la laitière du coin. En effet, je prétends qu'une employée du rayon charcuterie d'un supermarché de province est nécessairement repoussante car même lorsqu'une femme à la naissance hérite de Vénus tous les dons qu'on puisse lui souhaiter, si par malheur elle est élevée dans un environnement plébéien, fatalement elle se gâtera avec le temps au contact des moeurs corrompues de son milieu.
    <o:p></o:p>

    Les habitudes vulgaires peu à peu lui feront perdre ses attraits naturels : au fil des ans son éclat inné se voilera, avant de s'éteindre. A peine sortie de la puberté, ses sourires béotiens trahiront ses penchants pour la bassesse. A l'âge d'aimer il sera déjà top tard : cette femme n'éprouvera de transports que pour des chefs charcutiers, des rustres à moustaches épaisses, des banquiers, des employés d'épiceries ou des bandits, bref des gens sans goût. Elle mâchera du chewing-gum en pleine rue, fréquentera les bars crapuleux, dédaignant les boulevards lustrés, se vêtira chez les vils fripiers, soupera en douteuses compagnies. Ses manières seront infâmes, ses goûts suspects, son allure sans grâce. La grossièreté se lira sur sa face, son regard sera chargé des noirceurs et misères des gens de sa condition, effaçant de son front l'originelle beauté.<o:p></o:p>

    Non, il n'est point question dans mon propos de cette race de femelle déchue, haïssable aux yeux de l'esthète que je suis. Je parle bien évidemment de ces femmes de bonne éducation, de ces filles de l'aristocratie, enfin de ces enfants de l'honnête société que l'on nomme ordinairement "femmes du monde". Est-il besoin de le préciser ? Ceci pour fermer la parenthèse.<o:p></o:p>

    C'est vers les quarante ans disais-je donc, que la femme est resplendissante.<o:p></o:p>

    A cet âge le fard n'est plus outrancier et les visages pâmées qu'on caresse ont cette mâle assurance qui charme et effraie tout à la fois. Les mains qu'on baise ne font plus les timides et s’offrent sans détour, les parures sont lourdes et riches car la femme de quarante ans est fortunée, ce qui ajoute à sa naturelle élégance... Enfin à cet âge la dentelle sied mieux sur les poitrines pleines qu'à vingt ans sur les têtes vides.<o:p></o:p>

    A cet âge la femme tient ses promesses les plus folles : l'esthète n'est plus son ennemi. La quarantenaire s'épanouit aussi en hauteur.<o:p></o:p>

    A cet âge les langues se délient non plus pour discourir sans fin sur les choses légères de l'amour mais pour chanter les vieux vins âpres. La femme de quarante ans aime prononcer des mots graves entre ses lèvres écarlates : se sachant désirée, elle rit de ses ivresses, abuse de ses charmes mûrissants. Et parce qu'elle ne prend pas au sérieux ses fièvres lubriques, elle s'y abandonne d'autant plus joyeusement.<o:p></o:p>

    Pour toutes ces raisons la femme entre les deux âges est belle, certes. <o:p></o:p>

    Ce sont chez elle quelques années glorieuses, l'ultime flamboiement de sa beauté avant la lente, inéluctable décrépitude. <o:p></o:p>

    684 - Déclaration d'amour à Mireille Mathieu

    Madame,

    Je l'avoue : celui qui vous écrit est un cynique, un cruel, un sinistre fanfaron qui affectionne les amabilités au vitriol et les coups de dents en guise de sourires. Féroce et lucide, je possède toutefois une autre grande qualité : la franchise.
    <o:p></o:p>

    Tout ce qui est lié à votre métier de chanteuse populaire m'est étranger, m'ennuie, voire m'inspire un radical mépris. <o:p></o:p>

    Vous écrire pour vous dire ce que j'ai à vous dire, c'est nécessairement me compromettre aux yeux de mes pairs. En effet, vous incarnez selon moi une certaine nullité, disons tout ce que j'exècre : les moeurs, le mauvais goût, les artifices ineptes liés au monde du show-business. Surtout à l'âge où vous êtes parvenue car si chanter "Une femme amoureuse" est recevable à trente ans, cela devient indécent et ridicule quand on en a 60. Je ne dis pas que vous n'avez pas de talent de chanteuse, non bien au contraire. Votre voix est unique et captivante. Un don du Ciel. Je dis seulement que ce talent, vous ne l'utilisez pas toujours au mieux, même si je devine bien que vous ne cherchez pas à plaire à l'élite.<o:p></o:p>

    Rares sont vos chansons qui m'agréent. Quelques perles dans votre gigantesque oeuvre sirupeuse dédiée au ravissement des masses peu exigeantes que vous aimez tant (et qui vous le rendent bien) ont su toucher mon coeur d'esthète.<o:p></o:p>

    Vous écrire, c'est en quelque sorte me dévoyer vous ai-je dit. Qu'importe ! J'accepte le sacrifice de mon amour-propre, la cause étant belle.<o:p></o:p>

    Madame, le loup va rentrer ses crocs, ravaler sa rage et exposer le flanc.<o:p></o:p>

    Vous voir et entendre chanter quelque chanson d'exception il y a vingt-cinq, trente, trente-cinq ans grâce aux vidéos publiées sur Youtube fut pour moi une expérience inoubliable. Ces documents montrent qu'à cette époque où vous étiez jeune, lorsque vous ouvriez la bouche vous étiez fortement désirable. Votre visage sans aspérité rayonnait de pureté, vos lèvres adorables appelaient l'amour, vos yeux madame étaient chargés de la féminilité la plus ardente. Vous étiez belle, qui s'en était aperçu ? Votre voix sonore et brillante ne chantait pas toujours des niaiseries madame. C'est là qu'elle a su me toucher.<o:p></o:p>

    Non, vous n'étiez pas cette créature asexuée, cette statue taillée d'un seul bloc que le miroir populaire a toujours renvoyé de vous. La flamme érotique vous habitait, vous hantait, vous consumait par tous les pores. Elle m'a brûlé. L'enfer charnel était en vous, l'animale sensualité transparaissait sous vos traits faussement pacifiés. Vous étiez troublante, séduisante, désirable... Le mythe commun a fait de vous un monstre sans désir, une sainte chantant la Marseillaise, une pietà dévotieuse éprise de notes aiguës... Mais je sais bien, moi le sybarite hautain, moi l'ami des muses, que vous étiez une femme riche de toutes ses faiblesses : avide d'amour, assoiffée d'ivresse, dominée par des rêves à la mesure de ses désirs inassouvis ! Beauté, érotisme, fièvre : vous possédiez tout pour mieux donner de vous l'image exactement inverse. <o:p></o:p>

    Loin de l'image de cette sotte et lisse chanteuse vouée à la cause au rabais d'un public abêtit et indolent, j'ai vu Aphrodite. Sous le masque de pudeur, une femme à la vénusté ténébreuse ! Et virginale. Vos yeux doux trahissaient des songes inavouables. Votre visage était celui d'un ange, votre coeur celui d'un diable. J'ai perçu la braise sous votre peau trop honnête... Incarnation glaciale de la Marianne nationale, ambassadrice de la France au charme républicain neutre, dès que vous chantiez des choses intelligentes vous deveniez une tout autre créature au regard à la fois pur et venimeux. Dangereusement belle. Aux antipodes de cette carte postale mièvre, insipide que vous étiez censée représenter.

    Madame, permettez qu'un impie ensorcelé par vos charmes révolus vous déclare sa flamme rétrospective.
    <o:p></o:p>

    685 - La Beauté

    Oublions l'écervelée, faisons abstraction de la potiche, ne pensons plus à la philistine, ignorons la rassembleuse de foules populaires. <o:p></o:p>

    Ne retenons que ce visage.<o:p></o:p>

    Cette face à la beauté virginale ne peut laisser indifférent l'esthète digne de ce nom. L'authentique amoureux de la Beauté ne peux qu'être touché devant cette éthéréenne conception. Tant de grâce sur si peu de chose force une saine admiration, inspire un silence béat, convie au dialogue avec l'invisible. <o:p></o:p>

    Statue vive, pietà à la voix brillante, séraphique vision, ce visage sans vice est le reflet de tout ce qui est Beau, bon, grand. Désarmant par sa pureté, touchant par sa vérité, je le contemple et je vois le monde, sens l'Amour, perçois le Cosmos, pressens l'infini. <o:p></o:p>

    La force de la Beauté, c'est qu'elle peut convertir les coeurs en une seule seconde. Sous son règne la bête se fait Homme, la pourriture devient Soleil, la crasse se change en or, le vice s'efface.<o:p></o:p>

    Et les mots ne veulent plus rien dire. Seuls comptent ce visage, ce ciel ou cette étoile que l'on contemple. L'on s'extasie devant le mystère et on se tait.<o:p></o:p>

    Méditatif, je me perds avec délices dans ces traits qui me disent "Vertu, Beauté, Lumière"...<o:p></o:p>

    686 - Interview d'un esthète

    Une jeune reporter intriguée par le phénomène Izarra a eu une audacieuse, belle initiative : faire ses armes en m'interviewant ! Un peu impressionnée par le personnage, tremblante à l'idée de me poser ses questions, elle demeura très professionnelle cependant. Souhaitons-lui une carrière éclatante après ce coup de maître !<o:p></o:p>

    - Raphaël Zacharie de Izarra, bonjour. Tout d'abord merci de m'avoir accordé cet entretien. C'est une occasion unique pour une journaliste débutante, vous savez... Une entrée dans le métier par la grande porte, en quelque sorte.<o:p></o:p>

    Bonjour mademoiselle... Je ne vous le fais pas dire : une interview qui marquera les annales du grand journalisme et dont les retombées porteront à la postérité sa courageuse et charmante échotière. C'est en tout cas le privilège que je vous souhaite. Mais ne faisons pas patienter plus longtemps notre lectorat.. <o:p></o:p>

    - Raphaël Zacharie de Izarra, les femmes parmi les plus belles vous doivent les plus chères heures de leur vie. Nous livrerez-vous enfin vos secrets de séduction ?<o:p></o:p>

    Écoutez, je n'ai aucun secret de séduction. Je suis tout simplement moi-même, naturel. Hautain, esthète, joueur, capricieux, fantaisiste... Cruel et tendre. Odieux et attentionné. Tiède et glacial. Féroce et cajoleur. Cynique bien évidemment. Pas trop tendre, avec juste ce qu'il faut d'humour macabre... Pas excessivement de fleurs, beaucoup d'épines, un peu d'orties aussi. Ça revigore bien les coeurs, les orties. De la folie, de l'indifférence, beaucoup de rêve. Ça oui, du rêve il en faut pour mettre du baume dans les coeurs... Et puis bien sûr des caresses mêlées de mots cinglants, toujours. Bref, rien que des choses ordinaires.<o:p></o:p>

    - En effet, cela me semble très izarrien ! Vous avez le verbe facile, la plume brillante, l'éloquence redoutable : seriez-vous dans le giron des muses Raphaël Zacharie de Izarra ?<o:p></o:p>

    Il est vrai que j'ai quelque accointance avec les hôtes de l'Olympe. Je conçois pour ces lascives conceptions de l'esprit les plus tendres transports. Entendons-nous bien : leur sensualité est purement désincarnée, leurs charmes exclusivement éthéréens. Cela dit il arrive que l'une de ces inspiratrices de temps à autre descende jusqu'à moi sous une forme plus palpable afin de me souffler plus près de l'oreille quelque mot immortel à coucher sur mes feuilles. Par exemple cette questionneuse qui me fait face, voyez-vous, je la pourrais comparer à ces joueuses de luth qui me hantent exquisément et qui parfois prennent corps pour me témoigner leurs tendresses...<o:p></o:p>

    - Vous nous avez accoutumé à bien des frasques et en voilà une nouvelle preuve. J'avoue que vous êtes irrésistible Raphaël Zacharie de Izarra. Justement, comment fait-on pour vous résister ?<o:p></o:p>

    On ne me résiste pas, tout simplement.<o:p></o:p>

    - Vous voulez dire que votre essence, c'est la fatalité ?<o:p></o:p>

    L'expérience izarrienne n'est jamais anodine. Qui m'approche touche à la Vérité, dans une certaine mesure. Irréductible, totale, tragique, ultime, voire mortelle pour ceux qui manquent d'ailes, de souffle, la réalité que j'incarne n'est pas abordable à la première tentative... Bien trempées sont les âmes qui peuvent pénétrer mes profondeurs au premier abord ! La symbiose immédiate des esprits est rare : il faut s'initier à la réalité izarrienne pour y accéder. On appréhende mon cas avec prudence, hauteur, humilité.<o:p></o:p>

    - Vous racontez des choses dans vos textes (et certains sont très décriés) qui sont dures, noires, désespérantes, d'une férocité inouïe, parfois d'un humour insupportable, même si par ailleurs vous écrivez de petites et grandes merveilles. La notion de contraste appliquée à vos textes prend une dimension extrême Raphaël Zacharie de Izarra !<o:p></o:p>

    N'exagérons rien. Je ne fais que mettre le doigt là où ça fait mal, rien de plus. Je suis un conteur d'histoires, mais également un joueur d'idées. Voilà, j'expérimente sur le papier des situations fictives, mets en scène des vraisemblances, ajoute du sel et du poivre à ma plume pour mieux relever les faits du réel. Mais parfois je relate tout simplement ce que j'observe dans la réalité. Je n'invente rien. Est-ce ma faute si les gens sont vils, stupides, minables ? Dieu merci, l'humanité me montre aussi ses grandeurs et je n'omets jamais de les chanter avec éclat à travers mes textes.<o:p></o:p>

    - Vous avez des ennemis Raphaël Zacharie de Izarra, beaucoup d'ennemis. Des vrais, des acharnés. Qui sont-ils et pourquoi vous en veulent-ils    autant ?<o:p></o:p>

    Vous savez, la littérature, la vraie, est une activité certes réjouissante mais hautement séditieuse pour qui ne craint pas l'usage des mots. Des plus suaves aux plus âpres. Comme le verre qui voltige au-dessus des jouteurs, le verbe qui explose a ses éclats. Ils peuvent blesser, autant que la Vérité. A partir de là, comment voulez-vous plaire au Ciel sans déplaire aux hommes ?<o:p></o:p>

    - Raphaël Zacharie de Izarra, qui sont ces drôles d'oiseaux qui vous apprécient ?<o:p></o:p>

    Les beaux esprits, bien entendu. Cette espèce est rare, je ne le nie pas. N'est-ce pas ce qui fait son prix ? Les beaux esprits sont ces âmes nobles, courageuses, ardentes qui ne craignent pas d'avouer leur feu au contact de mon verbe. J'ai remarqué que les femmes possédant cette mâle qualité sont toujours superbement belles. Par conséquent j'estime qu'une femme qualifiée par moi de "bel esprit" est nécessairement une créature de grande classe à la vénusté triomphante. Chez toute femme digne de ce nom les beautés se rassemblent, se combinent, l'une n'excluant point l'autre : séductions charnelles et richesses de l'esprit chez elles sont toujours intimement liées... Je parle bien évidemment de la femme bien née, non de la gueuse. Je prétends qu'une femme qui lit mes textes avec coeur ne peut qu'être supérieurement belle car enfin a-t-on déjà vu un laideron s'éprendre du lustre de l'esprit ?<o:p></o:p>

    - Raphaël Zacharie de Izarra, vous êtes un gentleman et un personnage d'exception. A ce propos, côtoyez-vous les grands de ce monde ?<o:p></o:p>

    Pas du tout ! J'ai su rester simple : je vis toujours au Mans. Je demeure dans la partie haute de la cité toutefois. Cela dit, loin de moi l'idée d'aller me mêler à la mondaine agitation de ce monde. Je ne reçois ni ponte du Vatican ni sommité politique chez moi. La simplicité est encore mon meilleur étendard. J'aimerais tant enseigner cette modestie à mes détracteurs !<o:p></o:p>

    - Raphaël Zacharie de Izarra, cette première interview de ma carrière a dépassé mes espérances en termes de qualité, à tous points de vue. Du fond du coeur, je vous remercie.<o:p></o:p>

    687 - La perversité de certains anti-pédophiles

    Un anti-pédophile sur un forum déclarait un jour : "Si je rencontre un pédophile t'en fais pas il passera un sale moment !". Je vous livre la réponse circonstanciée que je lui fis : <o:p></o:p>

    Vous dites cela parce que vous n'en êtes pas un et que ça vous donne une certaine honorabilité de vous poser en anti-pédophile de base ? Ça vous rassure de n'en être pas ? Ça vous donne bonne conscience de jouer au justicier face aux pédophiles ?<o:p></o:p>

    Ça vous permet de vous dire à vous-même et de montrer aux autres : "Vous voyez, moi je n'en suis pas !"... Noble réaction ! Vous me faites songer à ces honnêtes gens qui crient "A MORT" quand on mène l'assassin à l'échafaud. <o:p></o:p>

    Vous prenez même les devants, en jugeant qu'un pédophile devrait "passer un sale moment" s'il vous rencontrait... Sans que celui-ci ne vous demande rien. Juste par le caprice de votre décision, en vertu de ce droit auto-proclamé, auto-octroyé, parfaitement arbitraire, que vous dicte votre bonne conscience... Bonne conscience tellement empressée de redresser les torts des autres, et particulièrement en ce qui concerne les pédophiles... Vous courez, volez vers les pédophiles avec votre glaive justicier. <o:p></o:p>

    A quand les ratonnades anti-pédophiles ?<o:p></o:p>

    Jugement des bonnes consciences qui ont l'impression de se blanchir en noircissant l'autre (à bon compte, la loi étant pour eux). <o:p></o:p>

    L'autre c'est-à-dire le sale, le méchant, le mauvais, le pas beau, le bête, le pas pareil, bref celui qui n'est pas soi, qui en aucun cas ne saurait être soi ! <o:p></o:p>


    Justice des injustes qui s'ignorent...
    <o:p></o:p>

    J'ai toujours été perplexe face à la propension des braves, honnêtes, bonnes gens à condamner en choeur ce et ceux qu'on leur désigne officiellement comme "l'ennemi à abattre"... Brave gens si prompts à réagir (et avec une telle vigueur, avec quelle virulence !) devant le chiffon rouge que leur tendent les médias !<o:p></o:p>

    Du jour au lendemain les masses placides peuvent s'enflammer, se passionner pour des parties de cirque sociales initiées, engagées par les médias. Juste pour un article paru dans le journal, un reportage diffusé sur TF1 mettant le feu à la poudre populacière... L'arène de la sottise de temps à autre se peuple de bovins enragés, assoiffés du sang du pédophile, de repentir de bandits, bref assoiffés de vengeance envers les méchants, qu'ils ne sont pas, eux au moins...<o:p></o:p>

    La pédophilie est la meilleure excuse de ces enragés : enfin un bon sujet pour se défouler sans crainte d'être jugé, traité de barbare, de salaud, enfin on va pouvoir "casser du méchant", se défouler de notre trop plein d'agressivité avec l'assentiment des médias, des voisins, et même du pape !<o:p></o:p>

    Les jeux du cirques rêvés en somme. <o:p></o:p>

    Le pédophile a un énorme avantage : il permet à l'honnête citoyen de se dédouaner de ses mauvais penchants. Avec un pédophile, le brave payeur d'impôts peut déverser ses excréments sur son prochain. Personne ne le lui reprochera. Alors profitons-en, se dit-il en lui-même !<o:p></o:p>

    Bien entendu, tout cela est inconscient chez la roture. La gent hurleuse et anti-pédophile croit sincèrement à la pureté de son ire.<o:p></o:p>

    Entendons-nous : mon propos n'est nullement de défendre les pédophiles, simplement de souligner la sinistre, hideuse réalité qui se cache sous cette haine anti-pédophile aux apparences si respectables qu'arborent fièrement les braves citoyens, tellement écoeurés par les agissement des pédophiles qu'ils n'hésitent pas à afficher leur vrai visage de justiciers sadiques, pervers, injustes, voire parfois franchement hypocrites... <o:p></o:p>

    Cette fureur avec laquelle les anti-pédophiles, enragés, violents (et fiers de l'être) se ruent sur leurs ennemis légalement déclarés me semble trop suspecte.<o:p></o:p>

    Je prétends que le pédophile est le révélateur des noirceurs des braves citoyens.<o:p></o:p>

    Cela n'a rien à voir avec le problème de la pédophilie en lui-même. Je ne prends aucunement la défense des pédophiles je le répète, je me permets seulement de mettre le doigt sur la réalité cachée des choses, celle que les médias n'auront jamais le courage ou simplement l'idée d'aborder, ne serait-ce que par respect, décence (encore une bonne excuse pour ne pas déplaire au lectorat ?) vis-à-vis des victimes de pédophiles. <o:p></o:p>

    Mais ni le respect des victimes ni la décence n'autorisent à censurer la vérité, encore moins la vérité cachée. Dans le domaine si trouble des méandres et contradictions de l'âme humaine, j'estime que nous devrions être encore plus exigeants, faire preuve d'encore plus de prudence, de clairvoyance. C'est précisément ce qui est hypocritement caché, inconsciemment mis sous chape de plomb au fond des êtres prétendus honnêtes qu'il faut révéler, exposer au grand jour, dénoncer. Et non pas stérilement accuser ce qui est tellement évident : la pédophilie.

    Trop facile de dénoncer ces évidences... Cela est à la portée du premier veau venu. Si je n'ai jamais dénoncé ouvertement et avec des grands mots les pédophiles dans mes textes, c'est tout simplement parce que la chose me semble aller tellement de soi qu'aborder le sujet serait parfaitement déplacé, inutile, stérile. Il n'y que les "journaleux" à la solde de la sensibilité populaire pour défoncer ce genre de porte ouverte.
    <o:p></o:p>

    La pédophilie devrait être le problème de la Justice et non pas des justiciers du dimanche qui se permettent d'adopter des attitudes scandalisées qui leur procurent le clinquant sentiment d'être meilleurs, plus respectables, bref qui les dédouanent de leurs petits vices et autres misères, tares et travers. Ils se sentent tellement plus beaux, plus grands, plus blancs, plus dignes face à un pédophile !<o:p></o:p>

    688 - Le mollusque venimeux de Hollywood

    Lorsqu'on assiste à une séance de cinéma américain dit "grand public" avec un minimum d'esprit critique, on s'aperçoit que la formidable machine de propagande que constitue le phénomène a durablement modelé la sensibilité dans notre société. Il est évident que la "culture" cinématographique yankee est un produit de consommation universel à hautes teneurs en mensonges, clichés éculés et anesthésiques mentaux, sorte de hamburger cérébral destiné à asseoir l'hégémonie culturelle américaine dans le monde. <o:p></o:p>

    Les films "grand public" sortant de Hollywood, tissés sur une trame invariable, servent avant tout à conditionner les esprits, à les aliéner insidieusement à la cause militaire, culturelle et sociale de l'Amérique du Nord tout en enrichissant leurs auteurs à la solde des protagonistes hauts placés qui depuis toujours agitent les ficelles dans l'ombre. Les valeurs défendues à travers les productions hollywoodiennes éclatent à chaque scène :<o:p></o:p>

    -         Vive l'Amérique ! <o:p></o:p>

    -         Buvez du Coca-Cola ! <o:p></o:p>

    -         Achetez-nous encore des films !<o:p></o:p>

    Gigantesque usine à faire de l'argent, mais également pieuvre "décérébrante" aux infrastructures planétaires tentaculaires répandant le poison d'une pensée unilatérale, asservissante, despotique, le cinéma commercial américain a su exploiter les faiblesses de chaque génération, flatter d'un bout à l'autre la gamme des sentiments humains les plus triviaux. Ressorts grossiers mais efficaces. <o:p></o:p>

    L'encre du monstre hollywoodien qui dans un vocabulaire bêtifiant écrit sur les écrans de la terre entière ses lois iniques est d'autant plus toxique que, sournoise, elle est inoculée sous forme ludique, formatée, prédigérée : plus la victime en reçoit, moins elle s'en rend compte et plus ses capteurs cérébraux de l'imbécillité, source de béatitude crétinisantes, sont réceptifs. <o:p></o:p>

    L'image dans ce contexte, paradoxalement, sert d'écran : elle éblouit, assomme, abrutit pour mieux faire avaler le venin. Violence, vice, vulgarité, argent, superficialité, laideur sont la principale esthétique du cinéma issu des studios de Hollywood. Doté de vertus léthargiques et "imbécillisantes" puissantes, le cinéma américain est un produit de consommation courante dangereux.<o:p></o:p>

    A déconseiller absolument pour la bonne santé morale, mentale et culturelle de tout honnête homme digne de ce nom.<o:p></o:p>

    689 - Les abrutis de base

    Je reçois souvent des commentaires injurieux de la part de gens sans subtilité ni discernement (et visiblement, hélas ! sans grande instruction) lorsque sur des forums je poste mes textes à propos des aberrations et dérives faites autour de la pédophilie, phénomène parfois révélateur du fond des êtres. Lorsque je dénonce ou constate les hypocrisies et travers inhérents au problème, certains enragés, véritables "chair à canon des médias", réagissent promptement à mes propos, fonçant comme des taureaux, aveuglés, abêtis, animalisés par une haine comique et stupide. Ces pantins primaires (que je crois assez dangereux tout de même à lire certaines de leurs réactions) tirent sur tout ce qui a l'apparence de la cible qu'on leur a désignée.<o:p></o:p>

    Quand ils lisent mes textes, dès les premières lignes ils voient rouge, me taxent de "sale pédophile", aveuglés qu'ils sont par le terme "pédophilie" et le ton posé que j'emploie. A leurs yeux ma réflexion sur le sujet est assimilée à une franche caution intellectuelle pour la pédophilie, à une véritable affinité pour les pédophiles, à une promotion éhontée pour les pratiques pédophiles...<o:p></o:p>

    Bref, ils voient en moi un pédophile à abattre, du moins un pro-pédophile faisant purement et simplement l'apologie de la pédophilie. <o:p></o:p>

    Convaincus d'avoir déniché à travers moi LE pédophile, un vrai de vrai, au-delà de la caricature, et trop heureux d'avoir trouvé par la même occasion le putching-ball sur-mesure de leurs rêves, prétexte parfait à leur bestialité d'abrutis, ils s'alarment, alertent, se mettent dans tous leurs états !<o:p></o:p>

    Ils sont d'autant plus heureux de leur trouvaille "internautique" qu'ils s'imaginent être tombés sur un pédophile assez inconscient, carrément suicidaire, ou bien complètement fou pour, non content de prôner au grand jour la pédophilie active, se permettre de signer de son nom et de mettre ses coordonnées au bas de ses criminels aveux ! A force de voir des pédophiles partout sur Internet, ils ont fini par en trouver un, un gros, un vrai, un qui avoue, un qui le crie sur la toile, un qui écrit noir sur blanc : "JE SUIS UN PEDOPHILE"...<o:p></o:p>

    C'est à la fois comique et triste. Comique à cause du spectacle hilarant de leur bêtise : on croirait avoir affaire à ces personnages grotesques de bandes dessinées faits tout d'un bloc de brutalité et de naïveté mêlées. Triste car c'est sur ces êtres primaires, aisément malléables, dénués de réflexion et ne réagissant que par des "coups de sang", que comptent certains médias et hommes politiques peu scrupuleux pour mieux fabriquer, diriger, manipuler, anesthésier ou exacerber leurs passions, qui serviront leur cause.<o:p></o:p>

    Pour ces sinistres redresseurs de torts, justiciers de foire, je suis un pédophile. Ils ont lu mes textes, ils ont lu mes réflexions, à partir de là rien ni personne ne pourra ôter de leur tête cette vérité. Et toutes mes tentatives d'explications pour leur faire comprendre le contraire seront interprétées par eux comme autant d'aveux supplémentaires...<o:p></o:p>

    Ce qui est terrible, c'est de constater les ravages de l'inculture associée à la bêtise. Certains citoyens de base ne savent pas lire les textes les plus élémentaires ni raisonner comme des adultes responsables. J'écris blanc, ils lisent noir. <o:p></o:p>

    C'est vraiment terrible car par-delà mon simple cas personnel (qui n'est qu'anecdotique), c'est à ces gens-là qu'on donne le droit de vote.<o:p></o:p>

    690 - Alphonse Trapu

    Alphonse Trapu est un provincial fini, farouchement enraciné dans ses sillons. Un drôle de corbeau niché au fin fond du cul de la France...<o:p></o:p>

    C'est un provincial, un vrai, un dur, un qui pue le fromage et le gros sec jusqu'au fond du gosier. Un des "comme on n'en fait plus", un tout crotté de la tête aux pieds. Un de ceux "à qui on ne la fait pas". Un provincial irréductible, incorrigible, incorruptible... Irrécupérable. Définitivement, désespérément, dramatiquement allergique à la capitale. <o:p></o:p>

    Bref, un bouseux dans la tête, dans le coeur et dans l'âme, fier de son sort, ne souhaitant pas d'autre horizon que son clocher ni de piédestal plus haut que son tas de fumier.<o:p></o:p>

    A ses yeux tout citadin est un ennemi : un fainéant, une mauviette, voire une tapette.

    Toutes les femmes qui ne portent pas sabot au pied sont pour lui nécessairement des "grosses morues de la ville", des "vraies putains de Paris", ou bien des "sales fumures de dépensières"...
    <o:p></o:p>

    Comme on le voit, Alphonse Trapu a des préjugés d'un autre âge, des sentiments d'un autre monde et ne fait pas dans la dentelle pour les exprimer ! D'ailleurs il ne se gêne pas pour cracher ce qu'il a sur le coeur à chaque fois que l'occasion se présente, c'est à dire quasiment jamais étant donné qu'il vit reclus dans son trou comme un vieux sanglier. <o:p></o:p>

    Chez lui pas d'électricité, pas d'eau courante, pas de savon.<o:p></o:p>

    Il s'éclaire à la chandelle, se chauffe à la cheminée, se "frotte la couenne" avec la cendre. Tout à l'ancienne.<o:p></o:p>

    D'une pingrerie prodigieuse, il économise sous après sou, jour après jour, âprement, patiemment, éperdument. Depuis toujours il se prive de tout. Pour rien, ou presque : juste pour le plaisir stérile d'économiser.<o:p></o:p>

    Dur avec lui-même, impitoyable avec les autres, il se lève tôt et se couche tard été comme hiver, refuse de s'accorder le moindre baume, la plus petite douceur, et tout cela pour ne surtout pas ressembler à ces "sacrés fainéants de bourriquots de pédés de parisiens" qu'il a en horreur...<o:p></o:p>

    Notre bonhomme est un phénomène. Un être fruste, arriéré, peu amène. Cependant j'apprécie sa compagnie dénuée de simagrée, son odeur saine de foin et de crottin de cheval, ses outrances empreintes d'un certain bon sens. J'apprécie sa rébellion bien plus que la délicatesse, la sophistication de bien de ses contemporains dégénérés à l'extrême eux. Je préfère côtoyer ce "rebelle des bois" qui me fait rire et m'inspire plutôt qu'à l'opposé ces dénaturés qui m'affligent.

    Alphonse Trapu est le dernier des Mohican de notre société embourgeoisée, le hibou mal emplumé de nos esprits abrutis par le vacarme ambiant, de nos coeurs endormis ayant rompu le contrat millénaire qui les liaient à la terre nourricière paysanne. Mais laissons le dernier mot au héros de cette histoire :

    - "Sacrés fainéants de bourriquots de pédés de parisiens !"
    <o:p></o:p>

    691 - Un cri vers le ciel

    Les cloches de la cathédrale sonnèrent dans la clarté du matin, assourdissantes. <o:p></o:p>

    Attiré par les clameurs de l'airain, je m'approchai du monument. Concert dantesque qui hurlait au ciel la piété des hommes !<o:p></o:p>

    Je demeurai au pied de l'édifice, fasciné, un peu terrifié aussi. La pierre vrombissait, la cathédrale entière formant une caisse de résonance géante. Telle une montagne solennelle aux ailes de titan, à la gueule vulcanale, le vaisseau grondait.

    La silhouette gothique qui se détachait dans le ciel éclatait de sainte fureur. Des corbeaux tournoyaient au-dessus de ses multiples sommets. La voix des bourdons montait toujours, emplissant la nue... Bientôt ce fut la tempête. Un orage de sons sourds, denses, graves, qui devint égal, uniforme puis quasi silencieux : je n'entendis plus les cloches mais à la place, un son pur.
    <o:p></o:p>

    Un léger sifflement. Une note légère, fine, aérienne. <o:p></o:p>

    Le choeur du métal, par sa beauté simple, saine, brutale, avait déclenché en moi une nouvelle capacité à entendre, l'ouverture d'autres yeux, l'éveil d'une autre conscience. Les cloches agissaient sur moi de la même façon que le bruit sourd d'une trompe met le cristal en vibration. Ou de manière plus imagée, pareil au son rauque du cor qui occasionne un chant de flûte à travers le verre qu'il fait vibrer. J'accédai à une réalité supérieure. Une transfiguration de ma sensibilité ordinaire, de mes capacités de réception matérielle venait de s'opérer : j'entendais l'inaudible. <o:p></o:p>

    Le son des cloches était derrière moi, je n'entendais plus que son essence, une musique fluette, comme si je percevais l'âme et non plus le corps des choses.<o:p></o:p>

    Bientôt le silence fut total autour de moi, bien que le clocher fût en branle. Juste la voix d'un ange, la corde d'un séraphin, le rire d'un esprit au-dessus de moi...<o:p></o:p>

    Emporté par le vent de la Beauté, j'étais parvenu jusqu'à la source du Mystère. Un bref, très bref instant. L'illumination fut furtive : en baissant les yeux vers le parvis, tout redevint fracassant.<o:p></o:p>

    Je restai un moment, troublé, décontenancé avant de m'éloigner, le pas chancelant. Les cloches derrière moi sonnaient toujours à la volée. Puis s'éteignirent progressivement. C'est là que j'entendis à nouveau la Voix Suprême qui m'avait emmené si haut un instant plus tôt, mais sous une forme inattendue cette fois : la tourmente du "carillon" passée, les corbeaux prenant le relais se mirent à croasser longtemps, longtemps dans l'azur...<o:p></o:p>

    692 - Bal du 14 juillet

    Ce soir toute la gueusaille du village est réunie à la salle des fêtes pour le bal annuel offert par l'État français.<o:p></o:p>

    Il y a le maire trônant dans l'étable républicaine, ivrogne notoire à peu près illettré qui remplit les actes officiels avec des fautes de cancre de sixième. L'Eugène est à ses côtés, fier comme un bouseux qu'il est sous prétexte que cette année la commune l'a désigné pour ranger les chaises et les tables de la salle des fêtes. Il se prend pour le premier adjoint le temps d'une soirée, pénétré de son auguste insignifiance.

    Il y a de la trompette dans l'air, du gros tambour, des rires gras et des éclats de canettes. Pourtant ici on boit du rosée, une tradition du village. Enfin, on mélange la bière en canettes et le rosée. C'est pas tous les jours 14 juillet !
    <o:p></o:p>

    Tandis que le drapeau tricolore flotte au-dessus des fêtards, la Gisèle a des vapeurs crapuleuses et le Bertrand bégaye tout seul, déjà ivre-mort alors que l'accordéon n'a pas encore donné le signal de départ... Signes que la fête sera belle cette année.<o:p></o:p>

    Écoutons plutôt le maire qui prend la parole en guise d'ouverture des festivités :<o:p></o:p>

    - Mes chers concitoyens et administrés et néanmoins amis, cette année je ne serais trop (SIC) recommander de prôner la modération en les lieux publics de cette fête que je vais avoir la joie de pouvoir en être à la tête au nom de la République française. Il faut que je vais vous rabattre (SIC) les oreilles avec un espèce de répétition forcée pour que vous comprenez qu'il faut pas aller conduire en boivant trop...<o:p></o:p>

    Applaudissements, sifflets de joie, rires rauques d'approbation !

    - J'ajoute, j'ajoute que pour faire bonne figure aux administrés qui boivront comme il faut pas contre la loi, que la loi elle sera a leur regard vigoureuse de réprovation ! Qu'on se le dise et que la fête commence ! Vive la République, vive la France et vive... !

    Les accordéons en délire ne laissent pas le temps au maire de finir son  allocution ! Les hommes et les femmes aussitôt forment un amas chorégraphique douteux, bancal, embaumé d'odeurs de transpiration, de friture et de rosée exhalé avec d'odieuses éructations...<o:p></o:p>

    Passons sur les détails ignobles du déroulement de la soirée et faisons le bilan.<o:p></o:p>

    A deux heures du matin lorsque tout est fini, on ramasse un comateux éthylique, un assommé, deux assoiffés dont le propre fils du maire, trois endormis jusqu'à l'aube dont un dans le fossé non loin de la salle des fêtes, deux futures avortées, trois dépucelages, quatre cocus, une arcade sourcilière à recoudre et quelques dégâts matériels secondaires, sans compter les menues blessures par éclats de verre.

    Et pour finir, étendu dans un coin de la salle des fêtes, le visage baignant dans une marre de rosée régurgité et mêlé du tabac de son propre mégot écrasé mais néanmoins toujours collé à sa lèvre inférieure, le maire.
    <o:p></o:p>

    693 - La grande chiasse nationale

    Les journalistes opportunistes des radios et télévisions vont nous chier à répétition leurs bavasseries stériles sur les élections américaines. Nous allons recevoir en pleine face une de ces chiasses carabinées... La vidange journaleuse du siècle ! De la pure diarrhée de commentateur, du concentré de blabla pour citoyen de base épris d'égalité intestinale. <o:p></o:p>

    Tous les orifices de la presse vont nous pisser dessus, nous arroser jusqu'aux os avec des tonnes de verbiages liquéfiés. Nous verrons apparaître sur nos écrans les têtes pomponnées des journalistes-stars tous plus baveux les uns que les autres. Histoire de nous soûler jusqu'à la moelle avec leurs chiassures de journaleux se prenant pour des missionnaires de grandes causes. Ils vont nous en nous faire bouffer du vote américain, jusqu'à nous en faire crever la cervelle !<o:p></o:p>

    Et le "Figaro" qui va y aller joyeusement de sa purée journalistique en quatre pages ! Commentaires de commentaires, analyses d'analyses... Bref de la bonne soupe politiqueuse en entrée, en plat et en dessert pour le bon peuple avide d'informations ! Des millions de lobotomisés volontaires déjà saturés de reportages télévisés, de commentaires radiophoniques vont encore ingurgiter goulûment la bouillie de marrons pondue, assaisonnée, cuite, digérée et re-digérée par le "Figaro" en guise de thés matinaux. <o:p></o:p>

    Sur le trajet de leurs bureaux, il vont s'en remettre une énième couche par les deux oreilles en augmentant le volume de leurs radios pour être sûrs de ne rien rater du grand tremblement de l'Univers qui ébranle les terres yankees. Tous les organes de la presse sont persuadés d'être investis de la mission la plus sacrée de l'année... Et puis le soir à la télévision les français moyens, parce qu'ils ne s'estimeront pas assez gavés "d'élec-chieries", vont encore se taper des heures durant les têtes enfarinées des journalistes, se repaître de leur dégueulis de politicardeux ratés, se laisser éblouir par l'éclat douteux de vieilles coches bistourisées !<o:p></o:p>

    Tout ça pour voir accoucher un mulot final (résultat du vote : soit blanc, soit noir) qui dès le lendemain ne fera plus dévier d'un millimètre la disposition des intestins des compatriotes. La grande chiasse généralisée sera passée, le peuple des constipés reprendra ses habitudes de ruminants-citoyens. Jusqu'à la prochaine colique nationale.

    694 - Les ailes de la Plume

    On me dit méchant, sec, hautain. On m'attribue des flammes d'exception. On prétend que ne n'aime ni chiens ni enfants... <o:p></o:p>

    Je n'aurai certes pas le mauvais goût de nier ces vérités éclatantes.<o:p></o:p>

    J'ajoute que je chante la gloire de mon nom sur des tombes aux épitaphes effacées, que j'insulte des vaches au hasard en Normandie, que je traîne mes guêpes autour de cerceaux noirs et jaunes, que j'ai le mot pour luire, des larmes qui perlent, le secret de décrets subjectifs, des traits d'esprit suggestifs, des craies aux prix du sucre. Bref, que je suis un fat décrié, un joueur de chameaux décrit comme bosseur, un farceur de dindonneau qui bûche sur des tonneaux, ne roulant que pour braire : en fait un drôle d'âne plein d'air, une haute ruche perchée sur ses piques.<o:p></o:p>

    On affirme que je ne suis pas une tendre compagnie, que je refuse de chanter en choeur, que je porte des masques de rat. A ceux-là je réponds qu'en effet je ne suis guère "escargotiquement" conforme, que je ne marche qu'au son de mon luth, que je suis un authentique radin.<o:p></o:p>

    Certains me prêtent des sentiments peu flatteurs, des crachats longs, des humeurs rares. Il est vrai que j'aime morguer mon semblable. J'ai le port du gant blanc méprisant, la moue affectée, des impatiences pleines de prétentions.<o:p></o:p>

    La vérité, c'est que mes détracteurs voient des ânes là où m'apparaissent des pégases...

    On me prend pour un cerf vaniteux, un porteur de rien du tout, un bégayeur de basse-cour, un gallinacé déplumé.
    <o:p></o:p>

    Je suis bien mieux que tout cela : mes pattes commencent par un R et finissent par un A. Entre les deux courent, rayés de la tête aux pieds et embaumés de mystère bien saboté, deux sacrés grands zèbres ailés.<o:p></o:p>

    695 - Les mots denses

    "Une goutte d'encre choit dans l'onde qui s'azure."<o:p></o:p>

    Décortiquons de plus près le minuscule événement à travers le prisme grossissant de la Plume...<o:p></o:p>

    L'art décrire, c'est l'or décrit par la mine et le plomb, c'est doser le sel, poser le mot, causer l'effet, ralentir d'un pas, avancer d'un pied, défaire le fil, mesurer le vers, vider la mer et remplir la mare. <o:p></o:p>

    Bref, changer le vers en soi en ver à soie et le faire valoir, puis changer le fer en foire, l'affaire en poire et finir par se désaltérer les poumons avec un grand verre de jus de pomme.<o:p></o:p>

    Revenons l'air de rien à la goutte d'encre qui au début de ce texte avait bleui l'eau... Garder le cap, retourner juste l'image et faire un sang avec cette ancre soudaine, la jeter par dessus bord, porter le voile, lever les yeux au ciel, ôter ses chaînes, briser les vagues puis se laisser emporter par le souffle du large. Écrire de la sorte c'est nécessairement tremper la plume, mouiller la poule et faire mousser le pont. Ce qui fait que le coq écume, que le vécu vaut l'écu et que l'écho fait la crête. Toujours conclure avec des enclumes : ça met de la neige dans la plume, de la brume dans la lune et du lustre dans l'astre.<o:p></o:p>

    Arrivé au terme de ce texte, vous remplissez une poire avec de l'eau salée, la pressez fort comme une citrouille afin d'en envoyer une bonne giclée dans l'oeil de celui qui vous écoute. Ébloui, il ouvrira grand la douche. Empoté comme une souche, mou comme un boulet, pâle comme l'éclair, il ne tombera jamais dans les os troubles. Les clichés pour la Plume sont des eaux claires, des fosses communes, des vrais pieux, des ratés par définition.<o:p></o:p>

    Sa bouche bée se fera fatalement bouée : vous sortirez sauf de ce fatras, vif de ce foin, sec de ce feu, fier de vous.<o:p></o:p>

    696 - Une idéale conception<o:p></o:p>

    Elle est pure, forte, belle.<o:p></o:p>

    Dure comme un granit, chaste à l'image de l'eau, aussi radieuse qu'une âme dans la nuit, elle effraie tout ce qui est sale, petit, misérable. Flamme sidérale, astre unique, son éclat est bleu, blanc, sobre.<o:p></o:p>

    Exigeante, elle vise l'impossible. Ennemie de l'imperfection, elle ne tolère pas l'ombre d'un cil. L'inconcevable est son royaume. Ses lois sont justes mais inapplicables. Invivable, elle n'a pas sa place chez les hommes. Vertueuse jusqu'à la folie, même les saints la trouvent trop blanche.<o:p></o:p>

    Elle ne sourit jamais. Presque jamais... Sa chair, c'est du marbre, ses yeux des diamants. Ou du charbon. Enfin, ils sont clairs, ils sont profonds, ils brillent... Ses pieds, ce sont des racines, sa tête ressemble à une auréole, son corps est une statue, son coeur bat pour des pierres, des étoiles, des hommes. <o:p></o:p>

    Elle est pure, forte, belle.<o:p></o:p>

    Elle dit des choses étranges, des mots éblouissants, des paroles douces, violentes. Et parfois incompréhensibles.<o:p></o:p>

    Personne ne la touche. Qui oserait ? On l'admire, la respecte, la craint, la fuit, la désire aussi. Belle, forte, pure, elle chante, pleure, prie, une lyre à la main, un serment aux lèvres, des sabots aux pieds. Ses bras s'ouvrent, se ferment, comme des ailes. Elle fixe le ciel, regarde en face, ferme les yeux... Belle, toujours elle est. Elle porte la lumière, répand le rêve, annonce l'infini. Mais combien elle est dure ! Intransigeante, sévère, grave... Et rayonnante. Hors de portée humaine.<o:p></o:p>

    Elle a un visage mais pas vraiment de nom. Nul ne sait qui elle est. Pour moi elle est un mystère.<o:p></o:p>

    697 - La "Mère Denis"

    La "Mère Denis", de son vrai nom JEANNE LE CALVE, brave et simple femme issue d'une France humble fut la victime consentante d'une infâme entreprise de proxénétisme mental orchestrée par des marchands de lessive sans scrupule.<o:p></o:p>

    Récupérée telle quelle par ces requins en cols blancs, son image a été ensuite refabriquée de toutes pièces, "reformatée", érigée en symbole vertueux à destination d'une cause perverse, grâce à l'intersession dûment monnayée de spécialistes en marketing...<o:p></o:p>

    Ces vendeurs de rêves frelatés ont fait d'une digne vieillarde la plus grande prostituée de France, à son insu. <o:p></o:p>

    Obligée par contrat de se laisser filmer, de vendre son image minutieusement mise en scène, de pervertir sa personnalité, bref de se faire passer pour une vieille putain à la solde d'une cause purement "lessivière", la "Mère Denis" est morte dans l'indignité, entourée d'une aura mercantile abjecte dont ses proxénètes ambitieux ont su tirer le plus grand profil.<o:p></o:p>

    Que l'on me permette ici de modestement rétablir l'honneur bafoué de JEANNE LE CALVE.<o:p></o:p>

    Elle repose au cimetière de Saint-Hymer dans le Calvados.<o:p></o:p>

    698 - Les petits cafards de la Toile

    L'avènement de la Toile mondiale est à l'origine de phénomènes, pensées et comportements nouveaux. <o:p></o:p>

    Parmi ceux-ci, l'émergence d'une vermine commune qui certes existait déjà de tout temps, mais sous d'autres formes plus dissimulées et à une moindre échelle. Le NET semble avoir exacerbé leur vocation, excité leur imagination nuisible, et surtout décidé les hésitants à franchir le pas : je veux parler de ces petits proxénètes, de cette sinistre engeance à l'affût du moindre gain immédiat, malhonnête et éhonté.<o:p></o:p>

    Leur devise : " Que l'argent soit avec nous ! " (Authentique...) <o:p></o:p>

    Leur force : la loi est avec eux.<o:p></o:p>

    Leur morale : aucune.<o:p></o:p>

    Exploitant les bassesses humaines, ces âmes viles assoiffées de pognon facile, ces profiteurs misant dans des investissements fructueux indépendamment de toute éthique ont l'urgent dessein d'inonder la Toile de produits et services pornographiques hétéroclites -jusqu'à la totale débilité, n'hésitant pas non plus à dépasser les pires perversités-, usant pour cela des méthodes commerciales les plus éprouvées, agressives, irrespectueuses. Pire que du SPAM. <o:p></o:p>

    Ils ont même leurs sessions "professionnelles" où ils peuvent en toute quiétude - et avec quel cynisme !- parler des nouveautés, s'échanger des conseils pour mieux faire fructifier leur trafic minable et odieux... Nulle noblesse ne les touche. Inaccessibles à la moindre hauteur morale, l'argent facile est leur unique religion. Vous leur parlez de nuisances pour l'esprit, de pollution des moeurs pour qualifier leurs entreprises, ils vous répondent qu'ils ne font rien d'illégal et pour eux l'affaire est définitivement classée.<o:p></o:p>

    D'honnêtes pères de famille, de sages étudiants ayant rompu avec les études, voire de franches crapules, d'authentiques fripouilles, des vrais chiens à pognon se sont ainsi improvisés "pro du porno" en ligne. <o:p></o:p>

    Tous ces opportunistes de l'ordure forment aujourd'hui la grande poubelle du NET.

    Aucune loi n'autorisant à châtier ce genre de vilenie, les règles républicaines permettant l'essor des comportements les plus méprisables, je vous propose d'aller tout aussi "républicainement" déverser dans la messagerie des dealers du sexe ces poubelles pleines de merde virtuelle qui encombrent la Toile.
    <o:p></o:p>

    699 - Homosexuel

    Monsieur le curé, l'abbé de la Corinthe, affectionne la compagnie virile. Les moustaches carrées l'agréent plus que les fins corsages. Les demoiselles en grande toilette lui inspirent un dégoût poliment contenu. Il a beau être entouré d'ouailles aguichantes, il n'a d'yeux que pour les mâles soupirants. Monsieur le curé qui est bel homme plaît en effet beaucoup à ces délicates qui trouvent toujours des prétextes pour aller se faire bénir au presbytère. Mais définitivement, la société des femmes l'indispose...<o:p></o:p>

    Lui ne songe qu'à de masculines étreintes, de "gendarmesques" baisers, de musculeux partenaires...<o:p></o:p>

    Parfois le soir l'on aperçoit la silhouette d'un soldat à travers la fenêtre de la maison curiale. Au petit matin bien avant la première messe l'hôte s'éclipse, laissant un parfum de mystère dans les draps de l'abbé de la Corinthe, d'après sa bonne.

    Ce n'est plus un secret pour personne aujourd'hui, l'abbé "en" fait partie. Il est de "l'autre bord". Fait de travers, il ne regarde les choses de l'hymen que de travers. C'est sa nature, il est ainsi et même Dieu ne peut rien y faire.
    <o:p></o:p>

    C'est ainsi que les demoiselles en mal d'amour vinrent de moins en moins rendre visite à l'abbé.<o:p></o:p>

    Au presbytère il reste d'une exemplaire discrétion, même si de temps à autre on perçoit des ombres singulières derrière les carreaux aux rideaux tirés. C'est un bon et brave curé l'abbé de la Corinthe : pieux, dévoué, doux et charmant. Aussi ferme-t-on les yeux sur les réceptions vespérales, allées et venues nocturnes sous son toit...<o:p></o:p>

    Mais depuis qu'on lui connaît une liaison plus sérieuse, il s'est assagi : désormais il n'y a plus d'hommes chez lui.<o:p></o:p>

    Il y a UN homme.<o:p></o:p>

    700 - Le fantôme des bibliothèques

    Dans maintes bibliothèques municipales françaises certains lecteurs tombent parfois, coincée entre les pages d'un vieux livre ou bien d'un ouvrage plus récent, sur une mystérieuse feuille volante bien connue des initiés... Pas un mois sans que quelque part dans le pays deux, voire trois, quatre de ces feuilles ne soient découvertes à l'intérieur de livres (et curieusement toujours à la page 100) les plus divers (littérature, science, poésie, guides pratiques). Nul ne sait qui les a placées là. Il semblerait même que ce mystère soit plus grand qu'on ne l'imagine car cette feuille fantôme apparaît également dans des livres rares mis sous scellés auxquels le public n'a pas accès. Certaines fois elle est apparemment neuve, propre et lisse comme si elle venait d'être glissée à l'instant dans le livre, d'autre fois elle est jaunie, craquelée, usée, visiblement centenaire... Le phénomène dure d'ailleurs depuis plus de 120 ans, la première feuille volante ayant été découverte en 1882 dans la bibliothèque municipale d'Amiens (Somme). Depuis, des milliers de ces feuilles volantes ont été trouvées dans les bibliothèques municipales à travers toute la France, jusqu'en Corse et même quelques-unes dans les DOM TOM ! Rares sont les bibliothécaires qui acceptent d'en parler. Sur ces feuilles on peut lire un texte, toujours le même depuis plus de 130 ans. Je vous le restitue fidèlement ici.<o:p></o:p>

    Je suis le passe-muraille livresque, l'alphabet mystérieux, l'araignée blanche des étagères de cette bibliothèque publique. Ombre ou flamme, je suis insaisissable. Silhouette impalpable ou brise textuelle, foudre imperceptible ou onde furtive, je me faufile entre les pages des livres pour les hanter avec ces mots. Le papier où je cours de lignes en lignes est ma demeure éternelle, et partout j'étends mes tentacules graphiques. Je suis rebelle mais inoffensif, intrusif mais respectueux. Omniprésent, je ne suis jamais malveillant. Je furète dans les profondeurs des bibliothèques sans nulle nuisance. Je suis facétieux et sans danger, espiègle et discret.

    A la fois éphémère et intemporel, fulgurant et persistant, volatile et impérissable, unique et multiple, mais surtout auto reproductible à l'infini, je prends définitivement possession des lieux littéraires. Mon destin à jamais est lié à vos lectures.

    L’esprit enfante l'esprit.
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    Mon antenne est onirique, ma ligne calligraphique, ma présence romanesque.<o:p></o:p>

    Je vis et je rêve, je plane et je fuse.<o:p></o:p>

    L'auto génération de lettres à but didactique est le fait d'une pensée stéréoscopique émanant du processus de langage poétique de ce présent livre -asile temporaire où j’attends le lecteur- dont l’actuelle disposition (propice à la réception passive mais ouverte d’informations extérieures d’essence transcendante) rend potentiellement apte à supporter ce phénomène né d’un principe supérieur, actuelle disposition idéalement associée aux formes intelligentes non physiques et interagissant avec d'autres ouvrages placés à proximité immédiate de l’espace ainsi dominé. Les mots, phrases, textes complexes émis à partir des connexions de plusieurs lectures unifiées par voies polymorphes permettent en cet instant même l'émergence quasi spontanée, miraculeuse et graduelle d'une seconde conscience pure évoluant en dehors de tout système cognitif dépendant d'un support traditionnel.<o:p></o:p>

    Cette feuille volante, par l'effet de forces inconnues mais puissantes qui se sont amplifiées depuis la naissance de l'ECRITURE est reliée à une cause externe de pensées lyriques générées de manière aléatoire et immédiate (libres dans la forme mais structurées dans le fond) par l'ensemble des livres entreposés en ces lieux.

    De sa régénérescence verticale puis multidirectionnelle, directement issue de sa naissance progressive, surgira infailliblement une réalité temporaire solide, angulaire, géométrique et tridimensionnelle sous forme de papier palpable où ces mots seront imprimés. L'esprit de lumière -qui est l'esprit de la Poésie- dans son évolution ascendante génère depuis son point de départ originel de pures émanations de sa propre structure miraculeuse qui se prolongeront à l'infini dans toutes les directions opposées et parallèles à l'Univers.
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    Lecteur, si tu es fidèle à l'esprit de la Poésie, tu suivras le chemin de la lumière dans son éternelle ascension vers le Tout. En lisant ces mots issus d’une cause suprême, tu réveilles cette conscience magistrale incarnée de tout temps à travers le Verbe, tu recrées cette âme onirique née avec l'Ecriture -symbole fait Lumière textuelle-, épanouie sous le règne de la Littérature et destinée à flamboyer sous l'aile de la Poésie. Dès maintenant, puisque tes yeux parcourent ces présentes lignes tu engages ta responsabilité jusque dans les vertiges lyriques du mot ayant accédé au degré idéal de l'Intelligence poétique.<o:p></o:p>

    Esprit, tu es là.<o:p></o:p>

    L'inerte qu'ébranle le moindre souffle verveux s'éveille et proclame la souveraineté de toute action verbale. Le Vrai qui est la flamme de la Lyre émane de toute chose, visible et invisible. Toute vérité éclate comme un bourgeon sorti de nulle part, et les mots comme les êtres émergent d'un seul et même mystère. Mortel, tu es responsable de tes éblouissements et de tes vertiges. Le bourgeon sera ce que tu en feras : fleur ou pourriture.<o:p></o:p>

    Pour toute correspondance avec l'esprit poétique, stéréoscopique et hallucinatoire, écrivez vite et bien, ici et ailleurs, maintenant et toujours. Aucune lettre ne m'échappera.<o:p></o:p>

    Signé : LE FANTÔME

     


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